(Liturgie de la Parole : 1 R 19 9.11-13 ; Ps 84 ; Rm 9 1-5 ; Mt 14 22-33)

Loué soit Jésus-Christ !

Nous avons entendu le récit d’Elie qui, fuyant la persécution, cherche secours auprès du Dieu, et il le fait dans la solitude et le silence d’un pèlerinage aux sources de sa foi. Elie, n’est-il pas une figure à imiter en ces temps où le péché règne par des lois toujours plus liberticides et impies, qui pervertissent l’homme et rejettent la Foi ?

Elie s’était retrouvé seul à professer la vraie foi face à une société devenue idolâtre, et sa vie était en jeu. Alors que certainement, comme beaucoup de personnes de plus en plus angoissées par l’iniquité triomphante et toujours plus institutionnalisée, nous cherchons que faire pour changer ce cours des choses, pourquoi ne pas imiter Elie allant au désert chercher auprès de Dieu le secours dont nous avons besoin ? Mais c’est peut-être bien pour cela que nous sommes venus en ce carmel… Chercher Dieu comme Elie, car, comme le dira le prophète Isaïe : « Votre salut est dans la conversion et le calme, et votre force est dans une grande confiance. (Is 30.15) ». Voilà donc ce que nous cherchons ! Notre salut ne se trouve pas « dans l’ouragan » d’une guerre, « le tremblement de terre » d’une révolution, ou « le feu » des passions, mais « dans le murmure d’une brise légère », autrement dit « dans la conversion et le calme » que donne « une grande confiance » en Dieu, le vrai Dieu, Celui qui S’est lié à nous par une alliance, d’abord avec un homme, Abraham, puis, par l’intermédiaire de Moïse, avec un peuple, le peuple hébreu, et enfin, avec l’humanité entière, par Jésus. Ce n’est pas sans raison que Moïse et d’Elie étaient présents dimanche dernier lors de la transfiguration de Jésus : notre Dieu a de la suite dans les idées ! Aussi, comme Elie, n’hésitons à Lui rappeler Son Alliance par laquelle Il S’est engagé à nous donner ce que nous Lui avons demandé au début de cette messe : l’héritage de Son Fils ! Si nous entrons en possession de cet héritage, qu’est-ce qui nous sera impossible ? Ne sommes-nous pas déjà « les grands vainqueurs grâce à Celui qui nous a tant aimés (Rm 8.37) » ?! Ce qui pour nous est donc premier, à l’exemple de Moïse, d’Elie et de Jésus, c’est de prendre de la hauteur, de monter sur la montagne, qu’elle s’appelle Horeb, Carmel ou Thabor, peu importe, ce qui importe, c’est de nous rapprocher de Dieu, de nous unir à Lui en vertu de l’alliance scellée une fois pour toutes, dans la mort et la résurrection de Jésus, de sorte que devenus un avec Lui (Jn 17.21) et voyant les choses comme Dieu les voit, nous puissions inscrire notre action dans la Sienne, au lieu de toujours ramer en vain contre la tempête déchaînée ! Nous foulerons alors aux pieds le monde impie (Rm 16.20) comme Jésus a marché sur l’eau ! N’est-ce pas que celui qui croit en Jésus fera les mêmes œuvres que Lui, et en fera même de plus grandes (Jn 14.12) ? Mais pour cela, je le répète, il faut d’abord être uni à Dieu, ce qui est le rôle de la prière, et de façon suréminente, de la Messe. Participer à la Messe est en effet le moyen de réaliser le Corps du Christ, Lui qui a « reçu tout pouvoir au Ciel et sur la terre (Mt 28.20) ». Si « la réalité, c’est le Corps du Christ. (Col 2.17) » alors tout ce qui se fait en dehors de ce Corps est vain. Aussi n’y a-t-il rien de plus urgent pour le salut du monde et celui de chacun d’entre nous, que de devenir membre vivant de ce Corps. Devenez ce que vous recevez et alors Satan, le Prince de ce monde (Jn 12.30 ; 14.31 ; 16.11), « actuel et mauvais (Ga 1.4) » trouvera à qui parler ! La liturgie de l’Église rend présent le Corps du Christ, et nous unissant à Lui, elle nous unit les uns aux autres, pour que le Christ règne « sur la terre comme au Ciel »  ! Le salut nous est donné par l’Église, et non pas par l’État, si protecteur ou salvateur qu’il se prétende. Si nous ne réussissons pas à devenir le Corps du Christ, nous serons happés par celui du mondialisme, ce projet d’unifier l’humanité sous un autre chef que le Christ. Les premiers chrétiens, sans armée, ont converti le puissant Empire romain, et changé le cours de l’histoire du monde. Comment ? En s’aimant les uns les autres, selon le commandement que Jésus leur avait donné. Ils rendaient ainsi le Christ présent, tout désireux qu’ils étaient de participer non pas seulement sacramentellement mais physiquement à Sa mort pour être jugés dignes de participer aussi à Sa résurrection (Ph 3.10-11).

Alors même que les foules voulaient Le faire roi après la multiplication des pains, Jésus S’est retiré dans la solitude de la prière (Jn 6.15). Comment mieux dire qu’il faut nous garder des situations de pouvoir que donnent les foules ? Et en effet, il est devenu bien difficile aujourd’hui d’exercer nombre de professions et de responsabilités sans le payer de son âme… Si Elie et Jésus nous disent que Dieu ne Se trouve pas dans le bruit et l’agitation, mais uniquement dans le silence et la prière, alors sachons nous aussi, partir le temps d’une retraiteà la rencontre de l’Unique, et nous Lui présenterons nos doléances. Ce temps de vacances pourrait nous en offrir l’opportunité… Le temps ―qui ne reviendra jamais―, nous est donné pour cela : réaliser en nous l’image de Dieu… et non pas celle du monde ! Nous devenons l’image de ce que nous regardons… Élie n’a pas daigné s’arracher à la tranquillité du fond de sa grotte pour venir contempler à l’entrée de la caverne le spectacle grandiose et fascinant de l’ouragan, ni celui du tremblement de terre, ni celui du feu. Abstenons-nous nous aussi de regarder les ouragans de violence idolâtrée, les tremblements de terre où les valeurs même les plus sacrées sont bafouées et renversées, le feu des passions sensuelles exaltées, souffles d’enfer qui pénètrent les esprits et les corrompent si bien qu’ils en arrivent à prendre l’image pour la réalité… Combien d’esprits devenus ainsi étrangers à eux-mêmes, jouets des démons, et incapables d’entrer en possession de l’héritage divin !

Élie ne se décida à sortir de sa grotte que lorsqu’il reconnut à l’extérieur de lui-même ce qui l’habitait : la paix, qui est comme le murmure d’une brise légère… Et c’est en vertu de cette correspondance entre son recueillement intérieur et le murmure de la brise légère – le semblable s’unissant au semblable – qu’Élie rencontra Dieu… Le premier don que Dieu fait à ceux qui Le craignent est toujours la Paix : « Confiance ! C’est Moi ; n’ayez pas peur ! ». « Ce que Dieu dit, c’est la paix pour Son peuple ». La paix de notre âme nous permet de rencontrer Dieu… C’est pourquoi, comme Élie, nous ne devons jamais risquer de la perdre ! Il n’est jamais permis, même pour sauver son prochain ou son pays d’encourir pour soi-même le mal du péché, ―le péché étant, je le rappelle, de préférer un bien moindre à un bien supérieur. Lorsque saint Paul dit qu’il souhaiterait être maudit, séparé du Christ pour le salut de ses frères de race, il faut bien remarquer, − outre que les races existent, n’en déplaise à la République française depuis M. Hollande −, que saint Paul parle au conditionnel, et donc qu’il est prêt à tout pour le salut de ses frères de race, mais à condition que cela soit conforme à la Volonté de Dieu. Or Dieu ne saurait vouloir la damnation de quiconque, et donc pas davantage celle de Paul. Paul sera donc sauvé, mais ceux qui auront refusé de l’écouter seront damnés.

A la suite d’Élie qui ne rencontra Dieu que dans le murmure d’une brise légère, l’Église demande à ceux qui cherchent Dieu d’observer le silence dans la sainte liturgie. « Dans l’église, à la sacristie et dans les lieux avoisinants, le silence permet à tous de se disposer à célébrer les saints mystères avec cœur et conformément aux rites. (PGMR, n°45) ». Combien de célébrations qui ne sont que pitoyables agitations, où paroles et chants sont multipliés dans le but inavoué d’empêcher Dieu de parler, d’être entendu… Les pires ennemis de Dieu se trouvent souvent dans les églises ! Tout autant que le chant, le silence prépare l’assemblée à écouter le Seigneur, à Le rencontrer, L’adorer, Le prier, Lui offrir sa vie unie au sacrifice de Jésus, et L’accueillir, Lui, dans une communion vivante et sanctifiante. Le silence est le témoin de l’expérience spirituelle, et il l’enrichit en retour. Je remercie les personnes qui pour respecter le silence pendant la messe savent même étouffer leur toux dans leur mouchoir… Le silence est sacré ! Comme disait saint Jean de la Croix : « L’amour du silence conduit au silence de l’Amour. »… Chacun a le droit de pouvoir prier en silence dans la Maison du Seigneur. Mais il ne suffit pas d’être attentifs à Dieu pendant la Messe, il faut encore l’être après, et toujours. C’est pourquoi, comme Élie et comme les enfants de Fatima, faisons des sacrifices, renonçons à la télévision et aux distractions de ce monde, qui est « une conspiration contre la vie intérieure ». Sans quoi, lorsque le Seigneur apparaîtra, hommes de peu de foi, nous Le prendrons pour un fantôme, nous crierons de peur et Le fuirons au lieu de nous précipiter dans Ses bras ! Ô Seigneur, gardez-nous de cette dissipation des sens et de l’esprit qui fait de Vous un inconnu pour nous, et de nous des zombis ! « Veillez et priez sans cesse afin d’avoir la force de résister à tout ce qui doit vous arriver et de vous tenir debout au jour de Mon retour. (Lc 21.35) » dit le Seigneur. Amen.