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L'heure de la mort, vue par Arnaud Dumouch

Par l’analyse ci-dessous, je voudrais dénoncer l’enseignement de M. Arnaud Dumouch sur les fins dernières. J’ai bien conscience que cette analyse est de nature à remettre en cause le Nihil Obstat et …More
Par l’analyse ci-dessous, je voudrais dénoncer l’enseignement de M. Arnaud Dumouch sur les fins dernières. J’ai bien conscience que cette analyse est de nature à remettre en cause le Nihil Obstat et l’Imprimatur qui ont été donnés à ce livre par l’archidiocèse de Paris…
Le souci de M. Dumouch est celui du salut des païens et des pécheurs.
Pour cela notre auteur imagine la mort comme un passage suffisamment long pour que Jésus glorieux et Lucifer y apparaissent simultanément à l’âme afin de lui proposer chacun de faire enfin et alors seulement en toute lucidité et liberté le choix de sa destinée éternelle. Telle est « la manière dont Il (Jésus) sauve les païens » :
« Le retour du Christ en gloire accompagné des nuées du Ciel (…) vécu par chaque homme au moment qui constitue la fin de son monde à lui, c’est à dire à l’heure de la mort. » (p. 13). La mort n’est pas donc pas la fin de la vie pour A. Dumouch, mais : « une deuxième étape de toute vie humaine », dans laquelle « Certaines …More
Roy-XXIII
CEC -1036 Les affirmations de la Sainte Écriture et les enseignements de l’Église au sujet de l’enfer sont un appel à la responsabilité avec laquelle l’homme doit user de sa liberté en vue de son destin éternel.
- 1037 Dieu ne prédestine personne à aller en enfer (cf. DS 397 ; 1567) ; il faut pour cela une aversion volontaire de Dieu (un péché mortel), et y persister jusqu’à la fin.More
CEC -1036 Les affirmations de la Sainte Écriture et les enseignements de l’Église au sujet de l’enfer sont un appel à la responsabilité avec laquelle l’homme doit user de sa liberté en vue de son destin éternel.
- 1037 Dieu ne prédestine personne à aller en enfer (cf. DS 397 ; 1567) ; il faut pour cela une aversion volontaire de Dieu (un péché mortel), et y persister jusqu’à la fin.

► L'illumination finale : On désigne sous le nom d’'illumination finale une théorie qui affirme que, au moment la mort, chaque homme reçoit une illumination spéciale de la grâce de Dieu qui lui permet de choisir entre Dieu et le mal, entre le Ciel et l’'Enfer. Qu'’en est-il ? Qu'’en dit l’'Église ? Qu'’en dit la théologie ? S'’agit-il du cas des enfants morts sans baptême, ou bien s’'agit-il, pour l’'adulte, de l’'acceptation ou du refus de la masse des péchés qu'’on a commis pendant la vie ?

Si l’'on recherche des documents sérieux, force est de constater que la moisson est bien maigre. Très maigre même. Les théologiens anciens n'’en parlent pas, seuls quelques modernes y font allusion, et le plus souvent à propos des enfants morts sans Baptême, et encore pour dire qu'’on ne peut pas dire grand-chose, sinon que cela est contraire à la pensée constante de l’Église. On peut le voir, par exemple, dans l’'ouvrage d’'Albert Michel Enfants morts sans baptême, Paris Téqui, 1954.
De cette recherche, on peut tout de même tirer ce qui suit.

1. Cette théorie est gratuite. Rien, ni dans la sainte Écriture, ni dans le Magistère de l’'Église, ni dans l’'enseignement des Pères et des théologiens, ni dans la prédication des saints, rien ne permet d'’affirmer qu’'une telle illumination existe. C'’est à ceux qui l’'affirment d’'en apporter un commencement de preuve ou de vraisemblance.
Si l’'on se reporte à ce que dit saint Thomas d’'Aquin de la mort et de ses circonstances, on voit bien qu’'il n'’y a aucune place pour cette illumination ni pour sa possibilité. Ainsi Contra gentes, IV, 91, 92, 93, 95.

2. Cette théorie est suspecte. Si le Magistère ne s'’est pas directement prononcé, il y a tout de même des indications très nettes sur ce qu'’en pense l'’Église.

a] Voici ce qu'’écrit José Ricart Torrens, Du nombre des élus, Nouvelles éditions latines 1965, page 127 :
« Le 5 mars 1936, le Saint-Office inscrivait dans l'’Index des livres prohibés le livre de Luis G. Alonso Getino, Del gran numero de los que se salvan y de la mitigación de las penas eternas (Madrid, f.e.d.a., 1934).
« Le 6 mars 1936, l’'Osservatore Romano commentait ainsi cette mise à l'’Index :
« Cette condamnation mérite qu’'on y attache une importance particulière et qu’'on la signale tout de suite à l’'attention des fidèles pour le tort très grave que pourrait leur causer la lecture du livre en question. Dans ladite publication, en effet, on s’'inspire d'’idées mises en vogue depuis quelque temps, surtout par des théologiens protestants ; en s'’appuyant sur des arguments spécieux et des interprétations arbitraires de textes de la sainte Écriture et en citant certaines phrases prononcées par quelques Pères et Docteurs, on attaque à fond la claire et précise doctrine traditionnelle catholique sur l’'éternité et la nature des peines de l'’Enfer. Et comme si cela ne suffisait pas, on défend en outre, ex professo, dans ledit volume, une étrange théorie concernant une prétendue illumination spéciale que les âmes humaines recevraient de Dieu au moment de leur séparation du corps, et grâce à laquelle elles se convertiraient intimement et parfaitement au Créateur et seraient ainsi justifiées et sauvées.
« Il n’'est pas nécessaire, certes, de beaucoup de paroles pour faire comprendre combien grave est le danger caché sous ces théories qui, non seulement n'’ont aucun fondement dans la Révélation, mais sont même en contradiction avec elle et avec le sentiment commun de l'’Église. »

b] Voici ce qu'’écrit Albert Michel, Doctrine et vie chrétiennes, Berche et Pagis, Paris 1946, p. 310 :
« C’est donc, pour le moins, une grave témérité d'’imaginer qu'’aussitôt après la mort un répit normal, accompagné d’'une illumination de la grâce, sera encore accordé au pécheur pour se convertir. Le concile du Vatican avait préparé la définition suivante : « Après la mort, terme de notre vie, il nous faut tous paraître immédiatement au tribunal du Christ... et après cette vie mortelle, plus de pénitence possible pour se justifier. »

Voici le texte exact auquel fait référence A. Michel :
«Post mortem quæ est viæ nostræ terminus, illico omnes manifestari nos oportet ante tribunal Christi, ut referat unusquisque propria corporis prout gessit, sive bonum, sive malum (II Cor. v, 10) ; neque ullus post hanc mortalem vitam relinquitur locus pænitentiæ ad justificationem. » [Mansi LIII, 175. Cité dans le Dictionnaire de Théologie Catholique, article Mort, col. 2494]

Le concile Vatican I ayant été interrompu par la guerre franco-allemande de 1870, ce texte n'’a pu être présenté ni voté. Il n’'est donc pas, par lui-même, un acte du Magistère. Mais il est une bonne expression de l’'enseignement constant de la sainte Église catholique.

3. Cette théorie est néfaste. Elle entretient le pécheur dans une fausse sécurité, contrariant la motion intérieure de la grâce qui l’'attire au repentir et à la conversion. Elle s’'oppose à la prédication chrétienne qui doit rappeler à temps et à contretemps les fins dernières et leur gravité. En effet, très souvent, Dieu se sert pour convertir les pécheurs de la crainte salutaire qu’'inspire son jugement, de la crainte d'’être surpris par la mort dans l’'état de péché.
Cette théorie vient donc désarmer voire anéantir l’œ'œuvre de Dieu, en laissant le pécheur s'’imaginer qu'’il peut toujours repousser la grâce puisqu'’il lui reste une dernière chance qui rachètera tout.
Il ne faut pas croire qu’'on exalte la miséricorde de Dieu en imaginant un systématique repêchage in extremis. La miséricorde de Dieu est infiniment plus grande : c’'est pendant le cours de la vie ici-bas qu'’elle convertit, qu'’elle sanctifie, qu’'elle élève l’'ancien pécheur aux sommets les plus sublimes de l’'union à Dieu –– qu’'on se souvienne de sainte Marie-Madeleine –– par une grâce qui transforme intérieurement, et répand la paix et l’'édification ; elle n’'encourage pas le péché ni ne contredit ses propres avertissements.

Gratuite, suspecte, néfaste…. La théorie de l'’illumination finale n’'a aucune chance d’'être vraie. Il faut bien vite oublier cette invention des hommes à propos de réalités qui leur échappent totalement et qu’'ils ne pourraient connaître que par Révélation divine. Il vaut mieux se convertir que se rassurer, il vaut mieux prier pour les pécheurs que de les tromper sur leur état. Soyons les instruments de la vraie miséricorde de Dieu, non pas les propagateurs des forgeries des hommes.

Par Abbé Hervé Belmont