@fr.newsS’agissant des paroles «
Mais malheur à l’homme par qui le Fils de l’homme sera trahi : il vaudrait mieux pour lui qu’il ne fût pas né », des commentateurs ecclésiastiques reconnus y ont perçu une parole chargée d’une intense compassion et tendresse à l’endroit du traître apôtre, et visant à graver dans l’esprit de Judas, alors profondément endormi dans le sommeil de la mort spirituelle sous l’emprise de Satan, l’immensité de son crime, en sorte de lui inspirer si possible, à un moment ou un autre, un acte de repentir.
Si ces paroles du doux Rédempteur en présence de Judas eussent par soi-même annoncé sa perte éternelle, il n’eût par suite pas été possible que ce dernier crût encore en la possibilité d’un pardon de Dieu envers son immense crime de trahison, une fois celui-ci consommé à Gethsémani.
Littéralement ces paroles de Jésus peuvent sous-entendre qu’à l’acte de trahison lui-même est attaché un malheur éternel qui rend la non-naissance de Judas préférable à sa naissance. Alors qu’en fait elles ne peuvent signifier véritablement cela.
«
Le désespoir de Judas m’a plus offensé et a été plus pénible à mon Fils que sa trahison même.
L’homme est surtout condamné pour avoir faussement jugé son péché plus grand que ma miséricorde ; c’est pour cela qu’il est puni et torturé avec les démons éternellement. » (Le Père Eternel à Ste Catherine de Sienne, in Dialogue)
«
Mais malheur », ajoute-t-il, « à l’homme par qui le Fils de l’homme sera trahi : il vaudrait mieux pour lui qu’il ne fût pas né ». CES PAROLES font bien voir encore l’ineffable douceur de Jésus-Christ.
Car elles ne renferment pas le reproche et l’invective, mais elles sont l’expression d’un sentiment de compassion, expression toujours contenue, adoucie et voilée. (St Jean Chrysostome, homélie)
Citation de « La grande vie de Jésus-Christ » écrit par Ludolphe le Chartreux au XIXe siècle :
« Notre-Seigneur annonça d'avance la trahison d'un de ses disciples qu'il signala de quelque manière pour trois raisons : premièrement, afin de prouver que lui-même était Dieu, puisqu'il révélait les choses futures dépendantes d'une volonté libre ; secondement, pour montrer qu'il allait souffrir spontanément, puisqu'il aurait bien pu se préserver d'une mort qu'il avait su prévoir ;
troisièmement, pour que le traître abandonnât son infâme dessein en le voyant découvert. Saint Jérôme dit à ce sujet (in cap. XXVI, Matth.) : « Le Sauveur prédit qu'il serait livré par un traître, afin de le porter au repentir en lui faisant comprendre que ses sinistres projets étaient déjà connus ; pourtant il ne le désigna point nommément, de peur que ce reproche manifeste ne le rendit plus audacieux ;
mais il dénonça le crime d'une manière générale, afin que le coupable, se reconnaissant lui-même, revînt secrètement à résipiscence. » — Remarquons ici qu'il y a
quatre moyens de détourner un pécheur du mal, et que, dans son extrême miséricorde,
le divin Maître n'en omit aucun à l'égard de son disciple perfide.
Le premier procédé est d'
inspirer de la confusion pour le crime ; aussi le Seigneur tâcha d'inspirer ce sentiment à Judas, lorsqu'il dit : "un de vous me trahira. Voilà qu'il est à table avec moi".
LE SECOND PROCÉDÉ consiste à corriger par la crainte celui qu'on n'a pu vaincre par la honte ; ainsi Jésus menaça le traître de la damnation en disant : « malheur à l'homme par qui sera livré le fils de l'homme » (matth. XXVI, 24).
Le troisième est de
prodiguer les bienfaits ; le Sauveur ne les épargna pas au coupable qu'il reçut à sa table et dont il lava les pieds.
Le quatrième enfin consiste à
témoigner de l'affection ; c'est ce que fit le Seigneur en disant avec douceur à l'apostat qui le livrait par un baiser :
MON AMI, QU'ES-TU VENU FAIRE ICI ? (Matth. XXVI, 50.) A l'exemple de Jésus-Christ, le pasteur charitable ou supérieur ecclésiastique doit user de condescendance et de bonté envers ses sujets même rebelles, afin de les ramener de leurs égarements autant qu'il dépend de lui. »