L'archevêque de Paris, Mgr Aupetit, remet sa charge au pape après des révélations

L'archevêque de Paris, Mgr Aupetit, remet sa charge au pape après des révélations
Zakaria ABDELKAFI / AFP

C’est une véritable bombe pour le diocèse de Paris et pour l’Eglise de France. L’archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit, vient de « remettre » sa charge « entre les mains » du pape dans une lettre envoyée jeudi 25 novembre, a révélé Le Figaro ce vendredi 26 novembre. L’information devait rester confidentielle jusqu’à la réponse du souverain pontife, mais elle a fuité, explique le journal La Croix à qui Mgr Aupetit s’est confié. « Le mot démission n’est pas celui que j’ai employé, a-t-il précisé. Démission voudrait dire que j’abandonne ma charge. En réalité, je la remets dans les mains du Saint-Père parce que c’est lui qui me l’a donnée », a-t-il confié au quotidien catholique.

De graves mises en causes

Cette lettre succède aux révélations faites par Le Point dans une enquête publiée mardi 23 novembre. L’archevêque de Paris dont on rappellera la vocation tardive puisqu'il avait dans l'idée de fonder une famille lorsqu’il dit avoir ressenti « l’appel de Dieu », entrant ainsi à 39 ans au séminaire, est accusé d’une gestion brutale de son diocèse, qui expliquerait une série de démissions récentes dans plusieurs instances ainsi que celles de ses deux vicaires généraux ces derniers mois (Alexis Leproux en décembre 2020 et Benoist de Sinety en mars 2021).

Selon l'hebdomadaire, Mgr Aupetit leur aurait fait vivre « plusieurs humiliations publiques », et se serait aussi montré peu à l’écoute de ses prêtres et fidèles. Il est aussi accusé d'avoir été particulièrement « brutal » dans la prise de plusieurs décisions importantes concernant le diocèse. Notamment la fermeture soudaine du centre pastoral Saint-Merry, refuge des catholiques dits « progressistes » engagés en faveur des LGBT et des divorcés remariés, la restructuration du collège des Bernardins, mais aussi le licenciement de deux responsables du lycée privé Saint-Jean de Passy, se mettant à dos une partie de la « droite catholique » parisienne.

« Je suis profondément désolé du trouble grave des fidèles qui ont subi tant d’épreuves depuis l’incendie de Notre-Dame, la Covid, le rapport de la CIASE, et qui se trouvent aujourd’hui encore confrontés à cet article du journal Le Point si virulent à mon égard, a confié Mgr Michel Aupetit dans un entretien à Radio Notre-Dame diffusé ce vendrediJ’avoue que moi-même j’ai subi un choc en le lisant et je me suis demandé s’il y avait réellement autant de personnes qui souhaitaient mon départ (...). Ceux qui travaillent à mes côtés m’ont dit être choqué par les accusations de négligence évoqués par l’article. Bien sûr, il est normal que les décisions à prendre génèrent des frustrations et des amertumes, mais je ne les prends jamais seul. Je suis entouré de nombreux conseils où sont présents des clercs, des laïcs, des diacres et où j’ai souhaité que de plus en plus de femmes participent pleinement ». L'archevêque ajoute que « lorsqu’une décision est prise en commun, il convient que je l’assume et que j’en revête la responsabilité. Ce qui concentre sur moi les possibles rancœurs. »

Relation intime avec une femme démentie

Plus compromettant encore, l’enquête du Point fait état d’une liaison que l’archevêque de Paris aurait entretenue avec une femme « adulte consentante », comme en témoignerait un mail de 2012 qu’il aurait envoyé à cette époque par erreur à sa secrétaire alors qu’il était vicaire général du diocèse. Mgr Aupetit a démenti avec force auprès du Point toute relation sexuelle avec cette personne, expliquant que cette femme s’était « manifestée à de nombreuses reprises auprès de moi par des visites, des courriers, etc., à tel point que j’ai parfois dû prendre des dispositions pour mettre de la distance entre nous ».

Il admet cependant que son « comportement vis-à-vis d’elle a pu être ambigu, laissant ainsi sous-entendre l’existence entre nous d’une relation intime et de rapports sexuels, ce que je réfute avec force. (…) J’ai décidé de ne plus la revoir et je l’en ai informée ». Mgr Aupetit affirme avoir évoqué cette « situation ancienne » avec ses vicaires généraux au printemps 2020 et « averti les autorités de l’Eglise », alors que plusieurs membres de son entourage le confrontaient sur cette question ayant pris connaissance du mail, révélait encore Le Point.

Pas de confirmation à Rome

« Je n’entretenais pas une double vie comme le suggère l’article, a martelé Mgr Aupetit dans l'entretien à Radio Notre Dame. Je reconnais, comme je l’ai déjà dit, avoir mal géré la situation avec une personne qui se manifestait à de nombreuses reprises auprès de moi. » Par ailleurs, l'archevêque confirme avoir confié cette « erreur » à son « accompagnateur spirituel et l’autorité ecclésiastique a été mise au courant. »

S’il a désormais décidé de remettre sa charge entre les mains du pape, c’est pour « préserver le diocèse » car il doit être « au service de l’unité » en tant qu’évêque, a expliqué Mgr Aupetit à La Croix. Il indique aussi avoir consulté le cardinal Marc Ouellet, préfet de la congrégation pour les évêques à Rome, et le nonce à Paris. Selon nos informations, Rome n'a pas officiellement confirmé la réception de la lettre de Mgr Aupetit au pape. Il est impossible pour l'heure de savoir quand le pape François répondra et surtout quelle sera sa réponse.

Camille Lecuit