L’histoire de la campagne de vaccination française contre le Covid-19 est désormais bien connue. Du moins dans ses grandes lignes : après un début poussif et malgré une certaine défiance d’une partie de la population, les Français se sont convertis en masse.
Avec près de 84 % de la population de plus de 5 ans immunisée avec deux doses et 62 % protégée par le rappel, la France figure parmi les meilleurs élèves européens. L’Espagne, l’Italie ou le Danemark font un peu mieux. Mais le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Autriche, la Grèce et bien d’autres restent derrière. Hors d’Europe, même, les Etats-Unis, pays de Pfizer et de Moderna, et Israël, champion supposé de l’immunisation, affichent un taux de couverture inférieur.
Sauf qu’un film ne se réduit pas à son pitch, pas même un feel-good movie. Et l’image d’ensemble cache des zones d’ombre. « Indiscutablement, il y a des trous dans la raquette, admet Alain Fischer, président du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale. Ça ne doit pas masquer les résultats globalement bons. Mais nous devons regarder ces faiblesses pour progresser. D’autant que certaines d’entre elles peuvent être préoccupantes. » Revue de détail.
- Les plus de 80 ans non vaccinés
C’est sans aucun doute le talon d’Achille du dispositif de protection construit depuis deux ans et demi par les autorités sanitaires françaises, et une inquiétude qui ne passe pas : environ 450 000 personnes âgées de plus de 80 ans n’ont toujours pas reçu la moindre dose.
« Cela reste notre plus grande menace », assure Alain Fischer. Car plus que tout autre facteur, le grand âge augmente le risque de forme sévère. A eux seuls, les plus de 80 ans représentent 45 % des personnes hospitalisées. Raison pour laquelle ils ont pu, les premiers, dès janvier 2021, bénéficier de la vaccination. Pourtant, une sorte de plafond de verre s’est installé : alors que les autres catégories d’âge progressaient rapidement, les plus vieux ont résisté.
Un constat qui nous distingue de nos voisins. Les Anglais, les Espagnols, les Portugais, les Italiens ont protégé presque tous leurs anciens. En France, pas loin de 10 % échappent au dispositif. « A système comparable, nous sommes les plus mauvais d’Europe dans cette catégorie, regrette Olivier Guérin, professeur de gérontologie au CHU de Nice et membre du conseil scientifique. Depuis un an, nous ne progressons pratiquement plus. Nous avons beaucoup tenté pour atteindre ces populations. Mais le résultat est clairement décevant. » Plus de 40 000 opérations dites d’« aller vers » ont ainsi été mises en place. Des bus itinérants, des expérimentations avec La Poste, le recours aux fichiers canicule établis depuis 2004, la relance des généralistes pour qu’ils traquent leur patientèle… En vain.
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