Une étoile errante dans un ciel obscur. Par le théologien Ronald L Conte Jr

Ceci est une traduction d’un article de Ronconte du 4 octobre 2023

L’archevêque Carlo M. Vigano a publié un discours qu’il avait l’intention de prononcer lors de la conférence Catholic Identity à Pittsburgh le 1er octobre 2023. Mais son discours et son apparition ont été « supprimés » du programme, explique-t-il. Voici donc la publication de son discours, qu’il appelle Vitium Consensus, c’est-à-dire vice de consensus. Dans ce discours, il s’oppose à la position de l’évêque Athanasius Schneider sur l’acceptation pacifique universelle d’un pape comme un signe clair que le pape est valide. Vigano se réfère donc à ce type particulier de « consensus » comme s’il était corrompu.

Mgr Athanasius Schneider : « Il n’existe aucune autorité pour déclarer ou considérer un pape élu et généralement accepté comme un pape invalide. La pratique constante de l’Église rend évident que même dans le cas d’une élection invalide, cette élection invalide sera de facto guérie par l’acceptation générale du nouvel élu par l’écrasante majorité des cardinaux et des évêques ». [L’article de Schneider | Critique de RonConte]

La doctrine habituelle de l’acceptation pacifique universelle du pape (APU) est basée sur l’Église dans son ensemble – évêques, autres membres du clergé, religieux, laïcs – d’un pape en tant que véritable successeur de Pierre. Cependant, je suis d’accord avec Mgr Schneider sur le fait que l’acceptation d’un pape par le corps des évêques suffise à prouver que le pontife romain est valide. La raison que je donnerais est que l’Église est toujours nécessairement apostolique et indéfectible. Il n’est donc pas possible que le corps des évêques, successeurs des apôtres, s’égare en suivant un faux successeur ou un successeur invalide ou hérétique de Pierre (ou prétendu successeur de Pierre). Si cela se produisait, l’Église perdrait son caractère apostolique, ce qui n’est pas possible, et perdrait son indéfectibilité, car le Chef visible de l’Église, Vicaire du Christ, et pierre de fondement de l’Église se serait égaré avec le corps des successeurs des autres Apôtres. Dieu ne permet pas que les portes de l’enfer l’emportent sur l’Église de cette manière ou de toute autre.

La version habituelle de l’APU du Pape repose sur le corps des fidèles, incluant le clergé, comme témoin de la validité du pontife romain. Ceci est aussi vrai, puisque l’indéfectibilité de l’Église empêche le corps des fidèles, même si ce corps devait être considéré séparément des évêques, de s’égarer. Car l’Église ne peut jamais être les bergers sans un troupeau, ni un troupeau sans les bergers. Par conséquent ni le corps des évêques, ni le corps des fidèles ne peut s’égarer en suivant un pape faux, invalide ou hérétique.

Le Cardinal Billot, enseignant sur le sujet, souvent cité, comme suit:

«Enfin, quoi que vous pensiez encore de la possibilité ou de l’impossibilité de l’hypothèse susmentionnée [d’un Pape tombant dans l’hérésie], on doit au moins tenir fermement, comme absolument inébranlable et hors de tout doute, ceci : l’adhésion de l’Église universelle est toujours à elle seule le signe infaillible de la légitimité de la personne du Pontife, et donc de l’existence de toutes les conditions requises à cette légitimité. Et la raison de ceci n’est pas à chercher au loin. Elle se prend en effet immédiatement de la promesse et de la providence infaillibles du Christ : Les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre Elle. Ce serait en effet la même chose, pour l’Église, d’adhérer à un faux Pontife que d’adhérer à une fausse règle de foi puisque le Pape est la règle vivante que l’Église doit suivre en croyant, et de fait suit toujours. Dieu peut permettre que, parfois, une vacance au Siège apostolique se prolonge pendant longtemps. Il peut aussi permettre qu’un doute surgisse sur la légitimité de telle ou telle élection. Il ne peut cependant permettre que toute l’Église admette comme pontife celui qui ne l’est pas vraiment et légitimement.» […]

« Par conséquent, à partir du moment où le Pape est accepté par l’Église et uni à elle comme la tête l’est au corps, il n’est plus permis de douter d’un éventuel vice d’élection ou d’une éventuelle absence de toute condition nécessaire pour la légitimité. Car l’adhésion de l’Église susmentionnée guérit à la racine toute faute dans l’élection et prouve infailliblement l’existence de toutes les conditions requises. » [voir notre liste sur l’APU]

Notez que l’acceptance de l’Église (ou du corps des évêques) « guérit à la racine » tout problème avec l’élection papale. Cela contourne et invalide tous les arguments ou prétentions au sujet de l’élection papale. Personne ne peut saper l’autorité d’aucun véritable pape en racontant des histoires ou en faisant des accusations au sujet d’un conclave, ce qui est une chose relativement simple pour les schismatiques malhonnêtes. C’est un fait dogmatique que le Pape François est le pontife romain, le vrai successeur de Pierre, parce qu’il a été accepté par le corps des évêques et par le corps des tous les fidèles.

La doctrine de l’APU ne requiert pas l’adhérence de chaque évêque, puisque des douze apôtres, l’un nommé Judas a trahi le Christ. C’est le corps des évêques qui démontre qu’un pape est valide par son obéissance au pape, par son acceptation de ses décisions sur la doctrine et la discipline, et par sa coopération avec lui tant comme confrère évêque que comme chef des évêques et chef de l’Église. De la même manière, la doctrine ne requiert pas une adhérence de chaque membre du corps des fidèles. C’est le corps des évêques qui montre la validité d’un pape comme successeur de Pierre, en acceptant qu’il est le vrai pape. Car l’Église ne peut pas perdre son indéfectibilité, ni son caractère un, saint, catholique et apostolique. L’unité des évêques comme corps, et les fidèles comme corps, est donc garanti par la grâce de Dieu, par les oeuvres du Saint Esprit (qui est l’âme de l’Église).

L’archevêque Vigano rejette cette doctrine de l’acceptation pacifique universelle, qu’elle se base sur le corps des évêques ou le corps des fidèles:

Vigano: « En 1378, après l’élection du pape Urbain VI, la majorité des cardinaux, des prélats et du peuple a reconnu Clément VII comme pape, même s’il était en réalité un antipape. Treize des seize cardinaux ont remis en question la validité de l’élection du pape Urbain en raison des menaces de violence de la part du peuple romain contre le Sacré Collège, et même les quelques soutiens d’Urbain ont immédiatement rétracté son élection, invoquant un nouveau conclave à Fondi qui élit l’antipape Clément VII. Même Saint Vincent Ferrier était convaincu que Clément était le véritable pape, tandis que Sainte Catherine de Sienne se rangeait du côté d’Urbain. Si un consensus universel était un argument indéfectiblement valide pour la légitimité d’un pape, Clément aurait eu le droit d’être considéré comme vrai pape, à l’inverse d’Urbain. L’antipape Clément fut battu par l’armée d’Urbain VI à la bataille de Marino en 1379 et transféra son siège à Avignon, menant au schisme d’Occident, qui dura trente-neuf ans. Ainsi nous voyons que l’argument de l’acceptation pacifique universelle ne survit pas au test de l’histoire; »

L’histoire est sujette aux distorsions et aux mauvaises interprétations. Donc le test d’une doctrine n’est pas historique, mais doctrinal. La doctrine est bien attestée dans les sources de l’Église. Voir notamment cette liste utile [éditée et complétée: Acceptation Pacifique Universelle d’un Pape ]

De plus, la doctrine de l’APU se base sur le dogme de l’indéfectibilité de l’Église, le dogme des caractères essentiels de l’Église comme une, sainte, catholique (universelle) et apostolique, ainsi que les dogmes du charisme papal de vérité et de foi ne défaillant jamais. C’est le corps des évêques, ou le corps des fidèles (considéré ensemble ou même sans les évêques) devaient s’égarer en suivant un pape faux, invalide ou hérétique, alors les dogmes du dessus serait faux, ce qui n’est pas possible. Un pape est certainement valide et vrai successeur de Pierre s’il est accepté par le corps des évêques ou le corps des fidèles. Si les conditions historiques et la durée de temps qui s’est écoulée depuis rend difficile de les établir avec certitude, alors n’importe lequel des deux constitue une preuve suffisante, étant donné qu’ils se basent sur les enseignements dogmatiques. Si les conditions historiques ou le temps qui s’est écoulé rend difficile pour nous aujourd’hui de déterminer l’acceptation par le corps des évêques ou par le corps des fidèles, cela n’invalide pas un pape passé, et certainement pas dans le cas d’un pape clairement établi comme pape valide par l’Église dans les années qui suivirent.

Vigano détourne l’histoire en affirmant la chose suivante: « En 1378, après l’élection du pape Urbain VI, la majorité des cardinaux, des prélats et du peuple a reconnu Clément VII comme pape, même s’il était en réalité un antipape. » Notez que le nombre de cardinaux n’est pas pertinent. La plupart ou tous les cardinaux seront aussi évêques, donc Mgr Athanasius Schneider dit « cardinaux et évêques ». Mais la base doctrinale est que les évêques sont les successeurs des apôtres (un prêtre qui devient cardinal, par exemple le cardinal Dulles, n’est pas un successeur des apôtres). Donc une majorité d’évêque est impertinente. J’aimerais aussi noter qu’historiquement, les papes étaient communément élus par un conclave de cardinaux, donc le fait qu’une majorité accepte le pape pour qui une majorité a voté n’est pas une preuve. Vigano dit « prélats », au lieu d’évêques, et c’est aussi impertinent. Le corps des évêques, menés par le pape, est le Collège Apostolique, qui est indéfectible.

En plus de cela, l’antipape Clément VII a nommé 19 cardinaux afin de se donner lui-même la majorité des cardinaux dont parle Vigano. Mais les cardinaux créés par un antipape ne sont pas valides. Il est absurde d’utiliser le nombre de cardinaux créés par un antipape dans un quelconque argument concernant la validité papale. Un antipape pourrait en théorie nommer 100 cardinaux, et cela ne prouverait rien pour autant (excepté l’invalidité des cardinaux en question).

Il est donc simplement historiquement erroné de prétendre que la plupart des gens (les fidèles) ont accepté l’antipape Clément VII. Tout le monde savait que le pape Urbain VI était encore en fonction, et les fidèles savent ne pas accepter un nouveau pape lorsqu’un pape précédent est encore en fonction (ni résigné, ni mort). En fait, Urbain dirigeait depuis Rome, et le peuple savait que le pape est l’évêque de Rome. Il est vrai que les papes peuvent diriger depuis d’autres endroits, comme cela est arrivé à certaines périodes. Mais le pape actuel dirigeant depuis Rome rend évident pour les fidèles qu’il ne faut pas accepter un nouveau pape proclamé et élu par une fraction de cardinaux, à l’inverse d’un conclave complet. Clément VII a un certain soutien politiquement, puisque les papes de l’époque étaient impliqués en politique et même la guerre. Mais un soutien politique n’accorde pas l’APU.

Peu importe si Urbain VI était populaire ou non. Ce qui compte c’est qu’il était accepté par le corps des évêques et le corps des fidèles. Car il était l’évêque de Rome, et a régné avant Clément. Ensuite l’antipape Clément VII avait si peu de soutien qu’il fut forcé de fuir de ville en ville. Voilà ce que Wikipédia [anglais]dit au sujet de l’antipape Clément VII, montrant clairement le fait historique que Clément n’était pas accepté par le corps des fidèles:

Robert [Clément VII] fut élu pape à Fondi le 20 septembre 1378 par les cardinaux qui s’opposaient au retour de la papauté depuis Avignon vers Rome, et l’élection du pape Urbain VI dans cette dernière ville. Il choisit le nom de régent Clément VII, et devint le premier de la ligne des « papes » (maintenant comptés parmi les antipapes) du dit schisme d’Occident, le second des deux périodes nommées le Grand Schisme, qui dura jusqu’en 1417. A la suite d’une victoire à Marino par les troupes d’Urbain VI, Clément, se sentant vulnérable, prit la fuite depuis Anagni vers Sperlonga, puis Gaeta, arrivant enfin à Naples. Reçu avec grand respect par la Reine Joanna I de Naples, Clément se trouva assailli par la population locale qui chantait « Viva Papa Urbano » et « Muoia l’Anticristo » . Il considérait Naples dangereuse et prit la fuite vers Avignon, en France, accueilli par cinq cardinaux.

Le peuple criait à l’antipape Clément VII « longue vie au pape Urbain » et « mort à l’Antichrist » . Clément fut forcé de fuir d’Anagni vers Sperlonga, puis de Gaeta vers Naples, puis à Avignon. Et dans cette dernière ville, il eut le soutien de seulement cinq cardinaux. Le Pape Saint Jean-Paul II voyageait à travers le monde pendant des années, et était accueilli par littéralement des millions de fidèles. Le Pape François voyage aussi beaucoup et est accepté par les fidèles catholiques partout où il va.

Si, comme hypothétique contre-fait, le pape Benoît XVI n’avait pas pris sa résignation, et quelques cardinaux schismatiques avaient élu François, alors il serait un antipape. Mais de fait, Benoît a non seulement pris sa résignation, appelant pour un conclave papal, mais également accepté le pape François comme le vrai pape pendant des années, même jusqu’à la mort.

Vigano prétend que « les quelques soutiens d’Urbain ont immédiatement rétracté son élection, invoquant un nouveau conclave à Fondi » . Faux. Les cardinaux qui ont rompu avec le pape en vigueur, Urbain VI, et le reste des cardinaux et des évêques, étaient ceux qui méprisaient le retour de la papauté à Rome. Urbain n’avait pas « quelques soutiens » , comme le démontre le fait que Clément VII fut chassé par le peuple avec des cris de « longue vie au pape Urbain » et « mort à l’Antichrist » . Vigano prétend: « Si un consensus universel était un argument indéfectiblement valide pour la légitimité d’un pape, Clément aurait eu le droit d’être considéré comme vrai pape, à l’inverse d’Urbain » . Faux. Le rejet du pape Clément par les évêques d’Italie et bien d’autres nations, par les autres cardinaux, et par le peuple, qui allait jusqu’à l’appeler Antichrist, démontre que Clément n’avait pas l’APU, tandis que le pape Urbain l’avait.

Dans tous les cas, si une situation historique, du point de vue d’un observateur des siècles après, ne révèle pas clairement l’APU, cela peut s’expliquer par le passage du temps et par le manque de documentation au sujet de l’acceptation dans les diocèses et paroisses du monde. Nous n’avons pas à prouver l’APU pour chaque pape passé. Plutôt, c’est une manière pour nous de reconnaître, comme un fait dogmatique, la validité des pontifes romains ainsi que des conciles oecuméniques.

L’archevêque Vigano rejette le Second Concile du Vatican, le nommant « le cancer conciliaire » . Mais tous les diocèses du monde ont accepté Vatican II et ont mis ses décisions doctrinales et disciplinaires en pratique. Les évêques du monde ont de manière continue enseigné les doctrines de Vatican II, et ses décisions et disciplines ont été mises en pratique. Chaque Pape depuis Vatican II a accepté le concile et a enseigné par lui, et les fidèles à travers le monde, en tant que corps, ont accepté Vatican I et Vatican II comme des conciles valides. Le rejet de Vatican II (et même de Vatican I) par certaines personnes aujourd’hui ne contredit pas l’APU, puisqu’il y a toujours certaines personnes dans l’Église dont la foi est si faible qu’ils s’écartent du Seigneur Jésus et de Son Église, lorsque l’Église n’enseigne pas ce qu’ils désirent.

Puisque l’archevêque Vigano rejette la validité du Pape François ainsi que la validité du Second Concile du Vatican, Vigano est un schismatique qui est automatiquement excommunié. Comme le Pape Léon XIII l’a enseigné en Satis Cognitum:

Par où l’on voit clairement que les évêques perdraient le droit et le pouvoir de gouverner s’ils se séparaient sciemment de Pierre ou de ses successeurs. Car, par cette séparation, ils s’arrachent eux-mêmes du fondement sur lequel doit reposer tout l’édifice, et ils sont ainsi mis en dehors de l’édifice lui-même ; pour la même raison, ils se trouvent exclus du bercail que gouverne le Pasteur suprême, et bannis du royaume dont les clés ont été données par Dieu à Pierre seul.

Ronald L Conte Jr. Théologien, Bibliste.
Marie terreur des demons
Tout ce qui est explicité ici sur la doctrine de l'Acceptation Pacifique Universelle est valable pour Jean 23 et Paul6, ce qui ruine de fond en comble l' idéologie sédévacantiste.