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26/05/2016

L'eucharistie en 2016 : l'analyse du cardinal Sarah

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Un entretien à étudier sérieusement :


 

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Le cardinal Robert Sarah est le préfet de la Congrégation pour le culte divin. Il parle en expert et n'hésite pas à indiquer ce qu'il faut changer : d'où l'intérêt de son entretien à Famille chrétienne (23/05).

 

 

Le cardinal rappelle des points catholiques fondamentaux :

- "remettre l'eucharistie au centre de notre vie",

- "replacer Dieu au centre de la liturgie" (notamment redécouvrir le rôle du silence),

- redécouvrir que "l'assemblée, avec le prêtre à sa tête, est comme aspirée par le mystère de la croix au moment de l'élévation",

 - reconnaître la liturgie comme "oeuvre de Dieu", ce qui implique "une vraie conversion du coeur",

- procéder à "un travail de formation" pour "retrouver la sacralité et la beauté de la liturgie",

- rétablir dans la richesse théologique et l'intégralité des "formules du Missel romain"  leur traduction française (le pape en a confirmé la nécessité au cardinal Sarah le 2 avril dernier)...

Trois idées dans l'entretien sont particulièrement frappantes :

- "la participation des fidèles ne saurait être comprise comme la nécessité de 'faire quelque chose' ; elle consiste  à se laisser entraîner à la suite du Seigneur dans le mystère de sa mort et de sa résurrection" ;

- " on ne va pas à la messe pour assister à une représentation : on y va pour participer au mystère de Dieu, a rappelé le pape tout récemment" ;

- "seul un regard trempé dans une foi contemplative nous gardera de réduire la liturgie à un spectacle où chacun aurait un rôle à jouer."

 

► En foi de quoi le cardinal appelle à rectifier certaines dérives :

- "beaucoup de nos liturgies deviennent des spectacles",

- "en cherchant à inventer des liturgies créatives ou festives, nous courons le risque d'un culte trop humain, à la hauteur de nos désirs et de nos modes du moment",

- "si les célébrations liturgiques se transforment en autocélébrations humaines, le péril est immense car Dieu disparaît",

- "une Eglise refermée sur elle-même en un cercle clos aurait perdu sa raison d'être."

 

 

L'analyse du cardinal est à prendre au sérieux. On ne doit pas la lire en projetant distraitement sur elle les vieux stéréotypes des années 1970-1980. Ces années-là avaient sans doute vu une désacralisation en France ; violant les consignes de Vatican II, la pratique liturgique avait souvent suivi la sécularisation et le relativisme qui étaient les modes de l'époque. Mais c'était il y a quarante ans... Aujourd'hui d'autres "modes du moment" (selon la formule du cardinal) influencent des laïcs. Pleins de bonnes intentions, mais croyant que la célébration dépend de leur créativité musicale*, certains animateurs liturgiques paroissiaux produisent des animations problématiques : le volume sonore et le syncopé dispersent l'attention et l'éloignent de l'action de l'autel. Dans certaines "messes des jeunes" avec instruments, chorale, soliste avantageuse et chants happy-clappy (souvent en anglais**), le spectacle supplante la liturgie. C'est ce que le cardinal Sarah appelle "l'autocélébration". Et c'est un tout autre problème que la dérive progressiste d'autrefois... Certaines églises sont bondées ces dimanches-là ? Tant mieux : mais le défaut n'en est que plus sensible.

Loin de nous les nostalgies de pompons-dentelles ou de rubricisme à l'ancienne... (D'ailleurs les communautés tridentines ne sont pas exemptes non plus du danger d'autocélébration, sous une autre forme plus subliminale).  C'est de problèmes d'aujourd'hui que parle le cardinal préfet de la Congrégation du culte : le "chauffer la salle", qui est étranger à la liturgie catholique ; la greffe du tapage sur la messe, qui produit une incohérence profonde. Qu'on ne réponde pas au cardinal - comme je l'ai entendu dire ailleurs : "ce n'est pas parce qu'on est chrétien qu'on doit s'isoler" ! Ce n'est pas "s'isoler" que de dire avec l'Eglise : "il n'est pas concevable que n'importe quelle musique ait sa place dans le culte chrétien", et "l'Esprit Saint, qui conduit au Logos, suscite une musique qui élève le coeur - le sursum corda de la liturgie. Loin de la dissolution dans l'ivresse informe, c'est l'intégration de l'homme tout entier dans ce qui l'élève qui forme le critère d'une musique selon le Logos..." ***

 

 _______________

* Pourquoi tant d'équipes paroissiales mettent-elle au placard le vaste répertoire Gouze-Emmanuel (etc) au profit de petits airs discordants et souvent inchantables ? Il faudrait étudier les causes psychologiques conduisant à exclure les mélodies amples pour les remplacer par du saccadé.

** Pourquoi en anglais ? Pourquoi remplacer - dans une paroisse de la région parisienne  - le Gloria par Glory glory Hallelujah et le Kyrie par Bless my soul O Lord ?  Jusqu'à nouvel ordre, le globish n'est pas plus vernaculaire en France que le latin ou le grec.

*** Joseph Ratzinger, L'esprit de la liturgie, Ad Solem 2002. Le futur Benoît XVI y écrit aussi : "L'homme devrait s'inspirer de la musique intérieure du cosmos et de son ordonnance, et faire résonner sa musique du 'chant fraternel' des sphères célestes..."

 
 

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Commentaires

AD ORIENTEM

> Lire ou écouter le cardinal Robert Sarah, c'est entendre une voix de vérité et de raison, à mille lieues de toute crispation ou posture. Par exemple, sur la célébration ad orientem :
"Se convertir, c’est se tourner vers Dieu. Je suis profondément convaincu que nos corps doivent participer à cette conversion. Le meilleur moyen est certainement de célébrer – prêtres et fidèles – tournés ensemble dans la même direction : vers le Seigneur qui vient. Il ne s’agit pas, comme on l’entend parfois, de célébrer le dos tourné aux fidèles ou face à eux. Le problème n’est pas là. Il s’agit de se tourner ensemble vers l’abside qui symbolise l’Orient où trône la croix du Seigneur ressuscité. (...)
La liturgie de la Parole justifie le face-à-face du lecteur et des auditeurs, le dialogue et la pédagogie entre le prêtre et son peuple. Mais dès que nous arrivons au moment où l’on s’adresse à Dieu – à partir de l’offertoire –, il est essentiel que le prêtre et les fidèles se tournent ensemble vers l’Orient. Cela correspond tout à fait à ce qu’ont voulu les Pères conciliaires."
Ayant participé récemment à un pélerinage jubilaire à Rome, je puis en témoigner. Nous avons eu le privilège de célébrer une ou deux eucharisties dans des chapelles prestigieuses des basiliques majeures. On n'y trouve souvent qu'un seul maître-autel adossé au fond de l'abside, et notre prêtre accompagnateur n'a eu d'autre choix que de nous tourner le dos pour la consécration (ce qui ne lui a posé aucun état d'âme soit dit en passant). À aucun moment je n'ai eu cette impression vexante de "curé qui dit sa messe tout seul dans son coin" comme on entend souvent. Et quand les offrandes eucharistiques sont élevées, ce sont elles qu'on regarde, pas le dos de chasuble de l'abbé !
Je reconnais toutefois l'importance de bien entendre ce que prononce le célébrant, ce n'était pas exactement le cas autrefois. Depuis l'ère du microphone, c'est rarement un problème. Toute l'assemblée se tourne vers le Père pour Lui offrir le Corps et le Sang de Son Fils, avant de se recevoir de Lui, rien de plus logique, "cela est juste et bon".
À l'inverse (total), rien de plus détestable que ces saynètes du Jeudi-Saint, encore bien trop nombreuses, au cours desquelles un célébrant mal inspiré s'assied derrière un vulgaire tréteau, tourné vers son "public", entouré de douze petits apôtres des deux sexes façon Cène de Leonardo, pour faire mémoire de son Maître et Seigneur d'une manière où le mièvre le dispute au désinvolte – pour ne rien dire de la validité de la chose, sur laquelle je me garderai de me prononcer mais nourris néanmoins de sérieux doutes.
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Écrit par : Albert Christophe / | 26/05/2016

LE GRÉGORIEN

> Et pourquoi pas revenir à la vraie source du chant liturgique : LE CHANT GRÉGORIEN ?
Les chants du Renouveau charismatique ou de la Liturgie du Peuple de Dieu du père André Gouze sont un moindre mal certes mais ils comportent des limites. Je le dis en connaissance de cause pour avoir pratiqué les uns et les autres chants depuis très très longtemps, un pionnier dans ma paroisse, presque !
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Écrit par : Antoine / | 26/05/2016

"DANS MA PAROISSE"

> Merci PP de mettre en valeur ces propos du cardinal Sarah ! J'essaie tant bien que mal, dans ma paroisse rurale profonde, d'apporter les chants de l'Emmanuel et d'A. Gouzes. Mais les vieux cantiques informes et insensés ont la vie dure...
J'acquiesce totalement par ailleurs à la nécessaire et ferme distinction entre la messe, acte sacré et solennel de Dieu lui-même, qui nous entraîne en lui, et les groupes de prière où tout est permis, batterie et percussions comprises, pour chanter la louange dans la jubilation, l'exaltation, et la puissance d'exhortation.
Ainsi, je supporte mal une batterie dans une église à la messe (quel barnum !), mais je prie et crie pour le développement de groupes de worship rock (comme faisaient les Anglais de Delirious?), voire de worship metal (comme les Américains Rob Rock ou les vétérans de Stryper-Isaiah 53:5). Il y a une intériorité incroyable dans un concert de worship rock, mais aussi la puissance électrique (le sommet du genre étant "Now is the time / Live at Willow Creek" de Delirious? en 2005, par exemple dans "Miracle Maker", ou encore dans les solos finaux d'"Investigate" : "Do you want the Fire ?... Here it comes !").
Enfin, je suis depuis toujours pour l'orientation. Je me souviens d'une messe de confirmation dans la grande chapelle de Passy-Buzenval (dans le diocèse de PP !), où le jeune aumônier, frère de Saint-Jean, avait célébré face au soleil levant, sur le petit côté de l'autel, celui-ci étant situé au milieu de cette sorte de grande halle qu'est l'église, avec le peuple de part et d'autre. C'était beau, simple, plein de sens, et même impressionnant.
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Écrit par : Alex / | 26/05/2016

UNE LITURGIE ANTI-CONCILIAIRE

> Le cardinal Sarah, sans parler ici de la situation spécifique de notre pays, est parfaitement conscient de la pauvreté liturgique qui touche de trop nombreuses paroisses françaises.
Étant Lorrain d'origine, l'un de mes professeurs de lycée, ancien séminariste, m'a souvent rapporté le souvenir qu'il gardait du cardinal, alors étudiant au grand séminaire de l'Asnée à Nancy ; dans l'un de nos derniers échanges, il évoque à son propos un "homme de Dieu, guidé par la verticalité, source de sa profonde spiritualité et humanité... Robert est un saint de cette Terre".
Nul doute que le cardinal Sarah a pleine conscience de la difficulté de sa tâche, tant la dénaturation de la liturgie touche l'Église universelle dans son ensemble.
À Taïwan, où je réside depuis près de huit ans, il ne m'a pas encore été donné de participer à une liturgie digne et profonde : les "messes-karaoké" sont, hélas, très largement la norme. La liturgie de la Sainte Nuit de Noël, par exemple, me fit ressentir beaucoup de peine et de tristesse devant le spectacle qui m'était donné. Dès la procession d'entrée, la messe fut anthropocentrique, sans aucune recherche de sacralité. En moi, ce fut un déclic, une question que je ne m'étais jamais posée : "pour qui viens-je ce soir ?"... est-ce pour acclamer quelques prêtres européens vieillissants, avachis sur leurs sièges, affublés d'aubes froissées... ou pour le Fils de l'Homme dont nous célébrions le mystère de l'Incarnation et qui se rendait présent dans ce brouhaha ?
La réponse se trouve dans la question elle-même, mais force est ce constater que certaines manières contestables de célébrer le Novus Ordo tendent à désacraliser jusqu'à l'excès le Saint-Sacrifice.
Or ce fut, ce soir-là, un véritable florilège : entrée précipitée et désordonnée des célébrants, omniprésence d'un membre de l'équipe d'animation pastorale annonçant et commentant au micro chaque étape de la liturgie, totale absence d'oraison ou de silence permettant la prière des fidèles, enchaînement des rubriques au lance-pierres, sermon prononcé par un jeune prêtre hongrois d'une banalité déconcertante et sans aucun effort de verticalité, consécration lue de manière automatique, communion des fidèles à nouveau "à la va-vite" et assurée par des laïcs, aucun usage de l'encens ou de croix de procession.
Le clou consistait, après la communion, en une interminable liste d'annonces lues par la présidente de l'équipe d'animation pastorale ravie de devenir pour le coup le centre du spectacle. La dame, debout devant la Crèche, micro à la main, remercia les uns après les autres tous les membres de l'équipe, avec un mot suivi d'une salve d'applaudissements, de hourras voire de sifflets pour chacun d'eux.
Après cela, un échange de cadeaux eut lieu à nouveau juste à côté de l'autel : l'omniprésente "présidente" remettant à chacun des prêtres leurs cadeaux de Noël, déclenchant à nouveau la réaction déchaînée de l'assistance. Un prêtre tchèque, se prêtant au jeu, alla jusqu'à coiffer la paire de chaussettes noires que l'on venait de lui offrir, devant l'hilarité générale... Ce même prêtre qui venait, "in persona Christi", de prononcer la prière eucharistique (la numéro 3, cela va sans dire) à l'adresse du Père.
Devant une telle vacuité, je ressentis un immense moment de tristesse pour l'Eglise et pour le Christ qui se rendait présent ce soir-là.
Où était-il, le Christ, dans ce spectacle ?
Chacun était-il conscient qu'il venait de Le recevoir ?
En expédiant la consécration et en distribuant la communion à toute vitesse, alors que l'on réservait plus de vingt minutes pour un échange de cadeaux dans une ambiance surchauffée, où était la verticalité d'une liturgie qui aurait dû nous rapprocher de Dieu ?
Nulle part.
Cette messe fut un festival d'horizontalité et d'auto-célébration.
Je n'ai pas pu communier ce soir-là. Soudain me sont venus à l'esprit de nombreux souvenirs d'un séjour aux États-Unis où je fis l'expérience de liturgies profondes et méditatives, où le grégorien et la polyphonie se mêlaient à des homélies dépourvues de poncifs et de répétitions... Plus jeune, en banlieue nancéienne, j'avais eu droit aux rondes autour de l'autel, à la communion sans génuflexion, sans aucune intériorisation de la sacralité du Corps du Christ, aux sermons bâclés, aux chants de Raymond Fau à la guitare ou au magnétophone pour accompagner la liturgie.
Le choc des cultures liturgiques fut salvateur.
Je pense que les excès vécus durant la dernière Nuit de Noël n'ont en rien été souhaités par le Concile... ni par le Novus Ordo qui peut (et doit) être magnifique lorsqu'il est célébré dignement.
Il ne s'agit pas là de liturgie post-conciliaire comme on l'écrit parfois, mais peut-être simplement anti-conciliaire, contraire au texte de Sacrosanctum Concilium.
Le lendemain de cette expérience liturgique, j'ai suivi, sur internet, la messe de minuit retransmise à la cathédrale de Cologne. Je l'ai trouvée superbe de profondeur et de verticalité (l'architecture, c'est vrai, y aidait !).
L'intégrisme ne mènera certes l'Eglise nulle part, mais la recherche d'une verticalité perdue nous permettra, je l'espère, de retrouver une foi plus profonde et davantage de spiritualité et de proximité avec le Christ... le tout, cela va sans dire, en plein accord avec l'enseignement du Concile.
Pardon pour ce message un peu long mais il m'a semblé que cette expérience personnelle confirmait, à l'échelle de l'Église universelle, la position du cardinal Sarah sur le changement qu'il n'a de cesse d'appeler de ses vœux.

PV


[ PP à PV - Merci au contraire de ce témoignage. La messe que vous racontez est tout de même un cas-limite... Ce que je critique dans ma note (en écho au cardinal Sarah) est nettement moins grave, quoique très défectueux et nécessitant un recentrage d'urgence. ]

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Écrit par : Philippe de Visieux / | 27/05/2016

L'ORIENTATION

> 100% d'accord avec votre blog et avec les deux commentaires qui suivent. Il y a un problème anthropologique avec nos liturgies actuelles: elles ne répondent pas aux besoins existentiels religieux de l'homme. Je pense que la clef est dans l'orientation du prêtre vers le sanctuaire à la Messe.Le remettre à sa place aurait un effet énormément bénéfique; mais l'Eglise peut-elle l'imposer ?
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Écrit par : David Baird-Smith / | 27/05/2016

SANS MICRO

> "Depuis l'ère du microphone, c'est rarement un problème" ? je crois que le micro fait partie du problème: les églises ou des chapelles antérieures à l'invention de la sonorisation ont pour la plupart une architecture conçue pour la voix. les haut-parleurs rendent le son quelquefois difficile à supporter. Pour peu que le chœur soit approximatif, cela devient une vraie épreuve!
De plus l'absence de "prothèse vocale" oblige le lecteur à une meilleure pause de voix, à apprendre à lire de façon intelligible, en bref, que sa voix porte.
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Écrit par : Philippe / | 27/05/2016

> Le grégorien, que j'aime et admire, ne peut être "la" solution — tout au plus une partie de celle-ci. Il y a toujours eu, depuis l'époque moderne au moins, des cantiques en langue vernaculaire dans les églises, et le grégorien est difficile à chanter pour la plupart des gens.
Ce qui est propre à la France, c'est l'obsession permanente de la rupture et, trop souvent aussi, la piètre qualité des cantiques (une constante, pour le coup, malgré les ruptures de ton, depuis le répertoire sulpicien au répertoire des années 1970-80…).
Quand on va à la messe en Angleterre, on est souvent frappé, a contrario, par l'extraordinaire qualité du répertoire — d'ailleurs en partie commun aux anglicans et aux catholiques. Une partie non négligeable des cantiques vient des milieux méthodistes, dont le "culte" a toujours fait une grande place au chant (puisque la liturgie proprement dite y est très réduite). Une partie aussi vient du catholicisme créatif et vigoureux du début du 20e siècle.
Ce répertoire anglais a trois qualités qui nous manquent bien souvent: qualité de la langue (façonnée par l'anglais de la 'King James Bible', je suppose); qualité musicale (tradition du chant choral, sans commune mesure avec chez nous); qualité spirituelle et théologique des paroles, façonnée par la Bible.
Les chants de l'Emmanuel (ou apparentés) sont ce qui se rapproche le plus aujourd'hui de cet ensemble de qualités. Avec un bémol, me semble-t-il, sur lequel un ami protestant US a attiré mon attention: la seule ou principale "émotion" véhiculée par ces chants (comme par ceux des évangéliques US) est la joie. C'est super, la joie, c'est magnifique et c'est chrétien. Mais une spiritualité "intégrale" doit aussi pouvoir exprimer la douleur, la compassion, la contrition. C'est inséparable de la joie: quel sens aurait la joie d'être libéré du péché, s'il n'y avait d'abord le regret d'avoir offensé Dieu et son prochain? Quel sens a la joie de la Résurrection s'il n'y a pas la douleur du deuil?
Et puis, il y a une quatrième qualité des cantiques anglais: ils sont populaires, on les chante parfois depuis 100 ou 200 ans, et pratiquement tout le monde les connaît, même ceux qui vont rarement à la messe.
Ces remarques, évidemment, ne veulent pas suggérer qu'il faut importer les cantiques anglais. Je suis au contraire d'accord avec PdP sur ce point (de toutes façons, ce qu'on importe c'est plutôt le Gospel que le répertoire anglican!).
Mais j'aimerais mieux comprendre la spécificité française en matière de chant liturgique: pourquoi une histoire à ce point marquée par le goût de la rupture, comme si l'enrichissement du répertoire devait passer par l'abolition du répertoire existant? Pourquoi cette piètre qualité, cette gnan-gnantise, ce goût pour les images empruntées à l'esprit de l'époque (genre "énergies nouvelles"…?).

Philarète


[ PP à Ph.
- Et cette "malédiction musicale française" dure depuis longtemps. Les cantiques 1900 étaient d'une consternante mièvrerie : paroles douceâtres, musique de caf'conc'... Cf le langoureux "rendez mon coeur / rendez mon coeur / semblable au vôtre", sur l'air de goualante (comme on disait à l'époque). Ou l'ahurissant "Prends ma couronne / je te la donne / au Ciel n'est-ce pas / tu me la rendras", qui avait l'air d'un gag mais hélas n'en était pas un...
- Il y eut une phase de création musicale remarquable en France dans les années 1960. Je me souviens des mélodies modernes graves et amples que nous chantions quand j'étais en troisième ou en seconde... Mais tout ça fut inexplicablement balayé après 1970, au profit du grand n'importe quoi qui dura jusqu'à l'arrivée du répertoire Emmanuel.
- Je souligne néanmoins que le répertoire actuel, pour discutable que soient ses mélodies (trop de petits airs importés), a souvent des paroles profondément spirituelles et bibliques.
- Un aveu : pour mon goût, rien de plus beau que les cantiques bretons. ]
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Écrit par : Philarête / | 27/05/2016

L'ARTICLE COMPLET

> http://www.famillechretienne.fr/vie-chretienne/liturgie/cardinal-sarah-comment-remettre-dieu-au-caeur-de-la-liturgie-194987
C'est le renvoi sur l'article complet qui n'est peut-être pas accessible librement pour tous.
La qualité musicale ou la 'difficulté' musicale de certains "airs"-ne parlons pas de 'mélodie'-n'émane pas de sœur beauté...
Même musicien, il n'est peut-être pas inutile de 'méditer' sur la beauté en compagnie littéraire de François Cheng.
Quant au grégorien il y a le mot terrible du 'grand' Hector (...Berlioz): de la musique sublime chantée par des bœufs !
Pour ce qui est de la liturgie, il y a aussi un art du geste du célébrant et des assistants qui devrait venir de la simple présence devant qui nous sommes : IL est ! Il est là ! disait le saint curé d'Ars.
Ceci 'dit', avec Job, St Pierre, Isaïe et tous les autres : "Ne me scrute pas de trop près et éloigne TOI de moi car je suis un homme pécheur !" (comme tous les autres.)
Et bien sur merci au cardinal Sarah d'être ...
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Écrit par : Gérald / | 27/05/2016

@ Antoine :

> Ce serait dommage de s'y limiter. Je suis personellement un grand adepte des chants grégoriens, mais je comprends également que certains artistes veuille sortir de ce canevas. Il y a également de magnifiques chants plus récents qui s'intègre bien dans la liturgie. Le père Gouzes en est effectivement un bon exemple.
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Écrit par : Alexis / | 27/05/2016

RETOURNONS

> Le cardinal Lustiger avait demandé, m'a t on dit, de déplacer les Saintes réserves sur le côté des églises pour que le prêtre ne montre pas son dos au Seigneur pendant la messe.
Les prêtres lors de la consécration ne peuvent pas regarder la communauté et doivent soit pencher leur regard soit l'élever.
On ne peur pas mettre la croix dans l'alignement communauté/croix/autel/célébrant donc on la met de côté.
Franchement, en dehors de toute autres considérations la solution est bibliquement simple: retournons le prêtre lors de la liturgie eucharistique et n'en parlons plus.
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Écrit par : stevenson / | 27/05/2016

MUSIQUE

> 1) Je ne voudrais pas casser l'ambiance, mais beaucoup de chants de l'emmanuel (pas tous) participent du vacarme, du refus du silence et de la gaieté à tout prix (on a beau parler de joie, la musique a un sens). Le pire étant les cantiques des années 70, sans oublier le Chemin neuf. J'arrête là.
2) Le problème de l'orientation est que cela a modifié subjectivement le sens de l'eucharistie (non plus offrande, sacrifice et action de grâce, mais don, partage). On a là une des raisons du problème de la communion des divorcés remariés (même s'ils ne sont pas les seuls concernés). Bref, je doute du réalisme du "il suffit d'orienter". Pourtant fortement convaincue après la lecture de l'Esprit de la liturgie de Benoît XVI, il m'a fallu un temps d'acclimatation. Tout le monde ne lira pas l'Esprit de la liturgie.
3) Pour des raisons que je peux comprendre, le pape a insisté dans la joie de l'évangile sur la volonté dominatrice ou quelque chose comme ça de ceux qui ont un souci ostentatoire de la liturgie. Le pape s'adresse à tous, et au monde entier. Il est clair qu'en France, cela n'a pas eu d'effets très positifs pour ce que j'observe dans ma paroisse de province... L'effet Benoît XVI qu'on avait pu observer a été totalement balayé. J'ai peut-être pas de bol, et suis peut-être au mauvais endroit. Disons que le souci ostentatoire de la liturgie n'était pas ce qui nous guettait (ou alors au sens d'innovations délirantes ou de souci méticuleux de la laideur musicale qui force le respect).
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Écrit par : Maud / | 27/05/2016

DISCUSSION

> Liturgie : Thème que les catholiques ont trouvé pour continuer à se disputer entre eux une fois la rupture avec les protestants définitivement consommée (Edmond Prochain).
Je crois qu'on est en plein dedans.
Tous les chants des années 70 ne sont pas à jeter. Il suffit d'avoir entendu chanter "Le seigneur nous a aimé" par une chorale africaine avec des djembés, du piano et des guitares lors d'une messe des migrants pour s'en convaincre. Le chants de Gouze sont parfois tellement difficiles à mettre en place (au niveau des couplets) qu'il est hors de question de les faire chanter par l'assemblée, mais c'est aussi Gouze qui nous a laissé "Tu es devenu enfant de Dieu" qui fait un beau carton lors des baptêmes. Certains couplets de chants de l'Emmanuel se veulent tellement enseignants qu'ils frisent le ridicule quand le reste du même chant est très bien écrit. Il y a de très beaux chants du Chemin neuf, du Verbe de Vie, des Béatitudes ("Moi si j'avais commis"), il y a actuellement Jean Baptiste du Jonchay qui fait un travail remarquable. Il me fait beaucoup penser à J. Berthier, les paroles en mieux (Les énergies nouvelles, bof... mais bon, Berthier ne s'est occupé que de musique).
Il y a de multiples façons de se tourner vers le Christ et beaucoup de demeures dans la maison du Père.
Personnellement, le grégorien me cause une frustration à la limite de la souffrance. Que voulez-vous, quand on a grandi en écoutant du rock-pop anglais.....
Il faut évangéliser nos sens ; la vue, l'ouïe, l'odorat sont sollicités dans la liturgie mais pas d'un manière unique et c'est tant mieux. Pour moi, voir dans le grégorien le remède à tous nous maux revient à faire l'apologie de "la messe de toujours". Pitié....
Et pour finir, vous savez qu'au paradis, tous les après-midi, Dieu, les anges et les saints assistent à un concert de Bach (un protestant) puis Dieu se retire dans ses appartements et tout le monde profite de son absence pour aller écouter du Mozart (un Franc-maçon) dans le jardin d'à côté sans savoir que, caché derrière la haie, Dieu est là qui écoute aussi.

Jean-Marie


[ PP à Jean-Marie - Le grégorien a deux défauts : il ne supporte pas d'être mal chanté, et il correspond à un contexte culturel évanoui depuis longtemps. On peut ajouter à cela que le grégorien "planant" (créé au XIXe) n'a que de lointains rapports avec le grégorien d'origine, infiniment plus musclé. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Jean-Marie / | 28/05/2016

@ Philippe

> Le micro, c'est comme la langue : la meilleure et la pire des choses, selon l'usage que l'on en fait. Mon propos visait spécifiquement la liturgie eucharistique. Je ne suis pas certain que les églises anciennes que vous évoquez aient été conçues pour rendre ce qui se disait dans le chœur perceptible par l'assemblée, au contraire — même si le concile de Trente a supprimé les jubés.
Comme il n'est plus question aujourd'hui de revenir aux messes basses entre clercs ni aux secrètes, autant utiliser les moyens disponibles pour que toute l'assemblée participe au mystère.
Après, on peut toujours pinailler sur l'emplacement du micro : directement sur l'autel (sacrilège ?) ou juste à côté, au bout d'une perche (gare aux coups d'encensoir)... Je connais un prêtre adepte du micro-col, lequel a l'avantage de le rendre audible de partout, mais induit un curieux effet pervers : au moment de l'homélie, n'étant plus tributaire du micro de l'ambon, ce pasteur a tendance à se placer devant le chœur, au centre et au bas des marches, pour prêcher tout à son aise avec force gestes à l'appui... Ce faisant, il transforme symboliquement le chœur derrière lui en une scène dont il est le point focal, pour ne pas dire la vedette. Ce n'est évidemment pas intentionnel de sa part, mais l'effet est frappant. Pire même, quand c'est un micro HF que l'on brandit !
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Écrit par : Albert Christophe / | 28/05/2016

CHOEUR

> L'heure est à l'action. Veuillez trouver ci-dessous le lien vers la page de présentation du choeur paroissial que je dirige :
http://paroisserambouillet.fr/Choeur-Saint-Louis
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Écrit par : Thomas Mousset / | 28/05/2016

SOURCE DE LUMIÈRE

> Merci beaucoup pour cet article !
Fête du corps et du sang du Christ demain. L'Eucharistie est selon le pape François "source de lumière et de motivation pour nos préoccupations concernant l’environnement".
"L’Eucharistie unit le ciel et la terre, elle embrasse et pénètre toute la création. Le monde qui est issu des mains de Dieu, retourne à lui dans une joyeuse et pleine adoration : dans le Pain eucharistique, « la création est tendue vers la divinisation, vers les saintes noces, vers l’unification avec le Créateur lui-même ». C’est pourquoi, l’Eucharistie est aussi source de lumière et de motivation pour nos préoccupations concernant l’environnement, et elle nous invite à être gardiens de toute la création."
Art. 236
http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20150524_enciclica-laudato-si.html
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Écrit par : isabelle / | 28/05/2016

MUSICOLOGIE ET LITURGIE

> Un article intéressant d'un ami musicologue sur le problème de la musique liturgique :

"La musique savante des avant-gardes d’après 1950 était impraticable liturgiquement, Messiaen l’avait bien compris, car sa complexité était telle qu’il était impossible de faire chanter par le peuple des mélodies composées dans un système atonal et sériel.
Pour cette raison, l’Eglise s’est trouvée malgré elle impliquée, aux côtés de la musique de consommation de masse, dans le vaste mouvement de résistance aux avant-gardes et à leur esthétique.
Ce décalage forcé par rapport à la grammaire savante, impraticable, des compositeurs d’avant-garde est alors entré en relation, a fait système, avec au moins trois phénomènes nouveaux :
- premièrement le souci du renouveau liturgique de Vatican II de rendre les assemblées plus participatives, avec tout ce que cela pouvait comporter comme conséquences sur le plan de la qualité artistique, musicale et littéraire, des chants proposés,
- deuxièmement le souci d’aller à la rencontre du monde : c’est l’aggiornamento post-conciliaire,
- troisièmement un certain corpus de valeurs et d’aspirations nouvelles caractéristiques de l’air du temps telles que l’horizontalisme, le spontanéisme communautaire, le populisme, le relativisme, ici esthétique.
Pour la première fois de son histoire, l’Eglise quitte l’univers de la culture savante pour lui résister."
https://ephesblog.wordpress.com/2013/05/10/entrer-dans-le-iiie-millenaire-la-musique-deglise-aujourdhui-en-france/
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Écrit par : isabelle / | 28/05/2016

LE SUJET

> C'est un sujet qui fait réagir, bien au-delà des propos et des recommandations du cardinal Sarah !
Merci Patrice, même si je crains que vous ne puissiez vous arrêter en si bon chemin !
En vrac, sans lien entre elles, quelques illustrations de complément:
- D'abord quelques réflexions, du RP J-P Longeat trouvées sur le site Narthex (qu'on ne présente plus):
http://www.narthex.fr/oeuvres-et-lieux/musique/regard-sur-le-patrimoine-du-chant-sacre-et-la-liturgie-contemporaine
- Ensuite, à l'attention de Patrice: pour qualifier la mièvrerie XIXème finissant, je ne résiste pas à vous livrer les termes, savoureux et lapidaires, d'un contemporain, Léon Bloy (in 'Le désespéré', chap. XV): "...tout le déballage coquebin d'un chérubinisme attardé et grandiloque".
- Continuons notre coq-à-l'âne, en sens peut-être opposé à ce qui fut dit ici:
comme il m'arrive de le dire à des enfants du catéchisme, en présence des adultes encadrants, "chanter c'est prier deux fois", et je rajoute, à l'attention de ces encadrants, que le plain-chant, le chant latin ou le chant grégorien sont nettement moins accessibles à des enfants débutants qu'un certain répertoire de mièvrerie, ou encore, du moins je le crois, certains Gospels basiques ou leurs dérivés traduits, ou encore les chants les plus abordables, pour des néophytes, de la liturgie post-Vatican II (souvenons-nous que des plumes de l'envergure de celles de Patrice de La Tour du Pin ou de Pierre Emmanuel s'y collèrent).
- Enfin, peut-être histoire d'abonder dans le sens de ne point trop blâmer l'intention mièvre plus ou moins consciente qui enlaidit liturgie et art sacré, je vous cite in extenso ce passage tiré du "Pèlerin de Lourdes" de Francis Jammes, curieux encart dans le roman, qui s'intitule "Amende honorable au mauvais goût de Lourdes" (suite à un pèlerinage à Lourdes effectué par Paul Claudel et Francis Jammes), non dénué d'humour et qui pose -aussi- une partie non négligeable du problème qui nous intéresse:

"Je vous revois, mon cher Claudel, en ces chaudes journées du pèlerinage national de 1905, où, pour la première fois, vous preniez contact avec Lourdes; Personne, j'en suis sûr, ne suivit, avec plus d'humble ferveur que vous, les cérémonies qui se déroulèrent sous nos yeux fraternels.
Néanmoins au cours de ces longues heures que nous passions ensemble matin et soir, dans un espace limité par la grotte, les fontaines, les piscines, les bureaux, le rosaire, la crypte et la basilique, je ressentais que s'accumulait en vous un orageux mécontentement. J'avais espéré que vous échapperiez à la réaction qui mit à nu les nerfs de Huysmans et d'Henri Duparc, l'homme pourtant le plus saintement épris de Lourdes que j'aie connu; que vous vous soustrairiez à ce sentiment de révolte que provoquent souvent, chez les mieux intentionnés, des œuvres, il est vrai lamentables, qui encombrent les places, le sanctuaire, le calvaire. Il s'en faudrait de très peu qu'une telle face monstrueuse ne trouvât crédit dans les temples des solitudes de l'Asie.
Nos promenades se renouvelaient autour des mosaïques des Mystères, et nous songions davantage, me semblait-il, à égrener proprement notre chapelet qu'à fulminer contre l'art de Lourdes. J'avais entendu tant de sarcasmes à ce sujet, qu'à vrai dire je ne voulais plus me prêter à ces lieux communs. En avais-je assez ouï de:
- C'est affreux ! comme c'est dommage ! ça tuera la religion ! ça a empêché un protestant de se convertir ! ce n'est pas étonnant que les catholiques passent pour des idiots ! le diable est l'auteur de toutes ces choses, etc..., etc..., etc...
Soudain, mon cher ami (je revois fort bien l'image qui vous fit éclater) votre teint rosé d'homme bien portant refléta toutes les flammes du purgatoire.
- Ah ! ah ! ah ! vous écriiez-vous, c'en est trop, je meurs. Partons. C'est épouvantable.
Et vous commençâtes de dévider une litanie de brèves phrases entrecoupées, si furieuses qu'elles me faisaient songer au trop fameux monologue de l'Avare de Molière.
...Je vois ! je vois ! poursuiviez-vous, je vois !...
- Que voyez-vous donc ?
- Je vois l'abominable cabotin qui a exécuté, en ricanant, cette vilenie.
- Calmez-vous, cher ami. Ne protestez pas avec tant de véhémence ! Que vous importe, ou non, la valeur, en soi, de cette œuvre ? Et qu'elle plaise ou pas à votre goût d'artiste, si une bonne femme, venue de Flandre, de Bretagne, des Landes, de Pontoise ou de Lannemezan, est édifiée par ce que vous trouvez horrible et, par cela même, élevée à une oraison qui, aux yeux de Dieu, vaut mille fois la nôtre ?
- Taisez-vous, je vous en supplie, avez-vous répliqué, je vous entends, je vous comprends, je vous approuve mais, ah ! ah ! c'est affreux, en raisonnant ainsi vous allez me faire perdre le peu de goût qu'il me reste !"
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Écrit par : Aventin / | 30/05/2016

UNE EUCHARISTIE AUTHENTIQUE

> Salut en Christ,
Dans les pas de Benoît XVI, en fait dans les pas du Christ Jésus, Robert Sarah nous rappelle cette dimension essentielle transcendante de l'eucharistie et donc aussi de la liturgie.
Il ne s'agit pas d'opérer une volte-face traditionaliste, voire intégriste.
Il s'agit simplement et absolument de se rendre à l'évidence que l'absence de cette dimension dénature l'eucharistie. Une authentique communion des saints, exige une eucharistie authentique !
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Écrit par : Pierronne la Bretonne / | 30/05/2016

BONNES PRATIQUES

> Nous venons de vivre à Grenoble le rassemblement "Ecclesia Cantic", rassemblement de chant liturgique, par les jeunes et pour les jeunes.
Plus de 450 jeunes catholiques réunit par goût du chant, pour l'amour de la beauté du chant liturgique. Notre évêque, lors de la messe de clôture, les a exhortés à réveiller les communautés paroissiales, et à s'y investir pour faire redécouvrir les trésors de l'Eglise.
La liturgie de la messe était d'une remarquable beauté : un vrai esprit de silence et de prière, de beaux gestes, un équilibre dans le choix des chants : un cantique populaire de bonne tenue en chant d'entrée, de même pour le Gloria, l'alléluia et l'offertoire composés par Mgr Frisina - de la belle polyphonie contemporaine, la séquence (version courte) et un chant après la communion en grégorien, un chant de l'Emmanuel, un de JB du Jonchay...
Ce rassemblement me semble un beau signe, bien dans l'esprit de ce que dit le cardinal Sarah.
Je crois que la clé n'est pas tant dans le choix exclusif de tel ou tel répertoire (je rappelle tout de même que le concile Vatican II lui-même définit le chant grégorien comme le chant propre de l'Eglise). Ce qui frappe dans toutes les vicissitudes du chant liturgique, c'est que chacun met en avant son goût personnel ou celui de l'époque, sans aucune considération pour le sens et l'esprit de la liturgie.
Ce qui est donc urgent - et qu'avait demandé le concile Vatican II ! - c'est la formation liturgique de tout le peuple de Dieu, et particulièrement de tous ceux qui sont amenés à intervenir activement dans la liturgie.
En ce sens, cela n'ira pas mieux parce que les jeunes auront remplacé les vieux. J'ai souvent remarqué qu'il était plus facile de travailler avec la génération précédente qu'avec les jeunes qui croient tout savoir mieux que leurs aînés (et je n'ai que 32 ans !).

Pour un bon aperçu du week-end, une vidéo : https://youtu.be/DvCI4IUuV9E

Pema


[ PP à Pema :
- Alleluia pour ce que vous nous apprenez de Grenoble.
- Et entièrement d'accord sur votre diagnostic : "chacun met en avant son goût personnel, sans considération pour le sens ou l'esprit de la liturgie". Voilà le problème. Voilà la raison pour laquelle il est souvent difficile de prier durant les messes paroissiales, parce qu'il y a discordance entre l'animation chantée et l'action liturgique à l'autel.
- Le mal est donc la dispersion de la sensibilité, qui entrave la "participation" du fidèle. Où est l'issue ? Peut-être (entre autres) dans des stages monastiques... La liturgie des moines reste un modèle de cohérence, sensible en particulier dans les communautés où l'office est célébré en français.
Mais il existe des paroisses où sur ce plan les choses se déroulent bien. Ne pourrait-on connaître et imiter leurs "bonnes pratiques" ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pema / | 30/05/2016

CHORALES

> “En tant qu'élément liturgique, le chant doit s’intégrer dans la forme propre de la célébration. Que par conséquent, tout - dans le texte, dans la mélodie, dans l'exécution - doit correspondre au sens du mystère célébré, aux différents moments du rite et aux temps liturgiques et que le chant grégorien, en tant que chant propre de la liturgie romaine, soit valorisé.” (Exhortation “Sacramentum Caritatis” § 42)
Nous, chorales paroissiales, nous efforçons, à notre humble niveau, de faire de telle sorte que la liturgie soit digne, par les chants que nous pratiquons, surtout le grégorien que nous travaillons, semaines après semaines, sans l'écorner, sans chanter comme des bœufs.

@ Alexis : J'ai longtemps pratiqué, comme "animateur" liturgique (quel mot horrible avec du recul !) les chants du Renouveau (toutes tendances confondues : Emmanuel, Chemin Neuf, Verbe de Vie, ...) et ceux du Père Gouze. Je peux même dire que toutes ces "variantes" liturgiques, c'est moi qui les ai "importées" dans ma paroisse depuis longtemps. J'ai même participé à pas mal de sessions de chant du père Gouze pour qui j'ai beaucoup de respect et d'admiration.
Le père Gouze lui même disait des fois, avec ses acolytes, qu'il aimait beaucoup le chant grégorien, mais ... ça ne se pratiquait plus. Et voila le hic qui m'avait fait bondir : incompréhensible pour quelqu'un de la carrure du père Gouze ! Et puis c'est pas toujours évident de chanter des chants pseudo-orient ! Il fallait une chorale musclée, dont le chef de chœur soit un musicien non moins musclé !
Quant aux chants du Renouveau, dont les paroles sont souvent tirées des Écritures, j'en conviens, sont souvent du tape à l’œil (oh pardon à l'oreille !), cassent l'"ambiance" et ne permettent guère le recueillement.
De toute façon quelque soit le chant, si le célébrant ne met pas sa part (ie chanter la part qui lui revient : les dialogues avec l'assemblée, etc..., même avec le grégorien une messe sera toujours très ordinaire. Eh oui on est dans la forme ordinaire (LOL) même très ordinaire. Très loin du "Chanter c'est prier deux fois". Et bien chanter c'est prier trois fois ?
Et franchement je préfère que l'Assemblée chante le CREDO III (un peu du grégorien bâtard du XIVe-XVes suivant l'expression de PP) que chanter des "âneries" (pardonnez l'expression !) genre "Je crois en Dieu qui chante" ou "Je crois en Dieu qui croit à l'homme". Je n'ai rien inventé, je l'ai entendu lors d'une messe de première communion dans un grand diocèse du Centre-Ouest, il y a tout juste deux semaines !
Bien à vous !

Antoine


[ PP à Antoine
- Les chants décérébrés et désurnaturalisés des années 1970 n'ont pas entièrement disparu, c'est vrai. Mais là où ils subsistent encore (cas que vous évoquez), on les remarque : parce qu'ils sont devenus rares, Dieu soit loué. En dépit de la laideur musicale d'une partie du répertoire actuel, les paroles atteignent souvent une profondeur (et une intensité de prière) que n'avaient pas les platitudes des années 1970... et que n'avait pas non plus le répertoire (musicalement respectable) des années 1960.
- La question est : comment sortir de la laideur musicale actuelle ? (qui semble d'ailleurs une spécialité franco-française, pour des raisons qu'il faudrait découvrir ; et qui va de pair avec l'apparition absurde de l'anglais dans des chants paroissiaux de l'Hexagone). ]

réponse au commentaire

Écrit par : Antoine / | 30/05/2016

RÉALITÉ DU SACRIFICE DE LA MESSE

> Pardonnez-moi si je vais apporter mon témoignage avec une violence qui blesse, c’est violence d’amour. Qu’on discute aussi longtemps de la forme, quels que soient le brillant des arguments et l’autorité des références doctrinales, latin ou langue vernaculaire, génuflexion ou main dans la main, orgue ou guitare, grégorien ou carnet vert, on ne fera que davantage encore occulter le fond, en en bannissant le cœur. C’est à mon sens comme de discuter des positions du kamasutra : masturbation liturgique.
Car oui il s’agit d’amour on ne peut plus incarné, d’amour d’oblation totale, de corps et de sang à boire et à manger, d’oblation plénière et définitive, et pourtant sans cesse renouvelée depuis la première Cène. Dieu se fait homme pour se faire nourriture pour la multitude par le supplice de la croix, parce qu’en folie d’amour Il a voulu prendre sur lui tout le poids de notre désespérance qui s’est donné visage de haine destructrice.
Les adeptes du sado-maso, vous pouvez vous rhabiller gentiment et venir à la messe : vous y vivrez infiniment plus fort.
Oui il y a écho profond entre le mariage et le sacrifice de la messe, entre relation sexuelle et communion eucharistique. N’avez vous pas remarqué ? Souvent ce sont les mêmes qui se retrouvent dans ce besoin compulsif, obsessionnel et tatillon, à vouloir tout réglementer de la liturgie et du sexe, à vouloir y imposer leur conception du beau comme normes, à vouloir faire de leurs dégoûts des interdits.
Comme on regarde le corps de l’Aimé avec ce sentiment d’adoration profonde devant le mystère du temple vivant de l’Esprit, ce temple dont le rideau se déchire pour nous ouvrir à un intime divin jadis réservé aux grands prêtres, nous devrions tressaillir depuis le fond secret de nos entrailles dans une allégresse de vie, « d’où m’est-il donné que celui que j’aime vienne jusqu’à moi ? » à l’approche du don eucharistique.
Peu importe alors la forme, de quel côté se pratique l’union des corps ou l’élévation de l'ostie consacrée, dans le silence d’éblouissement ou dans les cris d’allégresse, dans la fatigue du quotidien ou la splendeur du premier baiser, dans la virilité de l’époux ou la douceur de l’épouse, dans la magnificence de la jeunesse ou dans l’humilité des corps usés, dans la maladresse ou le mauvais goût de certains, dans l'exploit esthétique ou la culture savante d'autres, c’est toujours même mystère qui nous saisit et nous dépasse de partout à partout.
Ce qui manque à nos messes, c’est la foi, ce sens de la présence de Dieu.
Ce qui manque à nos amours, c’est la foi, ce sens de la présence de Dieu.
Pardon, encore mille fois pardon, il faut que j’aille jusqu’au bout. Non je ne trouve pas la foi autour de moi, à commencer par chez les prêtres. Quand je leur crie ma faim de Dieu, moi qui ne peux communier au corps du Christ parce que je communie charnellement à un homme divorcé, quand je leur demande non de recevoir l’Eucharistie, ce que j’accepte entièrement, mais de pouvoir manifester avec mon corps ce « tu sais tout, tu sais bien que je t’aime ! », en serrant contre mon cœur, en pressant contre mes lèvres le pain consacré, en plongeant ma tête dans le tabernacle ouvert comme faisait Saint Thomas d’Aquin, pas en spectacle, mais à la dérobée des messes, on me répond que c’est beau, que c’est touchant… et puis c’est tout. Pardonnez-moi mais je m’en fous, que ce soit touchant, que ce soit poétique ou je ne sais encore quelles autres fadaises : comprenez-vous ce que c’est qu’une faim réelle de Dieu ? Que d’avoir des bras et de ne pouvoir saisir, d’avoir des mains et de ne pouvoir toucher, d’avoir une bouche et de ne pouvoir embrasser, quand le corps tout entier est en feu ? Quand le prêtre dit « ceci est mon corps livré pour vous », ce n’est pas un effet de style, c’est REELLEMENT que cela se passe, VRAI corps de chair et de sang, donné concrètement pour la faim Réelle du monde des hommes, là, toi, moi, et tous les visages qu’on croise chaque jour ou qu’on voit sur les écrans, tous ces gens qui crèvent réellement du manque de Dieu. On n’est pas dans un monde parallèle quand on est à la messe, on est au cœur du monde réel. Il n’y a rien de plus vrai, de plus réel, de plus actuel, de plus incarné, que ce qui se vit au sacrifice de la messe. Nos vies ne retrouvent réalité que reliées charnellement à ce sacrifice. C’est pourquoi notre monde est si peu réel, tellement peu qu’il est en train de dématérialiser le monde et déréaliser la nature. Mais bon sang qui croit vraiment à cette réalité du sacrifice de la messe ?
Merci aussi infiniment au cardinal Sarah de témoigner de cette foi-là.
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Écrit par : Anne Josnin / | 31/05/2016

@ Anne Josnin :

> Et merci à vous pour ce témoignage poignant. On ne peut pas mieux exprimer ainsi sa foi, la foi de l'Eglise au fait ! Je ressens cela souvent, au moment d'aller communier, et souvent je me contente de la communion spirituelle, car je ne maîtrise pas cette foi là, cette foi de l'Eglise.


@ PP :

> la laideur musicale, on en sortira un jour, seulement il faut attendre que les auteurs de laideur disparaissent. J'ai l'occasion de fréquenter le beau monde de la Liturgie (en étant étudiant tardif à la Catho de Paris !) et d'entendre ce genre de réflexion que j'ai nullement inventée. Hélas dans l'Eglise de France c'est encore une question de GROS SOUS ! Excusez du peu-charitable !
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Écrit par : Antoine R. / | 31/05/2016

Chère Anne,

> Merci de votre témoignage, et je ne vous ferai pas l'insulte de dire qu'il est touchant.
Vous le dites très bien, et Benoît XVI déjà avant vous : le fond du problème, c'est une crise de FOI.
Précisément, quand on chante à la messe pour se faire plaisir, on se met au centre, au lieu de nous tourner, de tout notre être, avec tout notre corps, vers Dieu, ce Dieu qui nous aime d'un amour si fou qu'il a trouvé le moyen de rester avec nous, corporellement, jusqu'à la fin des temps, en son Eucharistie.
Léon Bloy parlaient de ceux qui s'adorent eux-même devant le Saint-Sacrement...
Alors le choix des chants n'est pas une simple question cosmétique, pardonnez-moi chère Anne. Il révèle précisément, comme la posture de l'étreinte charnelle révèle quelque chose de la relation des époux, quelle est notre relation à Dieu : moi au centre, ou Dieu au centre ? Ce choix des chants relève d'un service, d'un ministère en quelque sorte, pour la rencontre, l'étreinte, entre Dieu et son peuple. Nos liturgies conduisent-elles les chrétiens, surtout ceux qui ne sont pas brûlants comme vous, à rencontrer Dieu en son mystère, ou à se "masturber" émotionnellement devant Dieu ?
Voilà toute la question, qui n'est pas secondaire, mais qui doit être bien située...
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Écrit par : Pema / | 31/05/2016

ENTIÉREMENT

> Magnifique, chère Anne. Vous y êtes à fond et je vous (te?) rejoins entièrement. Presque divorcé, je comprends pleinement votre souffrance et je hurle à la dureté de coeur des "bien pensants". Mon Dieu, donne leur un coeur de chair, bon sang !
Oui, la messe est la préparation à l'accueil du Christ physiquement et oui, il y a là un lien profond avec le mariage. Chrétiens, nous aimons un Dieu incarné qui se donne à chaque eucharistie. Loué soit-Il éternellement de nous avoir fait ce don.
Je n'ai plus de réflexions intellectuelles sur la messe, j'ai juste l'accueil, la gratitude et la contemplation de cette présence unique, d'un Dieu créateur de toute chose qui vient me rencontrer et être en moi à chaque fois que je communie, moi le pécheur si petit et minable, si incapable et si faible.
Arrêtons les bla-bla et les mièvreries débiles, parlons et témoignons seulement de Sa présence à chaque eucharistie. Arrêtons de rêver à des frous-frous grandiloquents ou à des réunions festives et soyons juste amoureux humblement de Sa présence.
Et bon sang, montrons donc au monde combien sa venue nous change à chaque fois !
Une chose à faire de façon urgente, c'est de relancer l'adoration eucharistique dans chaque paroisse.
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Écrit par : VF / | 31/05/2016

@ Anne

> Entièrement d'accord avec toi sur ce parallèle (et même, cette..; identité) entre le don eucharistique et le don des corps dans l'acte sexuel.
Peut-être faudrait-il compléter cette collection (http://www.lamusardine.com/recherche-avancee.php?PDT_COE_ID=166) par :
"Oser l'eucharistie quotidienne" ?
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Écrit par : Feld / | 31/05/2016

RÉPERTOIRE ANGLOPHONE

> Le répertoire anglophone a quelques horreurs qui valent bien les nôtres, je vous rassure (j'ai eu l'occasion de les chanter, faisant partie d'une équipe d'animation dans la riante Albion).
Pour ceux qui lisent la langue de Dorothy Day, cherchez donc "Gather Us In" et "Sing a New Church", c'est... gratiné.
Fort heureusement, le répertoire anglican classique est pillé avec gourmandise par les cathos anglophones ; c'est un vrai délice à chanter.
J'ignore ce qu'il en est dans les autres aires linguistiques, mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'un problème franco-français.
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Écrit par : Dr. Zurui / | 31/05/2016

CHOEUR

> Pour Pema (c'est votre prénom ?) : pour un contre-exemple de la tendance à la primauté des goûts personnels - qui est une forme d'égocentrisme - et de la mode, déviance problématique relevée également par M. de Plunkett, je vous invite à consulter la page de présentation du choeur que je dirige (voir plus haut).
Juste pour info : le chant grégorien après la communion est prévu pour chaque messe de l'année dans le 'Graduale romanum'. Il s'agit de l'antienne de communion, dont le texte entre naturellement en résonance avec l'ensemble de la liturgie de la Parole et l'action liturgique qu'il illustre. C'est souvent la mise en exergue d'un passage de l'Evangile du jour. Comme tout le reste du répertoire grégorien, le texte émane de la Bible (AT ou NT). Les traductions sont données dans les missels (ex : Jounel) et les périodiques (ex : Parole et Prière).
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Par ailleurs la note et la plupart des commentaires portent sur le chant. C'est très bien. Cependant, cette question n'est que secondaire dans l'interview. Il faut tout de même rappeler que sans l'action du prêtre et l'intention de manifester ce sens du sacré et de la transcendance, bref de célébrer ni plus ni moins comme l'Eglise le demande, rien n'est possible. C'est ce que rappelle le cardinal Sarah, lequel ne dit pas autre chose que ce que disent tous les textes magistériels des cinquante dernières années.

TM


[ PP à TM
- Pema est en effet le prénom de notre amie. Elle n'est pas du Tibet mais ce prénom l'est, m'a-t-elle appris quand je suis venu à Grenoble en 2015.
- On ne saurait assez recommander 'Parole et prière' (!). ]

réponse au commentaire

Écrit par : Thomas Mousset / | 01/06/2016

à Anne

> Votre cri du cœur, Anne, est certainement "violent" dans le sens où il affirme des vérités non relativisables, ce que nos contemporains sont sournoisement conditionnés à rejeter avec horreur comme insupportable "violence".
C'est assurément ce genre de "violence" qu'il serait salutaire d'asséner à tout un tas de gens :
au curé de mon ancienne paroisse adepte des "saynètes" que j'évoquais dans mon premier commentaire ;
à cet érudit exégète, accessoirement (!) ordonné prêtre, qui se vantait (se vantait !) devant moi de n'avoir pas présidé d'eucharistie depuis des années ;
à tous ces liturgistes distingués qui veulent nous débarrasser du sacré sous prétexte qu'il ferait obstacle à notre relation à Dieu ;
à ceux qui pensent que "le sacré, c'est l'Homme" (d'où les liturgies anthropocentriques que dénonce le cardinal Sarah)...
et à moi-même quand j'ose communier sans vraiment chercher à discerner et mesurer l'inestimable valeur du Don qui nous est fait.
Comme le fait remarquer Pema, ces questions liturgiques ne sont pas simplement des arguties de goûts et de dégoûts esthétiques ou musicologiques (encore qu'on puisse prendre un plaisir puéril à s'épancher, je le reconnais) : c'est tout l'édifice du sens réel de l'eucharistie, cœur de notre vie, qui est miné voire ruiné par ces négligences coupables.
Les platitudes, les mièvreries, les désinvoltures sont des péchés, mortels quand ils sont délibérés. Pour ces péchés, bien des prêtres et des laïcs risquent l'enfer auxquels ils ne croient généralement pas.
Alors sur tous ceux-là, exerçons notre violence :
« Très compatissant Jésus qui n’es que pitié, je fais entrer dans la demeure de Ton Cœur très compatissant les âmes froides, que dans ce feu de Ton pur amour, se réchauffent ces âmes glacées, qui ressemblent à des cadavres et T'emplissent d'un tel dégoût. Ô très compatissant Jésus, use de la toute-puissance de Ta miséricorde et attire-les dans le brasier même de Ton amour, et donne-leur l’amour divin, car Tu peux tout. »
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Écrit par : Albert Christophe / | 01/06/2016

"MES JEUNES ÉLÈVES"

> "...Ce qui frappe dans toutes les vicissitudes du chant liturgique, c'est que chacun met en avant son goût personnel ou celui de l'époque, sans aucune considération pour le sens et l'esprit de la liturgie.
Ce qui est donc urgent - et qu'avait demandé le concile Vatican II ! - c'est la formation liturgique de tout le peuple de Dieu, et particulièrement de tous ceux qui sont amenés à intervenir activement dans la liturgie... "
Chère Pema, c'est très vrai mais cela reflète notre société consumériste et narcissique.
Il va falloir lutter contre cela afin de remettre le sens de l'eucharistie dans le coeur des gens.
Il va falloir les convertir, c'est-à-dire les "retourner" vers le Christ et non plus vers leur ventre.
Je vois mes jeunes élèves de plus en plus narcissiques ( foutus selfies....)et obsédés par l'avoir. Je ne sais pas comment les faire entrer dans une belle liturgie sans les amener sur le chemin du Christ d'abord. J'en viens à penser qu'il s'agit d'une rééducation pour handicapés de l'âme, voire d'une réanimation pour les sortir d'un coma spirituel.... On a dépassé l'ignorance depuis un bon moment. Mais ils peuvent être très curieux et avides de réponses à des questions existentielles et spirituelles étonnantes.
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Écrit par : VF / | 01/06/2016

RELIGION INCARNÉE

> Comme tous les sacrements, l'Eucharistie est un cadeau que Dieu nous fait, un moyen de nous élever vers Lui. Et dès lors, il me semble, sans tomber dans le paradoxe facile, que si la liturgie doit être théocentrée, c'est au final plus pour nous que pour Dieu.
C'est en cherchant à tirer la plénitude des dons qu'Il nous fait gratuitement que nous l'honorons.
Et vouloir bien faire, humblement, cette sainteté des détails du quotidien, est tout autant un moyen de Lui témoigner notre foi que d'embrasser l'hostie.
C'est par son incroyable persévérance dans la foi malgré l'absence de tout affect que Mère Teresa à témoigné incomparablement de son amour pour Dieu.
Par ailleurs, chère Anne, nous sommes une religion incarnée: la chair et ce que nous en faisons sont indissociables de l'esprit.
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Écrit par : Luc / | 01/06/2016

à Luc

> pardon, je rectifie.
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Écrit par : à Luc / | 02/06/2016

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