Laurent Deveux
Laurent Deveux

Cardinal Burke : François utilise une rhétorique populiste pour saper la doctrine

Cher Arthur,
Si mon message précédent contient sa part de spéculation ; n’oublions pas que c’est sont certaines des positions principales de l’Anonyme que j’ai ici reprises ; n’oublions pas que nous nous trouvons environ deux siècles avant les apports théologiques du Docteur angélique…
Ceci spécifié, je vous concéderai qu’avec l’étude des saintes Écritures, c’est le creusement de l’immense …Plus
Cher Arthur,

Si mon message précédent contient sa part de spéculation ; n’oublions pas que c’est sont certaines des positions principales de l’Anonyme que j’ai ici reprises ; n’oublions pas que nous nous trouvons environ deux siècles avant les apports théologiques du Docteur angélique…

Ceci spécifié, je vous concéderai qu’avec l’étude des saintes Écritures, c’est le creusement de l’immense legs augustinien qui occupe la principale part de mon existence. Puisque nous ne pouvons raisonnablement, ici-bas, accorder à chaque docteur, à chaque patriarche de notre Église le temps qui leur reviennent pourtant légitimement de droit (1), si nous désirons présenter un minimum de cohérence dans notre démarche, je crois qu’il convient de ne pas trop nous disperser.

Ainsi donc, je n’aurai aucunement la prétention de m’appuyer avec exhaustivité sur le thomisme – dont je ne connais que quelques-uns des grands principes –, ainsi donc, c’est bien la grâce de Dieu, qu’Il nous donne par Sa seule volonté, qui oriente toute mon épistémè, toute ma perception catholique du monde qui m’entoure ; cela, à l’éclairage de la réponse intégrale – soit, ma vie – que je rends à la très Sainte Trinité, dont je sais qu’Elle seule nous sauve ; bref, à l’éclairage de ma foi.

Quand à la dernière question que vous me posez, je vous dirai tout d’abord ne pas considérer le contexte actuel, postconciliaire, comme une crise : par définition, une crise possède un caractère brusque, inattendu…

Or, pour qui prend d’une part, la peine de s’intéresser à la transition entre Jean XXIII et Paul VI ; de l’autre, à la manière dont les grandes lignes présentées (2) par Vatican II – le dialogue ; l’attitude de service ; la quête de sens ; la Constitution Dei Verbum ; la pluriformité de l’Institution ecclésiale dans son unité ; le dialogue œcuménique ; l’image de l’Église ; la vision de l’homme proposée par Gaudium et Spes ; etc. – et ce dont il me semble que le Concile soit complètement passé à côté – le fait que l’Institution ecclésiale y ait beaucoup parlé d’elle, mais beaucoup moins du Christ, que ce concile ait été au fond bien plus humaniste que ce qu’il aurait dû être, soit christologique – ; pour qui prend la peine de s’intéresser à tout cela, il apparaît que s’ils tiennent bien souvent du sacrilège, de la perte de repères, les grands bouleversements que traversent aujourd’hui le nouveau peuple de Dieu consistent pour moi en une formidable opportunité :

- opportunité, pour chacun d’entre nous, de réellement exercer notre discernement en permanence, de nous fier tant à ce que nous inspire le Paraclet qu’à notre amour pour les Père et Fils, à dessein de continuer à évoluer sur la Voie droite ;

- opportunité de savoir intrinsèquement en nos chair et âme quel degré d’intimité nous entretenons avec l’Éternel, de savoir jusqu’ou nous L’aimons, jusqu’à quel point nous sommes aimés de Lui ;

- opportunité de connaître l’étendue de notre foi pour Lui, de Lui rester fidèle dans l’épreuve, de nous servir de cette dernière comme d’un tremplin vers une vie de vertu toujours plus affirmée, de contribuer, avec Son aide, à transformer la souffrance en un promontoire sanctifiant ;

- opportunité de toujours mieux nous revêtir de l’armure de la foi, de nous opposer sans relâche au grand mystère de l’iniquité, de traquer l’hypocrisie dans ses derniers recoins ;

- opportunité de tenir notre âme toujours plus réceptive aux multiples grâces qui nous viennent d’en Haut, comprendre Romains, V, 20 comme une indéniable réalité ;

- opportunité, pour nous, de témoigner au monde, simplement par ce que nous sommes – via nos intentions, nos pensées, nos paroles et nos actions – que le Mal et la tromperie peuvent se déchaîner autant qu’ils le veulent, mais qu’ils finissent toujours par passer, que rien ne peut empêcher la venue du Royaume dont certaines des prémisses nous sont déjà données à être vécues au plus intime de l’intime de nous-mêmes ;

- opportunité de prendre soin de notre prochain, plus souvent qu’à son tour dans l’adversité ;

- opportunité de savoir que nous avons reçu la plus belle des missions : être quoiqu’il nous survienne des disciples, des amis, des compagnons de route de Celui qui nous a tout donné, qui nous donne tout, pour peu que nous nous mettions activement en marche à Ses côtés : notre Seigneur Jésus-Christ.

C’est animé de cette foi notre Seigneur et notre Dieu que je vous salue, cher Arthur.

Laurent

(1) Mais n’en soyons aucunement frustrés : ce que nous n’avons pu étudier et comprendre sur Terre nous sera donné à accomplir dans la Jérusalem céleste ; et cela, pour l’éternité…

(2) Sur lesquelles, par respect pour l’attention que vous m’accordez, je ne m’attarderai pas ici.
Laurent Deveux

Cardinal Burke : François utilise une rhétorique populiste pour saper la doctrine

Erratum : SAINT AUGUSTIN, Cité de Dieu, Livre XIII, 20
Au temps pour moi.Plus
Erratum : SAINT AUGUSTIN, Cité de Dieu, Livre XIII, 20

Au temps pour moi.
Laurent Deveux

Cardinal Burke : François utilise une rhétorique populiste pour saper la doctrine

Je vous en prie.
Outre le fait que le fondement théologique – et a fortiori dogmatique – de la double nature corporelle du pape provienne de ce que chacun des enfants du Seigneur est un des membres de Son Corps mystique – soit l’Église catholique –, outre le fait que nous soyons nous-mêmes constitués (1) d’une personne physique et d’une autre, spirituelle, voici ce que j’ai encore modestement …Plus
Je vous en prie.

Outre le fait que le fondement théologique – et a fortiori dogmatique – de la double nature corporelle du pape provienne de ce que chacun des enfants du Seigneur est un des membres de Son Corps mystique – soit l’Église catholique –, outre le fait que nous soyons nous-mêmes constitués (1) d’une personne physique et d’une autre, spirituelle, voici ce que j’ai encore modestement retenu des principales étapes du raisonnement de l’Anonyme :

Le Roi est persona geminata : les deux personnes du Roi sont l’une ex natura, l’autre ex gratia. L’une, physique, réside dans le caractère propre de l’homme ; l’autre est métaphorique : elle se situe dans l’esprit et la vertu.

Dans la première – la personne physique –, le Fils de l’homme est naturellement individu ; dans la seconde, il est Christ par l’effet de la grâce, c’est-à-dire Dieu-homme. Le Roi est Dieu et Christ par l’effet de la grâce ; ce qu’il fait, il ne le fait « nullement en tant qu’homme ». L’opposition entre personne et fonction est poussée à l’extrême : l’auteur en arrive à affirmer que, dans son humanité, le Christ Lui-même est faible (2). En ce qui concerne les évêques, le point de vue de l’Anonyme est sans conteste anti-théocratique : le roi représente in officio les deux natures du Christ.

Après avoir parlé du roi, notre homme se tourne vers l’évêque, puis en arrive au pape. L’évêque est inférieur au Roi, car il représente le Christ dans sa seule dimension humaine.

Quant au pape, l’Anonyme propose une triple distinction : primo, le successeur de Pierre possède une multiplicité de personnes : le pape possède la personne de souverain pontife et d’homme, mais aussi celle de pécheur. En tant que personne, le souverain pontife, est comme les hommes ; en tant que personne de pécheur, il est au-dessous d’autres hommes – dont certains pèchent moins que lui. En tant que souverain pontife, il ne pèche pas, mais peut remettre les péchés. Comme tel, on doit le vénérer et l’honorer plus que tous les autres hommes et nul ne peut le juger.

Secundo : comme personne humaine, même s’il ne pèche pas, il ne peut remettre les péchés et, comme tel, il doit être vénéré et honoré, mais aussi jugé en tant qu’homme. Comme pécheur, il ne doit être ni vénéré ni honoré, mais jugé comme inférieur aux hommes qui commettraient moins de péchés que lui.

Tertio : il n’est pas juste de révérer et d’honorer de la même manière l’apôtre, l’homicide ou l’adultère ; il est mal de mettre sur le même pied l’ordre très saint du souverain pontife et le crime très scélérat de l’homicide ou de l’adultère.

En conclusion, l’Anonyme nous dit que « Ce n’est pas en tant qu’homme que nous devons lui obéir, parce que l’on ne peut devoir semblable obéissance à un homme. En cas contraire, on devrait cette obéissance à tout homme. » Si l’on doit obéissance au pape, c’est « en tant qu’apostolique, c’est-à-dire comme envoyé du Christ. »

Certes, si la théologie – notamment morale – a continué à évoluer en même temps que les personnes de bonne volonté ; la conception, de l’Anonyme, des personnes physique et supranaturelle du pape nous fait aussi nous rendre compte de l’étendue de l’erreur du présent locataire de la Chaire de Pierre, qui, comme nous le savons, a officiellement supprimé le titre de vicaire – soit d’envoyé, soit de serviteur – du Christ de l’Annuaire officiel du Vatican…

De mon point de vue de catholique ayant la foi intégrale, je considère que le statut de vicaire du Christ constitue le fondement même de tout pontificat qui se respecte. Sans ledit statut, la vie même du chef du Vatican est indigne d’accéder au Repas pascal de l’Agneau et d’être offerte à l’Eglise, dont nous sommes les membres…

Pour que « les âmes des saints trépassés ne trouvent pas pénible la mort qui les a séparées de leurs corps, parce que leur chair se repose dans l’espérance, quels que soient les outrages infligés à cette chair inanimée » (3), il convient d’abord que leur pèlerinage sur la Terre – tant physique que spirituel – ait consisté en la fervente préparation de la comparution de leur âme devant l’Assemblée céleste.

Espérant avoir pertinemment répondu à votre question, espérant ne pas m’être montré trop long, je vous partage, cher Arthur, la paix du Rois des rois.

Laurent

NB : au niveau des références, je puis encore vous citer : Agostino PARAVICINI BAGLIANI, Le corps du pape, trad. de l’italien par C. Dalarun Mitrovitsa, Paris, 1997.

(1) In extenso, le pape devrait être la personne humaine la plus susceptible de transcender ces deux aspects…

(2) Au sens paulinien du terme ; donc que l'homme, tout comme le Christ, se glorifie dans son dénuement ; voir II Corinthiens, XII, 10

(3) SAINT AUGUSTIN, Cité de Dieu, Livre XIII, 19
Laurent Deveux

Cardinal Burke : François utilise une rhétorique populiste pour saper la doctrine

Cher Arthur,
Bien que cette notion soit relativement tombée en désuétude, c’est un auteur – dénommé l’Anonyme de York – qui est, à ma connaissance, le premier à avoir tout particulièrement souligné ce point, au XIe siècle : au niveau pontifical, la distinction entre le corps du vicaire du Christ et le corps de l’homme est défini par rapport à sa personne institutionnelle – la persona papae …Plus
Cher Arthur,

Bien que cette notion soit relativement tombée en désuétude, c’est un auteur – dénommé l’Anonyme de York – qui est, à ma connaissance, le premier à avoir tout particulièrement souligné ce point, au XIe siècle : au niveau pontifical, la distinction entre le corps du vicaire du Christ et le corps de l’homme est défini par rapport à sa personne institutionnelle – la persona papae – s’ajoutant à sa personne physique. Historiquement, cette notion ne peut se voir mise en exergue que s’il y a tension entre la dimension physique du pape et une autre : sa suprapersonnalité, en tant qu’il est donc vicaire du Christ, du Roi des rois, du Dieu fait homme.

Cette dimension est tout particulièrement chargée d’éléments métaphoriques, symboliques et institutionnels. Et c’est là qu’intervient une perspective chronologique précise : depuis la Réforme grégorienne, la persona papae est pensée de plus en plus consciemment comme une suprapersonnalité – absorbant l’institution de l’Eglise –, basée sur le fait qu’il y a et doit inévitablement y avoir une histoire du corps du pape.

En ce sens, il y a une forte similitude avec le monarque temporel. La personne institutionnelle du roi mute également au fil du temps dans une perspective suprapersonnelle. Ainsi donc, les analogies entre pape et roi sont importantes doivent être prises au sérieux, en tout cas pour une histoire comparée de l’idéologie politique du bas Moyen Age et de l’époque moderne.

Ceci étant, si vous en voulez en savoir pus, je ne saurais que vous conseiller la lecture de E. H. Kantorowicz, Les Deux corps du roi : essai sur la théologie politique au Moyen Age, trad., Paris, 1989.

Le Roi des rois, notre Seigneur Jésus-Christ vous garde.

Humblement,

Laurent