Avril 2005. Alors que la planète pleure Jean Paul II, un jeune
monsignore d’origine maltaise, Charles Scicluna, enquête au Mexique
sur la toute-puissante Légion du Christ. Fondée en 1941 par le père
Marcial Maciel, elle est la principale source de vocations
sacerdotales. Scicluna, responsable de l’instruction des crimes
sexuels au sein de la Congrégation pour la doctrine de la foi, est
mandaté par son patron, le cardinal Ratzinger. Il va récolter des
informations accablantes.
Les hommes auditionnés par le prélat racontent la même
scène infernale, qui a massacré leur enfance et leur adolescence
dans les années 1940 et 1950. Prétextant être malade, Maciel
s’alitait et faisait appeler un petit séminariste dans sa chambre.
Il le forçait à le masturber pour, disait-il, apaiser ses douleurs.
Puis il prenait son plaisir sur ses victimes. Le prêtre leur
faisait jurer de garder le silence, assurant qu’il avait pour cela
une permission spéciale du pape. Et allait jusqu’à donner
l’absolution aux garçons qui se sentaient coupables. On apprendra
en 2009 que Maciel, par ailleurs toxicomane, avait eu trois enfants
de deux femmes différentes. Il y a quelques jours, le 1er mai,
le Vatican déclarait que l’homme était un imposteur : "Les
comportements très graves et immoraux du père Maciel, confirmés par
des témoignages irréfutables, se présentent parfois comme de vrais
délits et démontrent une vie sans scrupule ni authentique sentiment
religieux." La Légion, infectée jusqu’à l’os, doit être totalement
refondée.
Pourquoi a-t-il fallu tant d’années pour que
l’effroyable vérité soit assumée ? Tout commence en 1997,
lorsque huit anciens séminaristes se décident à crier leur
souffrance dans le Hartford Courant, un quotidien
américain. Ils le font après avoir alerté l’Église dans les années
1970, et constaté son silence. En 1998, ils portent le dossier sur
le bureau du cardinal Ratzinger, à la Congrégation pour la doctri