Les catholiques traditionalistes qui comprennent le latin récitent sans broncher le
Pater Noster qui pourtant suggère que le Père du Ciel induise lui-même en tentation. Nonobstant, de même que les catholiques non traditionalistes catéchisés comme il se doit le faisaient par rapport à la précédente traduction, ils ne le disent pas dans l'idée que le Père Céleste puisse être partie prenante dans la tentation , mais ils le récitent selon la pensée du Catéchisme (CEC) dit de Jean-Paul II
***.
Les évêques français ont eu raison de changer cette traduction interchrétienne officialisée en 1966 car celle-ci est trop ambiguë, et ils manifestent ce faisant leur liberté dans l’Esprit par rapport aux frères chrétiens francophones qui, espérons-le, s’inspireront peut-être de leur nouvelle traduction.
Quant à cette version de 1966, rappelons ces quelques faits en citant
cette source :
« B. – Le texte nouveau et les textes anciens
Ni les catholiques ni les protestants ne possédaient de versions qui, par leur ancienneté et leur stabilité, puissent être dites "traditionnelles". Les catholiques ont usé de textes multiples jusqu'au XIXe siècle avancé. (Voir J.-C. Dhôtel, "Note sur les anciennes traductions françaises du "Pater", la Maison-Dieu, 83.) Le texte catholique du XXe siècle a été fixé pour la dernière fois en 1952. L'usage protestant a été plus stable: c'est le texte de la Bible de Segond qui, depuis près d'un siècle, a été généralement utilisé.
Le nouveau texte retient tout ce qui était commun entre les versions actuellement reçues chez les catholiques et chez les réformés, comme on peut en juger en comparant les deux textes (les italiques marquent les changements ou suppressions et les parenthèses marquent les additions):
Texte des catholiques
Notre Père, qui êtes aux cieux,
Que votre nom soit sanctifié,
Que votre règne arrive,
Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour.
Pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons (...) à ceux qui nous ont offensés.
Et
ne nous laissez pas succomber à la tentation,
mais délivrez-nous du mal.
Texte des réformés
Notre Père, qui es aux cieux,
(...) ton nom soit sanctifié,
(...) ton règne vienne,
(...) ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien.
Pardonne-nous nos offenses, comme aussi nous pardonnons (...) à ceux qui nous ont offensés.
Et
ne nous conduis pas dans la tentation, mais
délivre-nous du Malin (ou du mal).
«
Le tutoiement fut d'usage commun dans le Notre Père en français jusqu'au XVIIe siècle. Il a été conservé par les protestants. Les versions bibliques le maintiennent. Il a été adopté pour la prière liturgique en français. L'usage du
Notre Père dans la messe (où il est suivi de la prière "Délivre-nous, Seigneur, du mal..." et sa récitation œcuménique supposent nécessairement l'emploi du tutoiement. »
*** CATÉCHISME DE L'ÉGLISECATHOLIQUE (n. 2846-2849)
VI - " Ne nous soumets pas à la tentation "Cette demande atteint la racine de la précédente, car nos péchés sont les fruits du consentement à la tentation. Nous demandons à notre Père de ne pas nous y " soumettre ". Traduire en un seul mot le terme grec est difficile : il signifie " ne permets pas d’entrer dans " (cf. Mt 26.41), " ne nous laisse pas succomber à la tentation ". " Dieu n’éprouve pas le mal, Il n’éprouve non plus personne " (Jc 1.13). Il veut au contraire nous en libérer. Nous lui demandons de ne pas nous laisser prendre le chemin qui conduit au péché. Nous sommes engagés dans le combat " entre la chair et l’Esprit ". Cette demande implore l’Esprit de discernement et de force.
L’Esprit Saint nous fait
discerner entre l’épreuve, nécessaire à la croissance de l’homme intérieur (Lc 8.13-15) en vue d’une " vertu éprouvée " (Rm 5.3-5), et la tentation, qui conduit au péché et à la mort (Jc 1.14-15). Nous devons aussi discerner entre " être tenté " et " consentir " à la tentation. Enfin, le discernement démasque le mensonge de la tentation : apparemment son objet est " bon, séduisant à voir, désirable " (Gn 3.6), alors que, en réalité, son fruit est la mort.
Dieu ne veut pas imposer le bien, il veut des êtres libres (...). À quelque chose tentation est bonne. Tous, sauf Dieu, ignorent ce que notre âme a reçu de Dieu, même nous. Mais la tentation le manifeste, pour nous apprendre à nous connaître, et par là, nous découvrir notre misère, et nous obliger à rendre grâce pour les biens que la tentation nous a manifestés. (Origène, or. 29)
" Ne pas entrer dans la tentation " implique
une décision du cœur : " Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur (...). Nul ne peut servir deux maîtres " (Mt 6.21-24). " Puisque l’Esprit est notre vie, que l’Esprit nous fasse aussi agir " (Ga 5.25). Dans ce " consentement " à l’Esprit Saint le Père nous donne la force. " Aucune tentation ne vous est survenue, qui passât la mesure humaine. Dieu est fidèle; Il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces. Avec la tentation, Il vous donnera le moyen d’en sortir et la force de la supporter " (1 Co 10.13).
Or un tel combat et une telle victoire ne sont possibles que dans la prière. C’est pas sa prière que Jésus est vainqueur du Tentateur, dès le début (Mt 4.1-11) et dans l’utile combat de son agonie (Mt 26.36-44). C’est à son combat et à son agonie que le Christ nous unit dans cette demande à notre Père de " nous garder en son nom " (Jn 17.11). L’Esprit Saint cherche à nous éveiller sans cesse à cette vigilance (1 Co 16.13; Col 4.2; 1 Th 5.6). Cette demande prend tout son sens dramatique par rapport à la tentation finale de notre combat sur terre; elle demande la persévérance finale. " Je viens comme un voleur : heureux celui qui veille ! " (Ap 16.15).