Synthèse sur la déclaration des trois évêques de la FSSPX le 27 juin 2013

Voici à notre avis l'appréciation que François a dû faire en lisant cette déclaration : "Chapeau! Mgr Fellay réussit le tour de force de paraître tradi tout en préparant le ralliement."

Avec l'Immaculée a rassemblé plusieurs commentaires de prêtres (Dom Thomas, Abbé Chazal, abbé Pfeiffer, abbé Hewko, abbé Rioult) pour faire cette synthèse. Nous avons ajouté aussi nos propres observations. On peut consulter le texte intégral de la Déclaration du 27 juin sur ce lien.

La doctrine de l’Eglise semble réaffirmée clairement dans la déclaration du 27 juin 2013 mais il n’en est rien :

Le paragraphe 1 remercie Mgr Lefebvre d’avoir sacré sans craindre l’accusation de désobéissance. Ce n’est pas tant l’accusation de désobéissance que l’accusation de schisme, dont on a usé à l’égard de Mgr Lefebvre au moment des sacres. On se demande pourquoi alors Mgr Fellay à saint Pré a expliqué le 4 mai 2012 qu’il avait rédigé la terrible Déclaration du 15 avril 2012 pour éviter l’accusation injuste de schisme ! La pensée de Mgr Fellay est contradictoire (cf. dernière conférence de l'abbé Rioult) parce qu'il n'est pas sincère. Il utilise l'argument qui lui plaît selon l'effet qu'il veut produire.

Dans le paragraphe 2, la lettre aux futurs évêques du 29 août 1987 est citée : « Je vous conjure de demeurer attachés au Siège de Pierre, à l’Église romaine, Mère et Maîtresse de toutes les Églises, dans la foi catholique intégrale, exprimée dans les Symboles de la foi, dans le catéchisme du Concile de Trente, conformément à ce qui vous a été enseigné dans votre séminaire. Demeurez fidèles dans la transmission de cette foi pour que le Règne de Notre Seigneur arrive. »

La citation est soigneusement choisie au milieu d'autres par les trois évêques et elle est tirée de son contexte. Si Mgr Lefebvre conjure les évêques de rester attachés au siège de Pierre, dans la profession de la vraie foi, il dit aussi précédemment dans la même lettre : "la chaire de Rome et les postes de Rome étant occupés par des antichrists, la destruction du Règne de Notre-Seigneur se poursuit rapidement (…)"

et aussi : « je vous conférerai cette grâce confiant que sans tarder le siège de Pierre sera occupé par un successeur de Pierre parfaitement catholique entre les mains duquel vous pourrez déposer votre épiscopat. »

Il est malhonnête d’utiliser cette lettre qui condamne ainsi l’accord pratique avec Rome dans cette déclaration du 27 juin où l’on envisage l’accord pratique avec Rome (cf. §11), le siège de Pierre étant toujours occupé manifestement par un antichrist : François.

Pour ceux qui veulent aller plus loin, voici in extenso, sur le lien ci-dessous la lettre de Mgr Lefebvre aux évêques avant les sacres :

docs.google.com/…/edit

Le troisième paragraphe est une "vraie savonnette théologique", comme dirait l'abbé Chazal. Citons-le :

"Le troisième paragraphe est une vraie savonnette théologique. Au lieu de dire tout simplement que les erreurs du Concile causent l'auto démolition de l'Eglise, on dit que la cause des erreurs qui sont en train de démolir l'Eglise est dans le texte en vertu d'un choix. Pourquoi ne pas dire que le texte est erroné ?

Parce que la politique de la Fraternité a changé. On ne peut plus rejeter le Concile dans son ensemble. Puisque le Concile a été légitimement convoqué, on ne peut pas dire qu'il est truffé d'hérésies, (sinon on s'en prend au "Magistère"), mais que presque tous ses textes amènent une nouvelle vision erronée des choses. L'erreur en soi n'est pas dans le Concile, mais elle vient après, même si c'est la faute des textes du Concile.

C'est ainsi que Mgr Fellay, dans son interview anglaise sur CNS, nous dit bien que le Concile a entraîné beaucoup d'erreurs par la suite, "mais ces erreurs ne viennent pas du Concile lui-même, mais de la façon commune de le comprendre."

C'est cela qui est grave pour Mgr Fellay. Un Concile aurait dû faire attention que son texte ne soit pas ouvert à des interprétations erronées et désastreuses."

Dans le paragraphe 4, le Magistère post-conciliaire est critiqué. Or, dans la Déclaration du 15 avril 2012, Mgr Fellay déclarait accepter ce magistère à la lumière de la Tradition (cf. §5 de la DQA). La déclaration du 27 juin laisse planer l’ambiguïté sur la position que la Fraternité va adopter vis-à vis de ce "magistère". Va-t-elle le rejeter ? La réponse est non. De même que pour Vatican II, elle ne le rejette pas, malheureusement.

Le paragraphe 5 a le même travers que le paragraphe 3. Au lieu de dire que le Concile lui-même combat la Royauté sociale de Notre-Seigneur, la déclaration dit que cette Royauté est combattue actuellement à cause du concile. De même, il n’est pas dit que le concile lui-même affirme les hérésies de la liberté religieuse, de l’œcuménisme et de la collégialité. Non, ces hérésies sont dans les conséquences du Concile. La déclaration du 27 juin reste donc fidèle à l’esprit du GREC qui disait que pour avoir une reconnaissance canonique de Rome, il ne fallait pas rejeter le concile en bloc. Voici la citation ambiguë : "Ainsi à cause du Concile, [ndlr : pourquoi pas "DANS LE CONCILE" ?] la royauté du Christ sur les sociétés humaines est simplement ignorée, voire combattue, et l’Eglise est saisie par cet esprit libéral qui se manifeste spécialement dans la liberté religieuse, l’œcuménisme, la collégialité et la nouvelle messe."

Le paragraphe six, dans le même esprit que le paragraphe 3 et 5, dit que la liberté religieuse conduit à demander à Dieu de renoncer à régner. Fr Pfeiffer et Hewko ont longuement parlé de cela. Le problème est que la liberté religieuse n'est pas seulement porteuse d’hérésie elle est en elle-même une hérésie et une attaque directe contre le règne social du Christ. Elle n’est pas la cause de l’attaque, elle est l’attaque en elle-même. Ce paragraphe laisse donc la porte ouverte à une interprétation de la liberté religieuse à la lumière de la tradition, dans la droite ligne de la Déclaration du 15 avril 2012.

Le paragraphe 7, au lieu de condamner clairement et de déclarer anathèmes Unitatis redintegratio et Nostra Aetate, dit qu’Unitatis redintegratio est « l’oecuménisme omniprésent » Voici le texte : "Au nom d’un œcuménisme omniprésent (Unitatis redintegratio) et d’un vain dialogue interreligieux (Nostra Aetate), la vérité sur l’unique Eglise est tue." Donc il n'est pas dit Unitatis redintegratio est hérétique mais seulement qu’on n’y respecte pas les bonnes proportions de l'œcuménisme. Cela sous-entend-il donc que s’il y avait moins d’œcuménisme, ce texte serait acceptable ? L’œcuménisme n’est plus rejeté par principe mais parce qu’il y en a trop. Quant à Nostra aetate, on dit que c’est un « vain dialogue interreligieux » mais on ne condamne pas Nostra aetate comme mauvais. On dit seulement que ce dialogue ne sert à rien, qu’il est vain. « La vérité sur l’Eglise est tue », au nom de ces deux textes, dit la déclaration. Cela sous-entend donc que même si le dialogue interreligieux n’est pas mauvais en soi, il ne sert à rien (cf. le mot "vain") et que pendant ce temps d’autres urgences dans l’Eglise ne sont pas traitées.

"Cet œcuménisme a ainsi littéralement tué l’esprit missionnaire par la recherche d’une fausse unité, réduisant trop souvent la mission de l’Eglise à la délivrance d’un message de paix purement terrestre"

Nulle part on ne voit l’expression « FAUX œcuménisme », chère à Mgr Lefebvre. Ce n’est plus l’œcuménisme qui est faux pour les trois évêques (puisqu’il peut être interprété à la lumière de la Tradition). C’est l’unité qu’il recherche. La déclaration emploie finement le terme « fausse unité ». L’œcuménisme n’est pas faux mais conduit à une "fausse unité", pour la déclaration du 27 juin. Unitatis redintegratio et Nostra aetate sont donc critiqués principalement sur le plan de leurs choix stratégiques qui ne sont pas considérés comme pertinents et sur le plan de leur ambiguïté, mais cela ne va pas plus loin. Ils ne sont plus critiqués au plan des principes et des hérésies qu’ils véhiculent. Ces textes sont considérés comme porteurs d'hérésie et non plus comme hérétiques en eux-mêmes. C’est très grave.

On est bien loin de l'affirmation de Mgr Lefebvre : « Plus on analyse les documents de Vatican II et leur interprétation par les autorités de l’Église, et plus on se rend compte qu’il ne s’agit ni d’erreurs superficielles ni de quelques erreurs particulières comme l’œcuménisme, la liberté religieuse, la collégialité, mais plutôt d’une perversion totale de l’esprit, de toute une philosophie nouvelle fondée sur le subjectivisme… C’est très grave ! Une perversion totale !... C’est vraiment effrayant. »

Dans le paragraphe 8, Lumen gentium est critiqué parce que ce texte introduit un « esprit collégial, égalitaire et démocratique » mais il n’est pas dit que Lumen gentium est inacceptable à cause de la collégialité.

Le paragraphe 9 maintient volontairement le silence sur un point qui avait été très controversé lors de la parution de la Déclaration du 15 avril. Mgr Fellay avait dit que la messe de Paul VI était « légitimement promulguée », au grand scandale de nombreux prêtres et fidèles. Dans la déclaration-sparadrap (la comparaison est de l'abbé Chazal), on retire le mot « légitimement » mais on ne revient pas à ce qui avait été toujours la position de la Fraternité jusqu’à présent : on n’ose plus dire que la nouvelle messe est illégitime. Un flou artistique est maintenu autour de ce problème crucial.
Ce paragraphe inquiétant est un signe fort et très net que la Fraternité n’est pas revenue sincèrement à l’esprit de Mgr Lefebvre.

Dans le paragraphe 10, non seulement le concile continue d’être présenté uniquement comme cause de la crise mais non hérétique en lui-même, mais en plus Mgr Fellay présente une fois de plus la mission de la Fraternité saint Pie X comme la transmission du « sacerdoce catholique dans toute sa pureté doctrinale et sa charité missionnaire » en occultant sa mission de combattre les erreurs de l’église conciliaire. L’abbé Rioult a bien relevé ce nouvel esprit dans sa conférence :
www.youtube.com/watch

Le paragraphe 11 révèle que l’esprit du Chapitre de 2012 est toujours bien portant : "soit qu’elle nous reconnaisse explicitement le droit de professer intégralement la foi et de rejeter les erreurs qui lui sont contraires, avec le droit et le devoir de nous opposer publiquement aux erreurs et aux fauteurs de ces erreurs, quels qu’ils soient –". Pour reprendre des images de l'abbé Chazal, le chancre va pouvoir se développer. Les confrères bien intentionnés de la Fraternité sont comme la chèvre de Monsieur Seguin qui veut aller dans la montagne. Comme Blanchette, ils se croient assez forts pour combattre le méchant loup romain. Certains leur ont bien dit que le loup les mangerait, comme il avait déjà mangé les autres communautés Ecclesia Dei. Mais n’écoutant que leur mauvais pasteur (Mgr Fellay), et leur témérité, ils ne tiennent aucun compte des avis de prudence et sont prêts à aller en découdre avec la Rome conciliaire, pour la convertir, pensent-ils. Comme si on pouvait convertir des francs-maçons haut-placés dont la vie a été consacrée à détruire l'Eglise et qui sont dans le vice jusqu'au coup... Rome accordera certainement à la Fraternité, comme il était dit dans la Déclaration du 15 avril 2012, un droit de « légitime discussion » pour pouvoir ensuite, une fois que la « reconnaissance canonique » aura été obtenue, mieux la croquer, comme le loup fit avec Blanchette et comme Mgr Pozzo fit avec l’IBP.

La déclaration affirme que l’autorisation donnée à la Fraternité de combattre les erreurs permettrait « un début de rétablissement de l’ordre ». C'est faux. Les supérieurs faisant les sujets, c’est la conversion du pape qui rétablira l’ordre. Se mettre sous sa tutelle tant qu’il est « antichrist » ne servirait qu’à ajouter à la confusion. Blanchette ne ferait pas long feu.

Rappelons la phrase de Mgr Lefebvre, Fideliter n°70, p. 6 :

"Et d’abord de quelle Eglise parle-t-on ? Si c’est de l’Eglise conciliaire, il faudrait que nous qui avons lutté contre elle pendant vingt ans parce que nous voulons l’Eglise catholique, nous rentrions dans cette Eglise conciliaire pour soi-disant la rendre catholique. C’est une illusion totale. Ce ne sont pas les sujets qui font les supérieurs, mais les supérieurs qui font les sujets. »

Seule la Sainte Vierge pourra convertir le pape, lorsque les événements, annoncés à Sœur Lucie à Rianjo se réaliseront et que le chef de l’Eglise se décidera à consacrer la Russie au Cœur Immaculé de Marie, en union avec tous les évêques du monde entier, comme cela a été demandé à Lucie à Tuy, le 13 juin 1929.