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Resurection
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Cardinal Barbarin"la société est en danger" le 27 septembre 2012 Eminence, revenons sur la polémique au sujet du mariage homosexuel qui a déchaîné les passions… Cardinal Barbarin. J’ai expliqué la …Plus
Cardinal Barbarin"la société est en danger"

le 27 septembre 2012
Eminence, revenons sur la polémique au sujet du mariage homosexuel qui a déchaîné les passions…
Cardinal Barbarin
. J’ai expliqué la rupture de société que représenterait le mariage de deux personnes du même sexe. En mesurons-nous bien les conséquences ? Je ne sais pas si j’ai choisi de bons exemples, l’autre jour, car certains mots ont blessé et ont créé un tel “buzz” que ce que je voulais dire n’a pas été entendu. Pourtant, on peut poser la question de savoir comment on répondra aux demandes qui viendront ou qui apparaissent déjà : “Pourquoi toujours deux ? Nous, nous voulons nous marier à trois, à quatre.” Comment vont répondre ceux qui ont promis “le mariage pour tous” ! Lorsque des repères majeurs de la société disparaissent, on ne sait plus comment se situer.
Mais revenons à la question telle qu’elle se pose aujourd’hui, c’est là le fond du problème. On nous dit que cette loi est indispensable au nom de l’égalité. Mais a-t-on bien compris qu’elle va créer de nouvelles inégalités ? Qu’est-ce qu’on répondra à un enfant qui dira : “Pourquoi, moi, j’ai deux papas et pas de maman ?” Et quand sur le livret de famille, on verra écrit “Parent 1, Parent 2”, beaucoup diront : “Attendez, moi, je ne suis pas le parent 1, je suis la maman !”
Ce n’est pas l’enseignement de la morale chrétienne ; il en va de l’équilibre de nos vies et de nos familles. Ce projet suscite d’ailleurs de grandes oppositions chez les juifs (je pense notamment à la déclaration de M. Joël Mergui, président du Consistoire) et chez les musulmans (à celle de M. Tarek Oubrou, imam de Bordeaux) et aussi chez certaines personnes homosexuelles qui m’ont envoyé des messages très touchants, ces jours derniers. Nous, responsables chrétiens, juifs et musulmans de Lyon, avions signé en 2007 une déclaration rappelant cette vérité simple et fondamentale pour toutes les cultures et les civilisations : le mariage, c’est l’union d’un homme et d’une femme. Si on modifie ce pivot, ce sera la source de profonds déséquilibres.
Le “mariage pour tous” aura de lourdes conséquences : il ne s’agit pas là seulement d’un vote pour satisfaire le désir de quelques-uns, mais d’une redéfinition majeure de notre vie en société… Un Parlement qui change ce fondement doit mesurer ce qu’il fait et savoir que c’est tout un peuple qui aura à en assumer les conséquences.
Dans une France qui a voté, en 1905, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, quand vous réagissez, ça résonne !
Un chrétien est un citoyen ; il a donc le droit de donner son avis sur les grandes questions de société. Cela, tous les gouvernements le reconnaissent, et ils consultent toujours les différents courants de pensée au moment d’élaborer une nouvelle loi.
Le prêtre que je suis s’implique dans la vie, le bien des enfants, des vieillards ou des malades. Je m’engage régulièrement au sujet des immigrés, du chômage et, en particulier ces dernières semaines, des Roms… Bref, comme l’affirme le concile Vatican II, les grandes préoccupations de notre temps résonnent dans le cœur de tout croyant. C’était vrai pour moi lorsque j’étais vicaire dans la banlieue, et c’est toujours aussi vrai maintenant. Bien sûr, ça n’a pas le même écho. Aujourd’hui, il m’arrive souvent de dialoguer avec des responsables et je m’exprime librement. Je ne crains pas de les mettre en garde et d’expliquer ce qui me paraît important ou dangereux. Libre à eux de m’écouter.
Quand j’ai reçu récemment le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, contrairement à ce qui a été dit, nous avons surtout longuement évoqué la situation des Roms, puis la laïcité, et enfin il m’a interrogé sur le mariage entre deux personnes de même sexe. Et il m’a écouté, même s’il n’est pas d’accord avec moi.
Autre sujet de polémique : la liberté de la presse…
Bien sûr, je suis pour. Critiquer, envoyer des piques, c’est assez sain. J’ai souri en regardant ma propre caricature dans “Le Canard enchaîné”. Pourquoi s’en offusquer ? Mais faire un film uniquement pour blesser des croyants, c’est inadmissible. Et quand on voit qu’en une semaine cela a entraîné la mort de 30 personnes, disons-le clairement, c’est criminel. Je suis pour la liberté de la presse, mais pas au prix du sang !
Rome va fêter les 50 ans de l’ouverture du concile Vatican II, le 11 octobre 2012. Quel bilan en tirez-vous ?
Jean XXIII avait demandé de dépoussiérer l’Eglise et de faire remonter au jour des trésors oubliés. Il y avait vraiment besoin de ce renouveau : la liturgie, la responsabilité des laïques, la vie et le rôle des prêtres et des évêques, notre collaboration… tout cela a profondément changé. Il avait aussi demandé de travailler à l’unité entre les chrétiens, au dialogue avec les autres religions. Que de progrès dans ces domaines ! Il y a désormais une relation fraternelle avec les orthodoxes, l’Eglise arménienne, les protestants. A Lyon, nos rapports sont si bons avec la communauté anglicane que nous lui prêtons une église pour célébrer son office. L’œcuménisme et le dialogue interreligieux ont fait des bonds extraordinaires. Ici, nos relations avec les juifs et les musulmans sont exceptionnelles. Cette semaine, d’ailleurs, je vais aller prier pour la fête de kippour à la synagogue, où le grand rabbin m’accueille toujours avec une vraie amitié. Mais il n’y a pas que dans le Rhône que ce dialogue est merveilleux. Autre avancée majeure du concile Vatican II, et j’aurais dû la mettre en tête : les catholiques ont enfin trouvé le goût de la parole de Dieu. La Bible, naguère, leur paraissait quelque peu hermétique, elle est maintenant ouverte par tous et elle a réveillé notre foi.
“Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, m’aécouté, même s’il n’est pas d’accord avec moi”
Vous éludez le testament moral du cardinal Martini, décédé le 31 août, pour qui l’Eglise aurait deux cents ans de retard…

Pas du tout ! Il est quand même permis de se poser des questions sur une interview publiée après sa mort. Mais je vous dirais qu’en 2005, novice au conclave, je l’avais consulté et il m’avait longuement parlé de l’Eglise et du Vatican, qu’il connaissait évidemment beaucoup mieux que moi. Il voulait que l’Eglise se réveille, et il avait raison. A Milan et dans nos grandes villes européennes, les églises sont vides ! L’Europe a besoin d’une nouvelle évangélisation ; c’est justement le thème du synode qui commence dans quelques jours. Mais quand je lui avais parlé du dynamisme de l’Eglise à Madagascar, il était bien au courant, je vous assure ! Certes, des pans de l’Eglise se sont effondrés, mais en même temps, des phénomènes nouveaux, enthousiasmants, dont je suis le témoin direct à Lyon, apparaissent partout. Chez nous, des jeunes entre 18 et 25 ans sont capables, à la fin du mois d’août, de sacrifier, quatre années de suite, une semaine entière de leurs vacances pour vivre des “Labos de la foi”. Ils mesurent l’exigence que cela demande d’être chrétien et ils veulent qu’on leur donne “l’équipement” dont ils auront besoin pour être de vrais témoins du Christ. Le cardinal Martini évoquait aussi le décorum. Paul VI l’avait déjà allégé, et il y a encore beaucoup à simplifier, mais qu’on n’oublie pas la beauté à laquelle tout le monde a droit. Je crois que la plus belle messe à laquelle j’ai participé, dans ma vie, a été celle de Benoît XVI aux Invalides, le 13 septembre 2008 devant le plus éblouissant monument civil de Paris, avec une esplanade archi pleine. Cela demeure à jamais gravé dans nos mémoires et chaque fois que je repasse devant les Invalides, j’y pense, je revois cette messe magnifique.
L’Eglise ne pourrait-elle pas être plus tolérante ?
Tolérante ? C’est un mot très insuffisant ; elle doit être aimante, servante, fervente… Si vous pensez au mariage des prêtres, savez-vous que Benoît XVI a posé cette question dès son premier synode, en 2005 ? Celui qui s’est montré le plus opposé, c’était le patriarche Sfeir, du Liban, qui a expliqué : “Justement, chez nous, les maronites, les prêtres peuvent se marier. Alors, quand il y a eu la guerre, tous ceux-là sont partis avec leur femme et leurs enfants. Personne ne va le leur reprocher, mais seuls sont restés les prêtres entièrement consacrés à la communauté.” Et de conclure : “Ne bradez pas ce trésor.” Ces arguments venant d’un patriarche catholique ont beaucoup frappé l’assemblée.
Sans doute y aurait-il moins de prêtres homosexuels ?
Le problème n’est pas là. Dans le clergé comme dans toute la société, il y a des personnes qui ont des désirs homosexuels et d’autres non. Tous les prêtres se sont engagés à vivre la chasteté dans le célibat. C’est difficile, cela requiert une grande exigence. En fait, la gestion des désirs de son propre corps, quel que soit son état de vie, est toujours délicate. Se donner dans le célibat, c’est un engagement à vivre comme Jésus, lui qui, à chaque messe, nous dit : “Ceci est mon corps livré pour vous.” Bien sûr, cela ne fait pas pour autant oublier sa sexualité.
Vingt pour cent des membres du clergé en 2012 vivent avec une femme, admet-on officieusement dans l’Eglise.
Vive les statistiques ! C’est comme si vous me disiez que 30 % des hommes trompent leur épouse… Que voulez-vous que je vous réponde ? Sans aucun doute, je préférerais qu’ils soient fidèles, la République aussi, puisque lors du mariage à la mairie, l’officier d’état civil prononce les mots “respect” et “fidélité” à propos de cet engagement. Pour nous, le trahir est un péché grave. Mais que celui qui n’a jamais péché ose se montrer ! Il n’y a pas de vie sans faute, mais il y a beaucoup de fautes qu’on peut ne pas commettre. Cela évite de multiples blessures. Ce qui est honnête, est de ne pas se justifier et d’accepter d’être pardonné, comme saint Pierre, par exemple, dans l’Evangile. C’est ce que les juifs font à Yom Kippour et nous, les chrétiens, dans le sacrement du pardon. C’est quelque chose de très important dans mon existence, même si maintenant je me confesse plus souvent que je ne …
Resurection
Etes-vous un cardinal heureux ?
Le moment où j’ai été le plus heureux dans ma vie de prêtre est lorsque j’étais curé de Boissy-Saint-Léger. Maintenant, j’exerce d’autres charges. J’ai de gros dossiers, des responsabilités… parfois lourdes, mais chacun doit mener son combat, accomplir sa mission. Le principal est de rester tout petit devant le Seigneur, de garder chaque jour le temps du silence …Plus
Etes-vous un cardinal heureux ?
Le moment où j’ai été le plus heureux dans ma vie de prêtre est lorsque j’étais curé de Boissy-Saint-Léger. Maintenant, j’exerce d’autres charges. J’ai de gros dossiers, des responsabilités… parfois lourdes, mais chacun doit mener son combat, accomplir sa mission. Le principal est de rester tout petit devant le Seigneur, de garder chaque jour le temps du silence et de la prière. L’essentiel est, pour moi, d’être un témoin du Christ et de garder une âme missionnaire. J’aime voir l’Eglise qui vit au souffle de l’Esprit !
Resurection
L’Eglise ne pourrait-elle pas être plus tolérante ?
Tolérante ? C’est un mot très insuffisant ; elle doit être aimante, servante, fervente… Si vous pensez au mariage des prêtres, savez-vous que Benoît XVI a posé cette question dès son premier synode, en 2005 ? Celui qui s’est montré le plus opposé, c’était le patriarche Sfeir, du Liban, qui a expliqué : “Justement, chez nous, les maronites …Plus
L’Eglise ne pourrait-elle pas être plus tolérante ?
Tolérante ? C’est un mot très insuffisant ; elle doit être aimante, servante, fervente… Si vous pensez au mariage des prêtres, savez-vous que Benoît XVI a posé cette question dès son premier synode, en 2005 ? Celui qui s’est montré le plus opposé, c’était le patriarche Sfeir, du Liban, qui a expliqué : “Justement, chez nous, les maronites, les prêtres peuvent se marier. Alors, quand il y a eu la guerre, tous ceux-là sont partis avec leur femme et leurs enfants. Personne ne va le leur reprocher, mais seuls sont restés les prêtres entièrement consacrés à la communauté.” Et de conclure : “Ne bradez pas ce trésor.” Ces arguments venant d’un patriarche catholique ont beaucoup frappé l’assemblée.
Sans doute y aurait-il moins de prêtres homosexuels ?
Le problème n’est pas là. Dans le clergé comme dans toute la société, il y a des personnes qui ont des désirs homosexuels et d’autres non. Tous les prêtres se sont engagés à vivre la chasteté dans le célibat. C’est difficile, cela requiert une grande exigence. En fait, la gestion des désirs de son propre corps, quel que soit son état de vie, est toujours délicate. Se donner dans le célibat, c’est un engagement à vivre comme Jésus, lui qui, à chaque messe, nous dit : “Ceci est mon corps livré pour vous.” Bien sûr, cela ne fait pas pour autant oublier sa sexualité.
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Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, m’a écouté, même s’il n’est pas d’accord avec moi”
Vous éludez le testament moral du cardinal Martini, décédé le 31 août, pour qui l’Eglise aurait deux cents ans de retard…

Pas du tout ! Il est quand même permis de se poser des questions sur une interview publiée après sa mort. Mais je vous dirais qu’en 2005, novice au conclave, je l’avais consulté …Plus
Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, m’a écouté, même s’il n’est pas d’accord avec moi”
Vous éludez le testament moral du cardinal Martini, décédé le 31 août, pour qui l’Eglise aurait deux cents ans de retard…

Pas du tout ! Il est quand même permis de se poser des questions sur une interview publiée après sa mort. Mais je vous dirais qu’en 2005, novice au conclave, je l’avais consulté et il m’avait longuement parlé de l’Eglise et du Vatican, qu’il connaissait évidemment beaucoup mieux que moi. Il voulait que l’Eglise se réveille, et il avait raison. A Milan et dans nos grandes villes européennes, les églises sont vides ! L’Europe a besoin d’une nouvelle évangélisation ; c’est justement le thème du synode qui commence dans quelques jours. Mais quand je lui avais parlé du dynamisme de l’Eglise à Madagascar, il était bien au courant, je vous assure ! Certes, des pans de l’Eglise se sont effondrés, mais en même temps, des phénomènes nouveaux, enthousiasmants, dont je suis le témoin direct à Lyon, apparaissent partout. Chez nous, des jeunes entre 18 et 25 ans sont capables, à la fin du mois d’août, de sacrifier, quatre années de suite, une semaine entière de leurs vacances pour vivre des “Labos de la foi”. Ils mesurent l’exigence que cela demande d’être chrétien et ils veulent qu’on leur donne “l’équipement” dont ils auront besoin pour être de vrais témoins du Christ. Le cardinal Martini évoquait aussi le décorum. Paul VI l’avait déjà allégé, et il y a encore beaucoup à simplifier, mais qu’on n’oublie pas la beauté à laquelle tout le monde a droit. Je crois que la plus belle messe à laquelle j’ai participé, dans ma vie, a été celle de Benoît XVI aux Invalides, le 13 septembre 2008 devant le plus éblouissant monument civil de Paris, avec une esplanade archi pleine. Cela demeure à jamais gravé dans nos mémoires et chaque fois que je repasse devant les Invalides, j’y pense, je revois cette messe magnifique.
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Rome va fêter les 50 ans de l’ouverture du concile Vatican II, le 11 octobre 2012. Quel bilan en tirez-vous ?
Jean XXIII avait demandé de dépoussiérer l’Eglise et de faire remonter au jour des trésors oubliés. Il y avait vraiment besoin de ce renouveau : la liturgie, la responsabilité des laïques, la vie et le rôle des prêtres et des évêques, notre collaboration… tout cela a profondément …Plus
Rome va fêter les 50 ans de l’ouverture du concile Vatican II, le 11 octobre 2012. Quel bilan en tirez-vous ?
Jean XXIII avait demandé de dépoussiérer l’Eglise et de faire remonter au jour des trésors oubliés. Il y avait vraiment besoin de ce renouveau : la liturgie, la responsabilité des laïques, la vie et le rôle des prêtres et des évêques, notre collaboration… tout cela a profondément changé. Il avait aussi demandé de travailler à l’unité entre les chrétiens, au dialogue avec les autres religions. Que de progrès dans ces domaines ! Il y a désormais une relation fraternelle avec les orthodoxes, l’Eglise arménienne, les protestants. A Lyon, nos rapports sont si bons avec la communauté anglicane que nous lui prêtons une église pour célébrer son office. L’œcuménisme et le dialogue interreligieux ont fait des bonds extraordinaires. Ici, nos relations avec les juifs et les musulmans sont exceptionnelles. Cette semaine, d’ailleurs, je vais aller prier pour la fête de kippour à la synagogue, où le grand rabbin m’accueille toujours avec une vraie amitié. Mais il n’y a pas que dans le Rhône que ce dialogue est merveilleux. Autre avancée majeure du concile Vatican II, et j’aurais dû la mettre en tête : les catholiques ont enfin trouvé le goût de la parole de Dieu. La Bible, naguère, leur paraissait quelque peu hermétique, elle est maintenant ouverte par tous et elle a réveillé notre foi.
Resurection
Dans une France qui a voté, en 1905, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, quand vous réagissez, ça résonne !
Un chrétien est un citoyen ; il a donc le droit de donner son avis sur les grandes questions de société. Cela, tous les gouvernements le reconnaissent, et ils consultent toujours les différents courants de pensée au moment d’élaborer une nouvelle loi. Le prêtre que je suis s’implique …Plus
Dans une France qui a voté, en 1905, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, quand vous réagissez, ça résonne !
Un chrétien est un citoyen ; il a donc le droit de donner son avis sur les grandes questions de société. Cela, tous les gouvernements le reconnaissent, et ils consultent toujours les différents courants de pensée au moment d’élaborer une nouvelle loi. Le prêtre que je suis s’implique dans la vie, le bien des enfants, des vieillards ou des malades. Je m’engage régulièrement au sujet des immigrés, du chômage et, en particulier ces dernières semaines, des Roms… Bref, comme l’affirme le concile Vatican II, les grandes préoccupations de notre temps résonnent dans le cœur de tout croyant. C’était vrai pour moi lorsque j’étais vicaire dans la banlieue, et c’est toujours aussi vrai maintenant. Bien sûr, ça n’a pas le même écho. Aujourd’hui, il m’arrive souvent de dialoguer avec des responsables et je m’exprime librement. Je ne crains pas de les mettre en garde et d’expliquer ce qui me paraît important ou dangereux. Libre à eux de m’écouter. Quand j’ai reçu récemment le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, contrairement à ce qui a été dit, nous avons surtout longuement évoqué la situation des Roms, puis la laïcité, et enfin il m’a interrogé sur le mariage entre deux personnes de même sexe. Et il m’a écouté, même s’il n’est pas d’accord avec moi.
Autre sujet de polémique : la liberté de la presse…
Bien sûr, je suis pour. Critiquer, envoyer des piques, c’est assez sain. J’ai souri en regardant ma propre caricature dans “Le Canard enchaîné”. Pourquoi s’en offusquer ? Mais faire un film uniquement pour blesser des croyants, c’est inadmissible. Et quand on voit qu’en une semaine cela a entraîné la mort de 30 personnes, disons-le clairement, c’est criminel. Je suis pour la liberté de la presse, mais pas au prix du sang !
Resurection
. Eminence, revenons sur la polémique au sujet du mariage homosexuel qui a déchaîné les passions…
Cardinal Barbarin
. J’ai expliqué la rupture de société que représenterait le mariage de deux personnes du même sexe. En mesurons-nous bien les conséquences ? Je ne sais pas si j’ai choisi de bons exemples, l’autre jour, car certains mots ont blessé et ont créé un tel “buzz” que ce que je voulais …Plus
. Eminence, revenons sur la polémique au sujet du mariage homosexuel qui a déchaîné les passions…
Cardinal Barbarin
. J’ai expliqué la rupture de société que représenterait le mariage de deux personnes du même sexe. En mesurons-nous bien les conséquences ? Je ne sais pas si j’ai choisi de bons exemples, l’autre jour, car certains mots ont blessé et ont créé un tel “buzz” que ce que je voulais dire n’a pas été entendu. Pourtant, on peut poser la question de savoir comment on répondra aux demandes qui viendront ou qui apparaissent déjà : “Pourquoi toujours deux ? Nous, nous voulons nous marier à trois, à quatre.” Comment vont répondre ceux qui ont promis “le mariage pour tous” ! Lorsque des repères majeurs de la société disparaissent, on ne sait plus comment se situer. Mais revenons à la question telle qu’elle se pose aujourd’hui, c’est là le fond du problème.
On nous dit que cette loi est indispensable au nom de l’égalité. Mais a-t-on bien compris qu’elle va créer de nouvelles inégalités ? Qu’est-ce qu’on répondra à un enfant qui dira : “Pourquoi, moi, j’ai deux papas et pas de maman ?” Et quand sur le livret de famille, on verra écrit “Parent 1, Parent 2”, beaucoup diront : “Attendez, moi, je ne suis pas le parent 1, je suis la maman !” Ce n’est pas l’enseignement de la morale chrétienne ; il en va de l’équilibre de nos vies et de nos familles. Ce projet suscite d’ailleurs de grandes oppositions chez les juifs (je pense notamment à la déclaration de M. Joël Mergui, président du Consistoire) et chez les musulmans (à celle de M. Tarek Oubrou, imam de Bordeaux) et aussi chez certaines personnes homosexuelles qui m’ont envoyé des messages très touchants, ces jours derniers. Nous, responsables chrétiens, juifs et musulmans de Lyon, avions signé en 2007 une déclaration rappelant cette vérité simple et fondamentale pour toutes les cultures et les civilisations : le mariage, c’est l’union d’un homme et d’une femme. Si on modifie ce pivot, ce sera la source de profonds déséquilibres. Le “mariage pour tous” aura de lourdes conséquences : il ne s’agit pas là seulement d’un vote pour satisfaire le désir de quelques-uns, mais d’une redéfinition majeure de notre vie en société… Un Parlement qui change ce fondement doit mesurer ce qu’il fait et savoir que c’est tout un peuple qui aura à en assumer les conséquences.