Pacte de Marrakech : ces généraux qui accusent Macron de «trahison»

Dans une lettre ouverte, un groupe de généraux à la retraite demande au chef de l’Etat de ne pas ratifier ce texte.

 Plusieurs généraux redoutent un « afflux massif d’immigrés ». (Photo d’illustration)
Plusieurs généraux redoutent un « afflux massif d’immigrés ». (Photo d’illustration) AFP/Anthi Pazianou

    Un ancien ministre de la Défense, dix généraux, un amiral et un colonel. Dans un contexte de crise politique issue de la fronde des Gilets jaunes, un groupe d'officiers à la retraite vient de contresigner une lettre ouverte, demandant à Emmanuel Macron de renoncer à signer le pacte de Marrakech.

    Les signataires de cette lettre, écrite par le général Antoine Martinez, un ancien haut gradé de l'armée de l'air, estiment qu'en ratifiant le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, Emmanuel Macron se rendrait « coupable d'un déni de démocratie, voire de trahison à l'égard de la nation ». Cette missive est déjà abondamment relayée dans certains groupes de Gilets jaunes sur les réseaux sociaux.

    Capture d’écran Facebook
    Capture d’écran Facebook AFP/Anthi Pazianou

    « En décidant seul de signer ce pacte », y est-il écrit, « vous ajouteriez un motif de révolte supplémentaire à la colère d'un peuple déjà malmené ». En cause, selon les signataires, la perte de souveraineté de la France sur les politiques de migration.

    Une fois approuvé, croient-ils savoir, ce pacte « pourra s'imposer à notre législation nationale par le biais de traités préexistants ou du principe de responsabilité commune ». « La seule souveraineté qui restera à la France consistera à fixer librement la façon dont les objectifs du pacte devront être mis en œuvre ».

    Parmi les signatures connues, figure Charles Millon, l'ex-ministre de la Défense de Jacques Chirac, tombé en disgrâce après son alliance avec le Front national aux régionales de 1998. Mais aussi le souverainiste Didier Tauzin, ce général qui avait dû renoncer à sa candidature à l'élection présidentielle de 2017 faute de parrainages. Ou encore le général Christian Piquemal, radié des cadres de l'armée en septembre 2016, après avoir organisé une manifestation interdite contre les migrants à Calais.

    Un « devoir d'expression »

    Contacté, Charles Millon n'a pas donné suite à nos sollicitations. Le général Tauzin, lui, confirme avoir signé cette lettre. « J'ai considéré que dans certaines circonstances, le devoir de réserve devait faire place au devoir d'expression », assume l'ex-commandant du 1er régiment de parachutistes de marine (RPIMA) de Bayonne.

    « Le pays, insiste ce fervent opposant à Emmanuel Macron, part à la dérive. Ne rien dire, c'est l'accepter ». Pour lui, le pacte de Marrakech, « c'est la porte ouverte à des migrations de grande ampleur, dans la durée ». « C'est créer potentiellement des troubles terribles, des guerres ethniques sur notre territoire », s'épouvante-t-il encore.

    Même liberté de ton revendiquée du côté du général André Coustou, 73 ans, à la retraite depuis 2001. « Nous sommes des citoyens comme les autres, nous payons nos impôts. Nous avons le droit de nous exprimer à partir du moment où nous ne dévoilons pas de secrets militaires », plaide-t-il. « Une fois signé, ce pacte va contraindre notre pays à accueillir un grand nombre d'immigrés, alors qu'il n'a pas encore assimilé ceux qui sont déjà là. La France va perdre sa francité ».

    Autant d'arguments reprenant la thèse du grand remplacement, théorisée par l'essayiste de la droite dure Renaud Camus. Ces accusations tournent également en boucle chez certains Gilets jaunes, qui ont fait de ce pacte de Marrakech leur cheval de bataille, et dont l'extrême droite s'est emparé.

    Comme nous vous l'expliquions début décembre, ce pacte ne fait qu'établir un cadre de coopération juridiquement non contraignant, qui respecte la souveraineté des Etats. Approuvé lundi à Marrakech en présence de 160 pays, le texte doit être ratifié le 19 décembre prochain, lors de l'Assemblée générale des Nations unies.