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Santé

Pourquoi Sanofi se lance dans la course aux vaccins contre le coronavirus

Le laboratoire tricolore mise sur sa recherche, sa plateforme technologique - et une alliance historique avec les autorités américaines fraîchement renouvelée - pour emporter la course à l'échalote vers un vaccin anti-coronavirus. 

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UN VACCIN CONTRE LA DENGUE SERAIT DISPONIBLE EN 2015

Coronavirus : pourquoi Sanofi se lance dans la course aux vaccins

(c) Reuters

En être… ou pas ? Pressé par les médias, le 6 février, lors des résultats annuels du groupe, Paul Hudson s’était montré on ne peut plus décidé : Sanofi serait bel et bien parmi les acteurs à se lancer dans la course à un futur vaccin contre le nouveau coranovirus, le Covid-19. "Donnez-nous quelques semaines", avait alors lâché le nouveau directeur général, manager plutôt féru de transparence - et de réactivité. Aussitôt dit… le 18 février, le laboratoire tricolore annonçait s’être associé au ministère américain de la Santé. C’est le troisième laboratoire, après les américains Johnson & Johnson et Regeneron, avec lequel les Etats-Unis choisissent de collaborer sur ce sujet.

Les deux parties se connaissent. Au début des années 2000 déjà, les Américains avaient choisi Sanofi Pasteur, l’entité mondiale vaccins du Français, pour mettre au point un vaccin contre la grippe aviaire. Le laboratoire tricolore, une nouvelle fois, va travailler avec la Barda (Autorité pour la recherche et développement avancée dans le domaine biomédical), émanation du ministère américain de la Santé. "Nous apporterons tout notre savoir-faire  et sommes convaincus que cette collaboration pourrait donner des résultats significatifs en termes de protection du public contre cette poussée épidémique", a expliqué David Loew, vice-président exécutif et responsable de Sanofi Pasteur.

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Expérience du SRAS

Pour réussir, le Français parie d’abord sur sa force de frappe dans l’industrie du vaccin – un métier qui représente plus de 12 % de son chiffre d’affaires (5,1 milliards d’euros en 2019). En tête, sa capacité à développer et à produire des vaccins à grande échelle. Au cours des dix dernières années, Sanofi a investi plus d’un milliard d’euros pour augmenter ses capacités de production sur ce métier.

Dans la chasse au Covid-19, il compte surtout mettre à profit ses recherches passées sur le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère), virus apparu en 2002 et quasiment disparu en 2004. En travaillant à partir du vaccin candidat préclinique qu’il avait élaboré à l’époque, il espère mettre au point un nouveau candidat potentiel contre le Covid-19. Pari d’autant plus crédible que, comme le souligne David Loew, "le SRAS possède 75 % de similarités génétiques" avec le coronavirus. Et qu’il dispose, depuis l’acquisition en 2017 de la biotech Protein Sciences, d’une plateforme technologique de recombinaison de l’ADN, permettant de "parvenir à une parfaite compatibilité génétique avec les protéines présentes à la surface du virus". De quoi aussi "produire rapidement de grandes quantités d’antigènes (substance qui provoque la fabrication d’anticorps) du coronavirus." Une plateforme qui a déjà fait ses preuves pour son vaccin antigrippal quadrivalent Flublock, également trouvé dans la corbeille de la mariée de Protein Sciences.

Réduire sa dépendance à la Chine

Malgré ces atouts, impossible d’imaginer vacciner les populations dans les prochaines semaines. Sanofi espère disposer d’un candidat vaccin dans "moins de six mois", pour des essais cliniques "dans un an à un an et demi". D’ici là, l’épidémie aura certainement évolué. D'ores et déjà, pour réduire sa dépendance - relative - à la Chine pour la fourniture en principe actifs (5 % seulement), le laboratoire a annoncé le 24 février qu'il redessinait sa carte industrielle en Europe : le regroupement dans une entité indépendante de six des ses usines chimiques en Europe - spin off à la clé en 2022. Une manière de poursuivre aussi sa drastique chasse aux coûts.

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Mais alors, dans ce contexte... pourquoi se lancer dans la course au vaccin anticoronavirus ? Pas pour le business prometteur, à première vue. A l’horizon de 2024-25, selon les estimations, le marché des vaccins, toutes catégories confondues, représentera quelque 80 milliards de dollars – quatre à cinq fois moins que celui du cancer, le nouveau Graal de l'industrie. Comme avec tout produit pharmaceutique, les recherches et essais prennent du temps et beaucoup de ressources, avec le risque permanent que le vaccin arrive trop tard dans la bagarre contre la maladie. D’où l’intérêt aussi des partenariats public-privé pour accélérer la machine et mutualiser les moyens (et les coûts). Enfin, contrairement aux vaccins plus "courants", comme celui contre la grippe, le DTP ou la coqueluche, le marché de ces vaccins "hors normes" est a priori nettement moins juteux. Conçus dans l’urgence, lors d'une épidémie, la pression est forte pour qu’ils soient accessibles et administrés à des coûts faibles. Une équation difficile à rentabiliser.

En termes d’image, en revanche, le bénéfice est réel. Impensable pour un acteur de la taille de Sanofi, comme ses pairs dans cette industrie (Merck, Pfizer, GSK...), de rester inactif face aux populations et gouvernements. D’autant que certaines biotechs lorgnent aussi ce marché (Regeneron, Gilead…). Interrogé lors d’un forum consacré aux enjeux de la vaccination mondiale, à Davos le 22 janvier dernier, Paul Hudson avait évoqué sans ambages l’idée "d’action au service d’une cause".

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