@jean-pierre Aussant. Vous me prêtez une intention. C'est votre responsabilité. Vous me l'imputez à péché : je trouve que vous allez un peu vite. Sur le fond du débat, je ne crois pas être hors sujet. Je vais préciser ma question, dans le but de nous (vous+moi) faire réfléchir. Après avoir précisé que je crois qu'il y a une intention, et une intuition justes dans votre propos : quand nous disons, avec une préface du missel, que Dieu est "maître du temps et de l'histoire", notre imagination et notre conceptualité sont débordées. Dire que Dieu gagnera, ou qu'il gagne de toute éternité, c'est de toute façon dire moins que le réel de Dieu. Cela dit, peut-on dire, dans les catégories que vous venez de préciser, que le Christ est de ceux qui n'ont pas conscience du piège sémantique que vous dénoncez ? Parce que, lorsqu'il dit "pourquoi m'as tu abandonné", ou bien je me trompe, ou bien il estime que la victoire définitive du Père n'est pas encore constatable - même si demeure la certitude d'une victoire ultérieure annoncée (le Fils de l'homme doit beaucoup souffrir, être tué, et ressusciter le troisième jour). Et si c'est du Christ que je vous parle, c'est qu'il me semble que, précisément, en affirmant ce que vous affirmez, vous dites qu'il nous est possible de sortir du temps pour nous mettre, conceptuellement, ou par l'imagination, dans l'éternité de Dieu ; et je dis que, à ce qu'il me semble, le Christ lui même ne l'a pas fait. Par ailleurs, vous savez comme moi que l'Eglise a condamné la doctrine de l'apocatastase. Si tous ne sont pas sauvés, la victoire de Dieu est-elle aussi totale ? Dès lors, peut-on dire, que, dans l'éternité, Dieu a déjà décidé de la damnation ou du salut, avant que, dans le temps, chacun vive sa vie terrestre ? Pour finir, me revient en mémoire 1Co 15,24 : Alors, tout sera achevé, quand le Christ remettra le pouvoir royal à Dieu son Père, après avoir anéanti, parmi les êtres célestes, toute Principauté, toute Souveraineté et Puissance.
Chez saint Paul, il y a un "avant" et un "après" de la victoire définitive du Christ : en Dieu, tout est de tout éternité ; mais la victoire de Dieu n'est elle pas manifestée (et complétée) dans l'histoire - "en ces temps qui sont les derniers", comme dit la lettre aux Hébreux. Bien à vous.