Laurier
1418

LA PASSION DE L’ÉGLISE et le Pasteur frappé

« Vous vous scandaliserez tous à cause de moi, car il est écrit Je frapperai le Pasteur, et les brebis du troupeau se disperseront. » (Zacharie XIII, 7 ; Matth. XXVI, 31 ; Marc XIV, 27 ; Daniel XII, 7).
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« En quelques mots, je voudrais essayer d’éclairer un peu vos esprits sur ce qui me semble devoir être notre ligne de conduite dans ces événements si douloureux qui interviennent dans la sainte Église. Il me semble que l’on peut comparer cette Passion que souffre l’Église aujourd’hui à la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ.
« Voyez combien ont été stupéfaits les apôtres eux-mêmes, devant Notre Seigneur ligoté, ayant reçu ce baiser de la trahison de Judas, Il est emmené ; on L’affuble d’une robe écarlate ; on se moque de Lui ; on Le frappe ; on Le charge de la Croix et les apôtres s’enfuient. Les apôtres sont scandalisés. Ce n’est pas possible. Ce n’est pas possible que Celui que Pierre a proclamé : Tu es le Christ, le Fils de Dieu, en soit réduit à cette indigence, à cette humilité, à cette avanie. Ce n’est pas possible. Ils Le fuient.
« Seule la Vierge Marie avec saint Jean et quelques femmes entourent Notre Seigneur. Eux ont gardé la foi. Ils ne veulent pas abandonner Notre Seigneur. Ils savent que Notre Seigneur est Dieu ; mais ils savent aussi qu’il est homme. Et c’est précisément cette union de la divinité et de l’humanité de Notre Seigneur qui a posé des problèmes extraordinaires. Car Notre Seigneur n’a pas seulement voulu être un homme. Il a voulu être un homme comme nous, avec toutes les conséquences du péché, mais sans péché, hormis le péché. Mais Il a voulu en subir toutes les conséquences, la douleur, la fatigue, la souffrance, la faim, la soif, la mort, jusqu’à la mort.
« Oui Notre Seigneur a réalisé cette chose extraordinaire qui a scandalisé les apôtres, avant de scandaliser bien d’autres qui se sont séparés de Notre Seigneur, ou qui n’ont plus cru à la divinité de Notre Seigneur. Tout au cours de l’Histoire de l’Église, on voit de ces âmes qui, étonnées devant la faiblesse de Notre Seigneur, n’ont pas cru qu’il était Dieu.
« Et c’est le cas d’Arius. Arius a dit : “Non, ce n’est pas possible, cet homme ne peut pas être Dieu. Sans doute c’est un surhomme ; c’est le premier-né ; mais ce n’est pas Dieu, puisqu’il a dit qu’il était moindre que son Père ; que son Père est plus grand que Lui. Il est donc plus petit que son Père ; Il n’est donc pas Dieu.”
« Et puis. Il a prononcé ces paroles si surprenantes : “Mon âme est triste jusqu’à la mort”. Comment Celui qui avait la vision béatifique, qui voyait Dieu dans son âme humaine et donc qui était beaucoup plus glorieux qu’infirme, beaucoup plus éternel que temporel, son âme était déjà dans l’éternité bienheureuse. Et le voici qui souffre et qui dit : “Mon âme est triste jusqu’à la mort”. Et qui prononce ces paroles stupéfiantes que jamais nous-mêmes nous n’aurions imaginé mettre sur les lèvres de Notre Seigneur : “Seigneur, Seigneur, pourquoi m’avez-vous abandonné”.
« Mais comment Notre Seigneur Dieu Lui-même peut-Il dire cela ? Pourquoi m’avez-vous abandonné ? Alors le scandale, le scandale hélas se répand parmi les âmes faibles et Arius entraîne presque l’Église tout entière à dire : Non, cette Personne, ce n’est pas Dieu. […]
« De même que je vous disais tout à l’heure, nous n’aurions jamais osé mettre sur les lèvres de Notre Seigneur cette parole : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? Jamais nous n’aurions osé mettre une parole comme celle-là sur Ses lèvres. Eh bien jamais non plus, nous n’aurions pensé que le mal, que l’erreur pouvaient pénétrer ainsi à l’intérieur de l’Église. [« La fumée de Satan est entrée dans le Peuple de Dieu » Paul VI, 29 juin 1972.]
« Eh bien, nous vivons cette époque. Nous ne pouvons pas fermer les yeux. Les choses sont là devant nous, elles ne dépendent pas de nous. Nous sommes témoins de ce qui se passe dans l’Église. De ce qui s’est passé d’effrayant depuis le concile, de ces ruines qui s’accumulent de jour en jour ; d’année en année dans la Sainte Église. Et plus nous avançons et plus les erreurs se répandent et plus les fidèles perdent la foi catholique. […]
« C’est un grand mystère. Mais nous, nous constatons les faits. Et nous devons nous placer devant ces faits et ne jamais abandonner l’Église, l’Église catholique et romaine, ne jamais l’abandonner. Ne jamais abandonner le successeur de Pierre, parce que c’est par lui que nous sommes rattachés à Notre Seigneur Jésus-Christ, à l’évêque de Rome, successeur de Pierre. »

(Mgr Marcel Lefebvre, sermon du 29 juin 1982, extraits)

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Pour une bonne compréhension de ce qu’est précisément « la Passion de l’Église », donnons-en ici, en quelques points concis à retenir, une définition précise :

1.
Passion = souffrance, selon l’étymologie même du mot… Il ne peut exister de Passion sans souffrance, puisque c’est la définition première et intrinsèque du mot Passion !
Décortiquons le mot « Passion » | Orthodidacte

2. La souffrance rédemptrice (physique ou morale) est obligatoirement liée à la nature humaine (corps/âme) ; « Je complète en ma chair ce qui manque à la Passion du Christ… » (S. Paul, Colos. I, 24)

3. L’Église ou le Saint-Siège entendus comme « personne morale », ou encore Jésus en tant que Verbe divin, ne peuvent souffrir. Par définition, le Verbe divin est impassible. Ils ne peuvent mourir. La Passion du Seigneur a été vécue sur terre, dans sa chair, “sous Ponce-Pilate”, de Gethsémani au Golgotha, et représente l’ensemble de ses souffrances pour le salut de l’humanité. Il n’y a pas de Rédemption sans souffrances. « C’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris » (Isaïe LIII, 5 et I Pier. II, 24) ; « Le Christ a souffert pour nous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces. » (v. 21 ; cf. S. Paul, Colos. I, 24 ; Isaïe LIII “Broyé par la souffrance”).

4. La souffrance dans les membres de l’Église se rencontre à toute époque, plus ou moins, mais elle est toujours présente et parfois fortement dans tel ou tel groupe de membres de l’Église (martyrs chez les premiers chrétiens, martyrs dans les pays non chrétiens, martyrs du communisme, de la Révolution française, des Guerres de Vendée, de la guerre d’Espagne, les missionnaires mis à mort, etc. Cf. le martyrologe). On peut y ajouter les souffrances personnelles parfois grandes lors de maladies, vieillesse, difficultés, possessions, obsessions, états mystiques, etc. Pour autant, on ne parle pas là, de « Passion de l’Église ». On s’associe seulement à la Passion du Christ et on « complète » selon l’expression de saint Paul (Colossiens I, 24).

5. Partant de ce constat, un nouveau groupe de membres de l’Église catholique qui souffrirait une nouvelle violente persécution n’accomplirait toujours pas « La Passion de l’Église ».

6. La caractéristique essentielle de La Passion est indiquée par le Christ lui-même, juste avant d’entrer dans sa Passion, qui s’appuie sur une Prophétie du prophète Zacharie : « Vous vous scandaliserez tous à cause de moi, car il est écrit Je frapperai le Pasteur, et les brebis du troupeau se disperseront. » (Zacharie XIII, 7 ; Matth. XXVI, 31 ; Marc XIV, 27 ; Daniel XII, 7). La Passion est donc vécue avant tout dans la Tête. Jésus-Christ dans sa nature humaine lorsqu’il était présent parmi nous. Le pape légitime, son vicaire, « doux christ sur la terre » (sainte Catherine de Sienne), en toute logique, pour « la Passion de l’Église », devant donc subir une gravissime persécution, scandalisant les fidèles, pour l’heure de la Puissance des Ténèbres (potestas Tenebrarum : Luc XXII, 53), heure dans laquelle nous sommes actuellement entrés selon l’enseignement du pape Grégoire XVI dans Mirari vos (1832), et du pape saint Pie X dans E Supremi apostolatus (1903). Cf. aussi Isaïe LIII, Psaume XXI… C’est l’heure de la Puissance des Ténèbres évoquée par le Christ lors de sa Passion (Luc XXII, 53), où dans les Derniers Temps la Bête apocalyptique aura le pouvoir de « jeter à terre la vérité et de vaincre les saints. » (Apoc. XIII, 7 ; Dan. VIII, 10-12 et XII, 11-12 ; II Thess. II.) Le Prophète Daniel nous en avertit : « VIII, 10-12 : Et elle s’éleva jusqu’à la force du ciel, et renversa une partie de la force, et des étoiles, et les foula aux pieds. Et elle s’éleva jusqu’au prince de la force, elle lui ravit son sacrifice perpétuel, et renversa le lieu de sa sanctification. Or la force lui fut donnée contre le sacrifice perpétuel, à cause des péchés ; et la vérité sera abattue sur la terre, et il agira, et il prospérera… » [VIII, 11 sq. et XII, 11] « C’est, en un mot, le Sacrifice de nos autels qui alors, en ces terribles jours, sera partout proscrit, partout interdit, sauf ce qui pourra se faire et se fera dans l’ombre souterraine des catacombes, partout interrompu. » (cardinal Billot, La Parousie, Beauchesne 1920.) Et « le chef de l’armée des saints, le prince de la force, dans l’Église militante au temps de l’Antéchrist, c’est le Pape, Vicaire de Jésus-Christ, éminent gardien du sacrifice perpétuel, et fondement de l’Église catholique. Cf. Matthieu XVI, 18. »

7. Léon XIII dans les A.S.S. réactualise cette Prophétie comme devant se réaliser à nouveau dans un proche avenir. Cf. prière à saint Michel dans son exorcisme publié en 1890-1891 (A.S.S., vol. xxiii, p. 743-747) : « Là où fut institué le siège du bienheureux Pierre, et la chaire de la Vérité pour la lumière des Nations, ils (les ennemis très rusés) ont posé le trône de leur abomination dans l’impiété ; en sorte que le Pasteur étant frappé (ut percusso Pastore), le troupeau puisse être dispersé. »

8. Le Vénérable Holzhauser (1650) dit exactement la même chose[1] et quantité d’autres prophéties privées, nous annonçant, plus de cent ans à l’avance que « le Saint-Père aura beaucoup à souffrir » précisément « parce que pour un temps l’Église sera livrée à de grandes persécutions : ce sera le temps des ténèbres ; l’Église aura une crise affreuse. » (La Salette 1846, Fatima 1917, San Damiano, M.-J. Jahenny, A.-C. Emmerich, etc.)

9. Si on voit bien le troupeau dispersé depuis Vatican II, QUID du Pasteur frappé et donc du Pape souffrant à l’instar du Christ lors de sa Passion : ? Ce n’est ni Jean-Paul II, ni Benoît XVI, ni Bergoglio !!!

10. Beaucoup dans le monde catholique s’aperçoivent pourtant que quelque chose ne tourne pas rond à Rome au Vatican alors que l’Église romaine est indéfectible (dogme) : comme on dit, il y a forcément « un loup quelque part »… Mais où ? Tout le monde cherche ! Mais la « dispersion du troupeau » ne fait que s’intensifier…

11. Ajoutons pour finir qu’on sait par les prophéties de l’Apocalypse (chap. XIII, XVI, XIX, XX), qu’un faux prophète (pseudo-prophetæ : chef religieux illégitime) usera de son influence mondiale pour mener les croyants vers l’Antéchrist… Qui cela peut bien-t-il être si François est bien le VRAI pape légitime ?? Le faux (pseudo) ne pouvant être synonyme du VRAI ! Et le FAUX ne pouvant totalement prendre la place du VRAI en raison de l’indéfectibilité et de la pérennité de l’Église (dogme) ! Il ne pourra que l’éclipser, puisque, nous l’avons vu, « l’Église ne peut mourir »…

Voilà, résumée en dix points, de manière concise et rigoureuse, la situation actuelle. Si on rejette cette grande annonce du pape souffrant / Pasteur frappé, si on ne l’intègre pas dans la réalité présente, alors il n’y a pas de Passion de l’Église : c’est faux radicalement et irréel. Il y a tout au plus une grande confusion actuellement dans l’Église ; pire : un suicide ! mais certainement pas de Passion puisqu’il n’y a pas de souffrance visible aujourd’hui à la Tête de l’Église, à l’instar de la Passion du Christ. Selon certains sedevacantistes, il n’existerait même plus aucune autorité hiérarchique légitime (ni pape, ni cardinal, ni évêque résidentiel) ! Impossible donc de s’unir à un Pasteur frappé/ souffrant et de l’accompagner dans son douloureux calvaire… Le mot Passion serait alors utilisé inadéquatement, pour le moins…

Pro VerItate

Pour un développement de cet important sujet, lire ces deux livrets :

LA PASSION DE L'ÉGLISE

LA PASSION DE L'ÉGLISE et le Pape Paul VI

[1] « …Le faux prophète s’élèvera, prévaudra et sévira sur la terre ferme, qui est voisine des mers et sur laquelle se trouve actuellement l’empire romain renfermant dans son sein les États de l’Église. Il est dit que cette Bête aura deux cornes semblables à celles de l’Agneau, parce qu’elle sera un chrétien apostat et qu’elle s’élèvera secrètement et frauduleusement. […] Elle envahira les États de l’Église…, occupera le siège pontifical, tuera le dernier pape successeur légitime de saint Pierre… […] Alors l’Église sera dispersée dans les solitudes et les lieux déserts [Apoc. XII, 6 et 14], dans les forêts et les montagnes, et dans les fentes des rochers, parce que le pasteur aura été frappé, et que les brebis seront dispersées. Car il en sera de même qu’au temps de la Passion de Notre-Seigneur. Et il parait que c’est à cette circonstance de la dernière désolation que Jésus-Christ fit allusion, lorsqu’il dit dans sa Passion, Matth., XXVI, 31 : “Il est écrit : Je frapperai le pasteur, et les brebis du troupeau seront dispersées.” Alors l’Église latine sera déchirée, et à l’exception des élus, il y aura défection totale de la foi. » (Interprétation de l’Apocalypse, Apoc. XIII, 11.)

Texte téléchargeable sur ce lien : Fichier PDF PASSION DE L'ÉGLISE résumée en dix points 6p.pdf

Illustration : Le Portement de croix, par Jérôme Bosch, XVe siècle.
Le Portement de Croix fait partie des œuvres tardives du maître et elle est une composition des plus intriguantes au sein de l’art occidental. La perception de l’espace est inexistante. Un fouillis de visages malveillants se presse autour de la tête du Christ. L’élaboration du tableau est toutefois assez stricte. La tête du Christ se trouve exactement à l’intersection de deux diagonales. La première est formée par la poutre de la croix, avec en haut à gauche le personnage de Simon de Cyrène et en bas à droite le mauvais larron. La deuxième diagonale relie l’empreinte du visage du Christ sur le suaire de Véronique, en bas à gauche, et le bon larron, en haut à droite. Ce dernier est harcelé par un vulgaire charlatan ou pharisien et par un cénobite malveillant – une allusion de Bosch au fanatisme religieux de son époque. Les têtes grotesques évoquent les masques portés pendant les mystères de la Passion ainsi que les caricatures de Léonard de Vinci. En revanche, le doux modelé du visage de Jésus exprime la sérénité. Il est l’Homme de douleurs qui, abandonné de tous, triomphe du Mal sur Terre. Cette représentation s’inscrit parfaitement dans l’optique des confréries, dont Bosch aussi fait partie. Bien que la paternité de l’œuvre soit controversée, le tableau demeure incontestablement une des créations les plus hallucinantes de l’histoire de l’art occidental.
Arthur De la Baure
Puisque vous avez montré précédemment que l'Église était nécessairement visible dans sa hiérarchie ( bien que notre Seigneur nous ait laissé cette celebre maxime: " quand le fils de l'homme viendra trouvera-t-il la Foi sur terre", ce qui implique qu'à la fin des temps il n'y aura peut-être plus de hiérarchie du tout. Plusieurs commentateurs de l'Apocalypse l'ont expliqué par ailleurs) et …Plus
Puisque vous avez montré précédemment que l'Église était nécessairement visible dans sa hiérarchie ( bien que notre Seigneur nous ait laissé cette celebre maxime: " quand le fils de l'homme viendra trouvera-t-il la Foi sur terre", ce qui implique qu'à la fin des temps il n'y aura peut-être plus de hiérarchie du tout. Plusieurs commentateurs de l'Apocalypse l'ont expliqué par ailleurs) et qu'aujourd'hui vous semblez nous expliquer que les papes conciliaires ne le sont pas dans cette Église qui vit sa passion, où donc se trouve selon vous l'Église visible ? Plus précisément où se trouvent le Pape et les prélats véritablement catholiques?