Pourquoi les miracles eucharistiques ?

Pourquoi les miracles eucharistiques ?

Le phénomène s’est produit de multiples fois dans l’histoire, il est bien connu aujourd’hui grâce au jeune Carlo Acutis. Il ne va pas cependant sans poser de réelles questions théologiques. À quoi servent et que sont les miracles eucharistiques ?

Du miracle de l’eucharistie aux miracles eucharistiques
Avant d’évoquer les miracles eucharistiques, il convient de s’arrêter sur le miracle de l’eucharistie, à savoir : la transsubstantiation.

Le premier aspect de ce miracle c’est […] que le corps du Christ, sans quitter le ciel, est rendu présent sur nos autels, c’est que nous avons sous cette frêle hostie, non pas un corps nouveau, créé ou engendré, mais le vrai corps historique, né de Marie, immolé sur la croix, maintenant immortel et glorieux. Voilà qui dépasse toutes les capacités de la nature et requiert la vertu de l’Infini[1].

Que l’on considère l’eucharistie dans sa production (transsubstantiation) ou dans sa permanence (présence réelle), il y a bien un fait produit par Dieu dans le monde en dehors de l’action de toute nature créée[2].


Certes, ce fait n’est pas sensible, puisque demeurent les accidents (les apparences sensibles) du pain et du vin. Toutefois, saint Thomas admet que l’on puisse parler d’un miracle :

[…] parmi les miracles de Dieu, certains sont de foi comme celui de l’enfantement virginal et celui de la résurrection du Seigneur, et aussi celui du sacrement de l’autel. Et c’est pourquoi le Seigneur a voulu qu’ils soient plus cachés afin qu’on ait plus de mérite à y croire[3].

Comme tout miracle, donc, le miracle de l’eucharistie doit susciter notre admiration[4].


Mais, puisque ce miracle est « caché », c’est de la foi seule que jaillit l’admiration, et non de l’expérience sensible. Il en résulte, lorsque la foi est vive, une admiration très pure, perceptible dans les compositions liturgiques de saint Thomas d’Aquin :

Quantum potes tantum aude, quia major omni laude. Tout ce qui vous est possible, osez-le ; car il est au-dessus de toute louange[5].

Tibi se cor meum totum subjicit, quia te contemplans totum deficit. À vous, mon cœur tout entier se soumet, parce qu’à vous contempler, tout entier il défaille[6]

Tantum ergo Sacramentum, veneremur cernui. Il est si grand, ce sacrement ! Adorons-le, prosternés. […] Genitori, Genitoque, laus et iubilatio. Au Père et au Fils qu’il engendre, louange et joie débordante[7].


Le miracle de l’eucharistie demeure donc « caché », accessible seulement aux yeux de la foi : « Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ![8] » . Dans sa miséricorde, cependant, et pour secourir une vertu parfois chancelante, en de rares occasions, Dieu a voulu que le miracle caché soit manifesté par des prodiges visibles. Ayant évoqué les miracles « cachés », saint Thomas poursuit en en effet : « Mais certains miracles ont pour but de confirmer la foi, et ceux-là doivent être manifestes.[9] »

Des miracles eucharistiques au miracle de l’eucharistie
J.Ladame et R. Duvin classent ces prodiges eucharistiques selon les effets miraculeusement produits : apparition du Christ dans l’hostie consacrée, guérison d’un malade, conjuration ou domination des éléments, conversion d’un impie, préservation des saintes espèces menacées par des mains sacrilèges ou les injures du temps… Mais « les plus étonnamment spectaculaires sont assurément ceux où les espèces du pain et du vin, souvent à la suite d’un doute du prêtre au cours de la messe, sont transformés soudain en chair et en sang.[10] »

Parmi ces derniers, le plus célèbre est probablement le miracle de Lanciano (VIIIe s.) Il faut dire que, malgré son ancienneté, les analyses menées au début des années 1970 sur les « reliques » eucharistiques lui ont donné une nouvelle actualité. En voici le récit, tel qu’une tradition constante l’a conservé :

« Dans une petite église dédiée à saint Legonziano, […] un moine basilien, qui célébrait la messe en rite latin, après la consécration se mit à douter de la présence réelle du Christ sous les saintes Espèces. C’est alors que, sous les yeux de ce prêtre, l’hostie se changea sous un morceau de chair et le vin consacré en du sang réel qui se coagula en cinq caillots irréguliers de formes et grosseurs différentes[11]. »

Le P. Sammaciccia souligne l’opportunité du miracle :

[…] dans les premiers siècles de l’Église, alors que n’existait pas une dichotomie rigide entre le rituel latin et le rituel oriental, les ministres grecs – ce qu’était très probablement le moine basilien protagoniste du miracle – célébraient très souvent en rite latin, utilisant des hosties rondes faites de pain azyme, et non des hosties carrées de pain fermenté, comme le voulait normalement le rite grec[12].

C’est précisément cela qui peut expliquer le doute du prêtre, qui fut l’occasion du miracle.

Les « reliques » de ce miracle, le morceau de chair et les caillots de sang, furent conservées jusqu’à nos jours et firent l’objet de reconnaissances successives. L’examen scientifique mené en 1970-1971 par le Dr Odoardo Linoli permit d’établir, entre autres, les faits suivants :

1 – Il s’agit de chair et de sang humains véritables.

2 – La chair est constituée de tissu musculaire du myocarde (cœur), tandis que le sang est de groupe AB (celui que l’on retrouve, par exemple, sur le Saint Suaire).

3 – La chair et le sang se trouvent dans un état de préservation remarquable au regard des conditions dans lesquelles ils furent conservés des siècles durant[13].

Cet examen scientifique « confirme » en un sens le miracle, en ce qu’il établit qu’il ne s’agit d’un simple changement d’apparence et semble exclure l’hypothèse d’un faux. Il appelle néanmoins une précision théologique importante : le miracle eucharistique ne nous donne pas à voir le corps et le sang du Christ selon leur apparences propres. Autrement, le corps et le sang du Christ (ou du moins une partie de ceux-ci) ne seraient plus au ciel, mais seulement à Lanciano. En revanche, la chair et le sang du Christ sont bien sur l’autel après la consécration car ils n’y sont pas sous leurs apparences propres, mais sous celles du pain et du vin :

Le corps du Christ ne peut être vu sous son aspect propre que dans un seul lieu où il est contenu comme dans des limites. Aussi puisque c’est au ciel qu’on le voit et qu’on l’adore, ce n’est pas sous son aspect propre qu’il est vu dans ce sacrement[14].

Autrement dit, la chair et le sang analysés à Lanciano ne sont pas le Corps et le Sang que nous adorons sous les espèces sacramentelles. Cette chair et ce sang qui ont remplacé les espèces du pain et du vin furent produites miraculeusement par Dieu pour nous montrer que le Corps et le Sang véritables du Sauveur sont, à la manière d’une substance, réellement présents dans l’Eucharistie.

Mais ce ne sont pas ceux du Christ et, si nous les honorons, c’est comme une merveille causée par Dieu pour nous représenter le vrai Corps sacré et le vrai Sang précieux du Seigneur[15].

Ainsi, le miracle ne constitue pas une réalisation « plus parfaite » de la présence réelle[16], mais il a pour finalité d’en manifester la vérité : le miracle eucharistique nous conduit au miracle de l’eucharistie.

Abbé Charles Berger de Gallardo, FSSP
30 mai 2024

Références
↑1 Édouard Hugon OP, La Sainte Eucharistie, Téqui, Paris, 1924, p. 271
↑2 Cf. Saint Thomas d’Aquin, Somme Théologique [ci-dessous ST], Ia Pars, qu. 110, a. 4 : « Il y a miracle à proprement parler quand quelque chose est produit en dehors de l’ordre de la nature. »
↑3, ↑9 ST, IIIa, qu. 29, a. 1, ad 2m
↑4 Cf. ST, Ia, qu. 105, a. 7 : « Le mot miracle vient du mot admiration. L’admiration se produit quand des effets sont manifestés dont la cause demeure cachée. »
↑5 Extrait de la séquence Lauda Sion.
↑6 Extrait de l’hymne Adoro te devote.
↑7 Extraits de l’hymne Pange lingua.
↑8 Jn 20, 29
↑10 Jean Ladame et Richard Duvin, Prodiges eucharistiques, Éditions France-Empire, Paris, 1981, p. 173
↑11 Ladame et Duvin, op. cit., p. 243
↑12 Bruno Sammaciccia [trad. : Roland Bourdariat], Le miracle de Lanciano, Dominique Martin Morin, 1997.
↑13 Cf. Ladame et Duvin, op. cit., p. 244-246 ; Sammaciccia, op. cit., p. 39-71
↑14 ST, IIIa, qu. 76, a. 8
↑15 Ladame et Duvin, op. cit., p. 178
↑16 La présence réelle demeure-t-elle lorsque les espèces du pain et du vin sont miraculeusement changées en corps et en sang miraculeux ? S‘agit-il du corps et du sang du Christ sous d’autres apparences que celles du pain et du vin – en l’occurrence celles de chair ou de sang humain, ou bien tout simplement la présence réelle a-t-elle cessé ? La question est délicate et demeure débattue. Nous la laissons intentionnellement de côté.

Abbé Charles Berger de Gallardo, FSSP
30 mai 2024
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« Mais certains miracles ont pour but de confirmer la foi, et ceux-là doivent être manifestes. » Les miracles eucharistiques actuels dans le novus ordo ont cette fonction. Mais en creux ils montrent aussi l'indubitable validité de la nouvelle messe et condamnent dans un même temps l'hérésie sédévacantiste qui proclame l'invalidité du novus ordo. Les miracles n'ont lieu que dans l'Église catholique, l'idéologie sédévacantiste qui ne voit dans l'Eglise catholique et romaine qu'une secte depuis Vatican2 est donc clairement erronée. Où sont les miracles eucharistiques chez les hérétiques ? Vont-ils réussir à poser un acte d'humilité et reconnaître qu'ils se trompent ? Tiendront-ils leur sédévacantisme devant Dieu lui-même ?

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