Laurier
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De Droit Divin la fameuse BULLE DE PAUL IV Cum Ex Apostolatus ? : ?

De Droit Divin la fameuse BULLE DE PAUL IV Cum Ex Apostolatus ? : ?
(Bulle utilisée par tous les sedevacantistes pour tenter de démontrer juridiquement l'illégitimité des papes de Vatican II.)

Je cite la dernière phrase de la prose à l’abbé Mouraux (cité dans l’article consacré à cette Bulle sur le site FidePost) : « un Pontife perd toute autorité s’il est avéré qu’il a erré dans la Foi avant son élection », et tout l’article vise à nous persuader que cette disposition (d’ailleurs bien peu précise) n’est pas de droit ecclésiastique (décidée par un pape, de manière disciplinaire/pénale, et donc révocable à tout moment par un autre pape : ce qu’a fait le Droit Canon 1917), mais DE DROIT NATUREL ET DIVIN… Donc, donc, donc, eh bien si c’est vraiment de DROIT DIVIN, c’est-à-dire valable pour toute époque, impossible à révoquer, immuable, intemporel, au-dessus des lois ecclésiastiques et des abrogations possibles !, eh bien ça veut dire que cette loi s’applique en premier lieu AU PREMIER PAPE : SAINT PIERRE, qui, comme chacun sait, AVANT son élévation au Souverain Pontificat, a « dévié dans la Foi » ou « erré dans la Foi » en apostasiant publiquement et en reniant sa Foi au Christ, à trois reprises et avec serment ! C’est gravé dans les quatre Évangiles et c’est public. Si on suit la logique du Canon 188, 4° (dont la Bulle de Paul IV serait à l’origine, mais c’est faux), appliqué bêtement, il aurait même perdu IPSO FACTO, IPSO JURE, son Office d’Apôtre ! Donc, toute l’Église Romaine est bâtie sur le tombeau d’un homme qui, en fait, n’aurait jamais été PAPE ! Par suite d’une impossibilité intrinsèque ! « ontologique » ! Un OBEX formel on vous dit ! (dixit LHR)
Ah ! ah ! ah ! Quelle bonne blague nous enseigne ainsi les sedevacantistes qui prennent appui sur cette Bulle pourtant clairement abrogée depuis au moins 1905 avec la Constitution de S. PIE X sur l’élection du Pontife Romain, 1917 avec le Code de Droit Canonique en vigueur, et 1945 avec la nouvelle Constitution de PIE XII…
On va me rétorquer : mais enfin saint Pierre s’est repenti et a regretté sa faute ! OUI, et alors ? Un empêchement, un obstacle intrinsèque, ça reste un « OBEX » (obstacle) et, repentir ou pas, ça ne change rien et ça n’efface pas sa déviation dans la Foi et son Apostasie publique, qui reste un élément gravé pour l’histoire. Tel un jeune homme né hors mariage (enfant illégitime ou d’un foyer acatholique : canons 984 / 987) ne peut devenir prêtre, ou une femme devenir prêtre. Même en étant fervent, bien converti et spirituel. Saint PIERRE a apostasié publiquement AVANT son élévation au Souverain Pontificat : il était donc, selon l’application de cette Bulle prétendument de DROIT DIVIN frappé d’un empêchement à vie… (le canon 983 appelle cela un « empêchement perpétuel, connu sous le nom d’irrégularité »)
Citons cette Bulle de PAUL IV très claire à ce niveau :
le §6 dit uniquement que (je cite) :
Si « AVANT sa promotion et élévation au cardinalat ou au souverain pontificat, déviant de la foi catholique, est tombé en quelque hérésie, sa promotion ou élévation, même si elle a eu lieu dans la concorde et avec l’assentiment unanime de tous les cardinaux, est nulle, sans valeur, non avenue. Son entrée en charge, consécration, gouvernement, administration, tout devra être tenu pour illégitime.
« S’il s’agit du souverain Pontife, on ne pourra prétendre que son intronisation, adoration (agenouillement devant lui), l’obéissance à lui jurée, le cours d’une durée quelle qu’elle soit (de son règne), que tout cela a invalidé ou peut invalidé son pontificat ; celui-ci ne peut être tenu pour légitime jamais et en aucun de ses actes. » (trad. Abbé Mouraux)
Donc, quant au repentir de saint Pierre, ça ne rentre pas en ligne de compte dans cette Bulle de Paul IV…
Mais, citons aussi le §3 précédent plus explicite encore quoique peu souvent cité (trad. La Porte Latine) :
§3 : « En vertu de cette Constitution nôtre valide à perpétuité, par haine d’un si grand crime, le plus grave et pernicieux possible dans l’Église de Dieu, dans la plénitude de notre pouvoir apostolique, Nous décidons, statuons, décrétons et définissons que les sentences, censures et peines susdites gardant toute leur force et leur efficacité, avec leurs effets, tous et chacun des Évêques, Archevêques, Patriarches, Primats, Cardinaux, Légats, … qui à ce jour, comme il est déclaré ont dévié et sont tombés dans l’hérésie ou ont encouru le schisme, ont été pris à les susciter ou les commettre, qu’ils soient pris sur le fait, qu’ils avouent ou qu’ils en soient convaincus, vu que leur crime les rend plus inexcusables que les autres, OUTRE les sentences, censures et peines susdites, seront par là-même, sans aucun recours au droit ou au fait, privés perpétuellement [définitivement] de leurs églises cathédrales, métropolitaines, patriarcales, primatiales, de leur dignité cardinalice, de toute charge de Légats… Par ailleurs, tous ces gens seront considérés comme INAPTES ET IMPROPRES à de telles fonctions (perpetuo privati, et ad illa de cetero inhabiles, et incapaces), comme des relaps et des subversifs, en tout et pour tout, comme s’ils avaient abjuré publiquement une telle hérésie [relaps] ; JAMAIS, à AUCUN MOMENT, ils ne pourront être restitués, replacés, réintégrés et réhabilités en leur précédent état…, en leur dignité cardinalice, ou quelque autre dignité majeure ou mineure, en leur voix active ou passive, en leur autorité… ; bien plus, ils seront abandonnés à la décision du pouvoir séculier pour subir leur juste punition, à moins que, montrant les signes d’un vrai repentir et les fruits d’une pénitence proportionnée, ils ne soient, par bonté et clémence du Saint-Siège lui-même, relégués dans quelque monastère ou autre lieu régulier, pour s’y livrer à une pénitence perpétuelle, nourris du pain de la douleur et abreuvés de l’eau de l’affliction. Ils seront considérés, traités et réputés comme relaps et subversifs par tous, de quelque état, rang, ordre, condition et prééminence qu’on soit, et de quelque dignité, même épiscopale, archiépiscopale, patriarcale, primatiale ou autre dignité ecclésiastiques même la dignité cardinalice… : comme tels, on devra les éviter et les priver de toute consolation humaine. »

Vous avez bien lu : pas de quartier ! Vous avez dévié de la Foi catholique ? Dommage pour vous, car les conséquences sont à vie… et l’infamie à perpétuité… Pauvre Saint Pierre, lui qui avait une si haute dignité en tant qu’Apôtre, par sa déviation et son reniement, son schisme, il perd tout et c’est irrémédiable, selon les termes de cette Bulle, si bien-sûr elle était vraiment de droit divin…
C’EST CLAIR : repentir ou pas, ça ne change rien : il suffit qu’il ait dévié de la Foi catholique (qui en jugera ???) une seule fois, AVANT son élévation, pour être définitivement et totalement exclu, d’une élévation au cardinalat ou au souverain pontificat… POINT FINAL. C’est net et sans appel…
DONC, si l’on suit cette Bulle qui serait de « droit divin » (selon certains sedevacantistes) et donc valable à toute époque, saint Pierre ne pouvait être vrai Pape, étant frappé par cette impossibilité intrinsèque et « ontologique » !!! Lui aussi avait un « obex »… étant considéré du coup comme « perpétuellement inapte et incapable » (perpetuo privati, et ad illa de cetero inhabiles, et incapaces).
Alors, OUI, c’est « totalement débile » de venir nous dire que cette Bulle est de « droit divin », la preuve du contraire est clairement établie ! à moins d’être de mauvaise foi.
De toutes manières, aujourd’hui, selon le droit canon 1917, aucun siège épiscopal légitimement conféré n’est perdu d’une autre manière que pour les 4 causes listées au canon 430 que vous êtes prié de lire et de suivre ! « § 1 Le siège épiscopal devient vacant par la MORT de l’évêque, par sa RENONCIATION ACCEPTÉE par le Pontife romain, par sa TRANSLATION ou par la PRIVATION du siège intimée à l’évêque. » Et aucune n’a trait à une perte d’office ipso facto, ipso jure ! Ca n’existe pas pour les membres de la Hiérarchie catholique : seulement pour les simples clercs, quelque soit leur office. Il faut obligatoirement que le Siège soit retiré à l’évêque par un acte du souverain Pontife. SEUL le pape légitime peut faire OU défaire la hiérarchie. Les membres de l’Église enseignée n’ont pas leur mot à dire, ni de porter des jugements sur la hiérarchie (même pour crime d’hérésie) car « leur incompétence est ABSOLUE » (canon 1558). Cf. PIE XII sur mon précédent post. « Aucune autorité autre que celle du Pasteur suprême, ne peut invalider l’institution canonique donnée à un évêque. » (Ad Apostolorum principis). C’est clair ! Dans le même ordre d’idée, canon 2227 §2 : « A moins d’être expressément nommés, les cardinaux ne sont compris sous aucune loi pénale, ni les évêques sous les peines ‘latae sententiae’ de suspense ou d’interdit. » C’est clair ! Dom Gréa, le D.T.C. enseignent la même chose.

Je précise que le cardinal Roncalli était évêque titulaire Patriarche de Venise, et le cardinal Montini, archevêque de Milan, (traditionnellement, il s’agit là de deux Sièges cardinalices) par la grâce de Pie XII, l’un comme l’autre… Non déposés canoniquement, non démissionnaires… Non excommuniés non plus au demeurant, et même sans aucune monition à leur encontre pour cause d’hérésie !… Les « déchoir » IPSO FACTO après-coup pour les besoins de la cause sedevacantiste, sur la base d’une analyse personnelle (thèse) non confirmée par une autorité (donc sans aucune fiabilité ni certitude), et sans aucun appui sur la loi en vigueur bien comprise (sinon sur une Bulle abrogée dont les dispositions ne sont clairement pas de droit divin), est une conclusion irrecevable. Petit rappel historique annexe : « C’est grâce à l’appui du cardinal Ottaviani, l’homme le plus puissant au sein du Collège des cardinaux, que Roncalli fut finalement élu… » (dixit Carlo Regazzoni)

Vous pouvez m’expliquer par quel tour de passe-passe les cardinaux établis par PIE XII qui se sont réunis en conclave fin 1958 en suivant sa Constitution sur l’élection du Pontife romain, n’étaient pas de vrais cardinaux : ? Ou que le conclave n’était pas un vrai conclave : ? Ou que le pape ainsi élu et qui plus est reconnu tel par l’Église universelle sans aucune exception, AVANT même la clôture de Vatican II (1958, 1963) n’était finalement pas pape ? Par quelle loi en vigueur dans l’Église vous arrivez à une telle conclusion ? L'Acceptation pacifique de l'Église Universelle (tout le corps épiscopal légitime pour le moins) de l’élu d’un conclave régulier est un FAIT DOGMATIQUE qui oblige de FOI, et ce n'est pas là une "opinion de théologiens" car étant connexe au dogme, nier la légitimité d’un tel Pape revient ici à nier l'indéfectibilité de l'Église (toute la hiérarchie de juridiction s'unissant à un faux chef, donc à une fausse règle de la Foi), comme l'affirme PIE IX dans ETSI MULTA LUCTUOSA.
A la mort de PIE XII, toute la hiérarchie constituée par lui était alors vraie et légitime, canoniquement érigée, et ayant une juridiction au for externe clairement établie. Les traditionalistes n’existaient même pas ! Même chose pour tous les cardinaux et pour tous ceux qui ont été convoqués au conclave de 1958 : non démissionnaires et non déposés canoniquement (seuls cas d’exclusion), ils avaient tous le droit de voter et d’être élus (=canon 160 =constitution de PIE XII de 1945). Nier cela, c’est faire un déni de réalité… et aboutir pour finir à nier un fait dogmatique ce qui est « un péché grave contre la Foi » !… Theological Notes

BREF, plus sérieusement, pour les catholiques qui cherchent la vérité sur la question, je conseille la lecture de plusieurs titres sur la question :
— « Une Bulle de Paul IV et la tyrannie pontificale ». Article qui démontre que cette Bulle n’était pas de Droit Divin ! « C’était la loi du temps…. » explique-t-il, et qu’elle n’a plus cours… On peut lire cet article sur le site liberius.net. C’est un extrait de l’ « Histoire universelle de l’Église catholique » de l’abbé Rohrbacher, tome 11.
— De Joseph Chantrel : « Paul IV et la tyrannie papale » (1818-1884. Édition de 1870. Paris, Victor Palmé éditeur, pp. 73-74.).
Qui démontre, là encore, que cette Bulle n’est absolument pas de Droit Divin ! Ce qui d’ailleurs était justement soutenu par les anti-infaillibilistes justement pour démontrer que le pape s’était trompé et qu’il n’était pas infaillible !! Même cet ouvrage ancien prenant la défense de la Bulle de Paul IV dans les polémiques précédant le dogme de l’Infaillibilité Pontificale, admet volontiers que : « Dans toute la Bulle de Paul IV, il n’est question que des peines à appliquer aux hérétiques et aux schismatiques ; il n’y a pas une seule définition en matière de foi ou de mœurs ; il ne s’agit absolument que du pouvoir juridictionnel du Pape : pourquoi, encore une fois s’en servir contre l’infaillibilité doctrinale du Souverain Pontife ? » — Livre téléchargeable sur Books.Google…
— Et enfin, dernier en date (2019) et non des moindres, mais en italien seulement pour l’instant, écrit par Massimo Firpo et Germano Maifreda : « L’eretico che salvò la Chiesa [L’hérétique qui sauva l’Église] /Il cardinale Giovanni Morone e le origini della Controriformaun » : énorme volume de plus de 1000 pages sur justement l’affaire du cardinal Morone et de Paul IV incluant la question de sa fameuse Bulle. Cet ouvrage est résumé et présenté dans le dernier numéro 69 de la revue SODALITIUM téléchargeable gratuitement sur leur site : (pages 51 et suivantes ; revue pourtant sedevacantiste mais contre cet argument ). Le cardinal Morone qui fut en effet accusé d'hérésie, emprisonné même et sous le coup d'un procès pour hérésie par Paul IV, mais qui pour finir fut blanchi, garda toujours son titre de cardinal, failli être élu Pape ! et présida ensuite pour finir le Concile de Trente ! L’ouvrage en italien est présenté aussi sur le site de l’éditeur einaudi.it : ISBN 9788806233570.

BREF encore, il serait bon de remiser définitivement cette BULLE aux archives de l’histoire et d’arrêter d’en faire état comme d’un document encore en vigueur, de droit divin, dans la crise actuelle ! Un tel argument est très faux et pitoyable, "ridicule" selon le terme même du cardinal Joseph Hergenröther en 1876 !

Et pour une étude sur la question encore plus complète, lire ce livret exhaustif de 72 pages (2022) :

« La Bulle de Paul IV dans la crise actuelle »
Bulle de Paul IV