Vatican II et le temps de la miséricorde. Frère Louis-Marie.OSB.

N'ayons pas peur de faire bondir, si le concile du Vatican II a donné lieu à un tel acharnement du diable, suscitant à la fois un progressisme apostat et un intégrisme sclérosé , c'est peut-être parce que ce concile est proprement "prophetique" dans le sens où il ouvre une nouvelle époque pour l'humanité, celle d'une vague irrésistible de miséricorde qui se deverse sur l'humanité avant le jour du jugement. Le Seigneur ne disait-il pas quelques années avant VaticanII à Sainte Faustine :

"Aujourd’hui, je t’envoie vers toute l’humanité avec ma Miséricorde. Je ne veux pas punir l’humanité endolorie, mais je désire la guérir en l’étreignant sur mon cœur miséricordieux (…) ; avant le jour de la justice, j’envoie le jour de la Miséricorde » (Sainte Faustine, Petit Journal, 1588)."

A regarder l'histoire récente de l'Église on est frappé pas l' omniprésence du thème de la Miséricorde . Le Sacré Cœur de Jésus, sainte Thérèse de l'enfant jésus, sainte Faustine, le concile Vatican II avec Jean XXIII qui disait en ouverture :
"Aujourd’hui, l’Épouse du Christ préfère utiliser le remède de la miséricorde plutôt que de brandir les armes de la sévérité." ; le pape saint Jean-Paul II qui avait parcouru prophétiquement la route de la miséricorde, « en suivant la doctrine du Concile Vatican II » et poussé par l’exigence de « découvrir dans le Christ encore une fois le visage du Père, qui est miséricordieux et Dieu de toute consolation (…). C'est pour cela qu'il convient maintenant de nous tourner vers ce mystère: les multiples expériences de l'Église et de l'homme contemporain nous y invitent, tout comme l'exigent les aspirations de tant de cœurs humains, leurs souffrances et leurs espérances, leurs angoisses et leurs attentes." ; Pour Benoît XVI, "la miséricorde est en réalité le noyau central du message évangélique, c’est le nom même de Dieu, le visage avec lequel Il s’est révélé dans l’ancienne Alliance et pleinement en Jésus-Christ, incarnation de l’amour créateur et rédempteur." ; et enfin le Pape François qui affirme avec force "que nous sommes dans le temps de la miséricorde."

Résistance au concile et résistance à la miséricorde.

Immédiatement après la promulgation du concile Vatican II à toute l'Eglise, une poche de résistance, petite mais virulente, s'est formée contre l"aggiornamento et les Papes qui l'entérinaient. Il faut remarquer que le gros de la résistance à été francaise, le leader mgr Lefebvre ( on pourrait mentionner dans une moindre mesure l'Abbe de Nantes), avec à sa suite prêtres et laics, venait de France. Ce n'est pas un hasard, la France est le pays du jansénisme. Le père Mateo, apôtre du sacré coeur s'en plaignait souvent: "Les jansenistes, eux, voudraient supprimer l'Evangile de l'amour, ils demandent la justice, comme les Apôtres lorsqu'ils n'avaient pas encore compris la doctrine du Maître. Comme nos pharisiens d'autrefois, nos Jansenistes plus ou moins déguisés, ne peuvent admettre que l'Envoyé du Père , que le Desiré des Prophètes et des nations ait eu la faiblesse impardonnable de ne pas foudroyer ceux qu'ils maudissaient de toute leur ...infâme morale. Ils connaissaient les Écritures, mais pas son esprit."

Il est remarquable que le refus du concile de Vatican II soit fondé principalement sur la liberté religieuse et l'oecuménisme. Malgré les précisions parfaitement orthodoxes du magistère , les resistants continuent de rejeter ces doctrines si consolantes pour les pauvres païens ou autres chrétiens egarés. L'Église catholique seule est la Vérité mais Dieu étend aux païens comme aux chrétiens séparés sa main miséricordieuse, non pour bénir l'erreur mais pour sauver malgré l'erreur. Est-ce nouveau du reste? Non. Le Seigneur donna à sainte Brigitte cette consolante instruction :
« Je fais miséricorde aussi bien aux païens qu’aux Juifs et il n’y a aucune créature en dehors de ma miséricorde, car quiconque pense que ce qu’il croit est la vérité, parce qu’il ne lui a jamais été prêché rien de meilleur, et fait de toutes ses forces ce qu’il peut, sera jugé avec miséricorde. Si rien n’a empêché les infidèles de rechercher le vrai Dieu, ni la difficulté, ni la crainte de perdre l’honneur et les biens, mais seulement un empêchement humain, moi qui ait vu Corneille et le Centurion qui n’étaient pas baptisés être grandement récompensés, je sais qu’ils seront rémunérés comme leur foi l’exige. » (Liv. III, ch. XXVI.)
Ne sommes nous pas en plein Vatican II?

Une tentation courante est celle d’enfermer Jésus dans nos schémas, mais Lui va au-delà, comme nous le rappelle la parabole du bon samaritain : un homme considéré comme hérétique qui accomplit un geste de charité, à la différence du prêtre et du lévite qui voient un homme laissé pour mort par des brigands mais n’interviennent pas. Le samaritain, au contraire, a de la compassion, il s’arrête et il prend soin de cet homme.
Personne n’aime être qualifié de pharisien. Mais en chacun de nous il y a un “docteur de la loi” qui juge le prochain et se sent meilleur que le publicain de service. Nous avons donc besoin d’être corrigés, parfois même d’une façon forte, pour être secoués dans notre dureté. Jésus nous dit à nous tous : «Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux.» (Mt 5, 20). La justice de Jésus est celle de la miséricorde qui arrive à aimer l’ennemi, l'etranger, l'égaré. Elle veut sauver envers et contre tout.

Notre Seigneur nous invite à lire les signes des temps pour savoir reconnaître quand Il vient (cf Lc 12, 54-59). Avec le dernier Concile, l’Église a continué son chemin dans la compréhension de la vérité de la miséricorde de Dieu, comme l’indique saint Jean-Paul II : «En dehors de la miséricorde de Dieu, il n’y a aucune autre source d’espérance pour les êtres humains» (Homélie au Sanctuaire de la Divine Miséricorde à Cracovie, le 17 août 2002).

C'est bien ce que le Seigneur nous dit a travers Sainte Faustine :
« Je désire que le monde entier connaisse ma Miséricorde » (Petit Journal, 687).

« Parle au monde entier de ma bonté et ainsi tu consoleras mon cœur » (Petit Journal, 580).


Regardons ce Concile avec un coeur de chair et non un coeur de pierre, nous le verrons alors tel qu’il est: le concile de la Miséricorde qui ne nous exonère pas de convertir mais qui appelle à la douceur et à la confiance en un Dieu qui n'echouera pas.

PAX. Frère Louis-Marie OSB.