Peut-on reprendre le Pape?
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"Remarquons toutefois que, s’il y avait danger pour la foi, les supérieurs devraient être repris par les inférieurs, même en public. Aussi Paul, qui était soumis à Pierre, l’a-t-il repris pour cette raison. Et à ce sujet la Glose d’Augustin explique : « Pierre lui-même montre par son exemple à ceux qui ont la prééminence, s’il leur est arrivé de s’écarter du droit chemin, de ne point refuser d’être corrigés, même par leurs inférieurs. »:
Cette citation vient de la Summa Theologica, II-IIae, Question 33, Article 4, réponse 2. Il s'agit d'une citation incomplète et sortie de son conteste.
Le sujet de la question 33 est la correction fraternelle en général, qui considère le péché comme délétère pour le pécheur, et le préjudice éventuel causé aux autres par le scandale (un mauvais exemple) ou d’autres préjudices au bien commun.
Dans l’article 1 de la Question 33, Thomas enseigne:
"La correction du fautif est un remède que l’on doit employer contre le péché du prochain. Or un péché peut être envisagé sous deux aspects : comme un acte nuisible à celui qui le commet ; et comme un préjudice porté aux autres, qu’il lèse ou scandalise, et même au bien commun dont le bon ordre s’en trouve troublé."
La question de la correction doctrinale du Pontife Romain, en tant que Vicaire du Christ , n'est pas abordée dans cet article de Saint Thomas, et pour cause.
Le juge suprême de tous les fidèles
Le Pape est le seul juge de tous les chrétiens, le Vicaire du Christ, il bénéficie de l'assistance du Saint Esprit sous la forme des charismes pontificaux. Cela rentre dans le cadre des promesses de Notre-Seigneur Jésus-Christ faîtes a" Pierre " et à son Église jusqu'à la fin des temps.
Ce charisme empêche le Pape d'entrainer l'Église dans l'erreur lorsqu'il met en exercice les Clés de Pierre (sur la doctrine et les mœurs), et même de manière non-infaillible( hors d'une déclaration ex cathedra), il empêche absolument toute défaillance grave de la foi excluant donc les péchés d’apostasie, d’hérésie et d’idolâtrie.
Ceux qui se proposent de corriger le Pape, le corps des Evêques qui le soutiennent, ou même des Conciles Oecuméniques, n’ont ni le droit, ni l' assistance divine et ne possèdent rien de tel que le charisme papal de vérité et de foi indéfectible. Il s'agit d'une attitude révolutionnaire qui renverse la hiérarchie spirituelle voulue par Dieu.
Tandis le corps des Evêques enseigne avec et sous le pape, personne n’a le pouvoir formel, d’enseigner ou de corriger le Pape.
Pape Saint Boniface Ier, Lettre « Manet beatum » à Rufus et aux autres évêques de Macédoine, 422: "Jamais personne n’a levé la main avec audace contre l’éminence apostolique dont il n’est pas permis de réviser le jugement, personne ne s’est dressé contre elle s’il ne voulait pas être jugé."
Pope Saint Nicolas Ier, Lettre « Proposueramus quidem » à l’empereur Michel, 865:
"…Le juge ne sera jugé ni par l’empereur, ni par tout le clergé, ni par les rois, ni par le peuple… » Le premier Siège ne sera jugé par personne « …"
Pape Saint Léon IX, Lettre « In Terra Pax Hominibus« , 1053:
"En passant un jugement a précédent jugement sur le grand Siège, concernant ce qui n’est permis à aucun homme de juger, vous avez reçu l’anathème par tous les Pères de tous les vénérables Conciles … Comme la charnière ouvre et ferme la porte tout en restant intacte, de même Pierre et ses successeurs possèdent un libre jugement sur toute l’Eglise, personne ne pouvant leur enlever leur statut en raison du fait que « le premier Siège n’est jugé par personne »."
Pape Boniface VIII, « Unam Sanctam« , 1302, approuvé par le Cinquième Concile de Latran:
"Si donc le pouvoir terrestre dévie, il sera jugé par le pouvoir spirituel ; et si un pouvoir spirituel inférieur dévie, il le sera par celui qui lui est supérieur ; mais si le pouvoir suprême dévie, c’est par Dieu seul et non par l’homme qu’il pourra être jugé, comme l’atteste l’Apôtre : » L’homme spirituel juge de tout, et n’est lui-même jugé par personne » 1Co 2,15."
Pape Grégoire XI, 1377 condamnait l’erreur suivante:
"Un homme d’Eglise, et même le pontife romain, peut être légitimement réprimandé et même mis en accusation par des subordonnés et des laïcs.Condamné."
Code de droit canonique, 1917:
"Can. 1556 – Le Premier Siège n’est jugé par personne."
La correction de Saint Pierre par Saint Paul
Precisons tout de suite que Pierre a reçu du Christ le rôle et l’autorité d’enseigner et de corriger même Paul – un apôtre par révélation divine (sur le chemin de Damas) – tandis que Paul n’enseigne ni ne corrige Pierre avec autorité.
Maintenant, remarquons ce que Saint Thomas d’Aquin dit [citant la Glose d’Augustin]: « Pierre lui-même montre par son exemple à ceux qui ont la prééminence, s’il leur est arrivé de s’écarter du droit chemin, de ne point refuser d’être corrigés, même par leurs inférieurs. » Il revient donc au supérieur, en particulier à l’évêque ou au Pontife Romain, de décider si la correction proposée est correcte ou non et, sur cette base, de l’accepter ou de la rejeter. Thomas place la décision sur la réponse à une correction auprès du supérieur, de sorte que seulement « s’il leur est arrivé de s’écarter du droit chemin », ils décident d’eux même de ne pas refuser cette correction.
« Paul a corrigé Pierre ». Oui, mais aucun des disciples n’a osé corriger Pierre. Il est absurde de prétendre que, sur plus d’un milliard de catholiques dans le monde, n’importe lequel ou plusieurs d’entre eux peuvent « corriger » le Pape chaque fois que leur compréhension de la Foi diffère de celle de l’enseignant et juge Suprême de l’Église. La correction du Pontife Romain n’est pas la même chose que la correction fraternelle en général.
Paul était un apôtre. Si un Pape erre supposément, dans une décision non infaillible de doctrine ou de discipline, il revient en premier lieu aux successeurs des Apôtres de le corriger. Nous n’avons qu’un seul exemple, autre que celui du Christ, de Pierre corrigé, et c’est celui de Paul, Apôtre des Gentils et auteur de plusieurs livres de la Bible. Nous ne lisons pas que quelqu’un d’autre ait jamais corrigé Pierre. Et l’erreur pour laquelle Paul a corrigé Pierre concernait ses interactions avec les autres, son comportement personnel, et non une décision sur la doctrine ou la discipline de l’Église universelle :
« Au surplus, si Pierre fut blâmé de ce qu’après avoir vécu avec les païens, il se séparait d’eux et faisait acception de personnes, ce fut là une faute de conduite et non une faute d’enseignement. »
-Tertullien, Prescription contre les hérétiques, XXIII
Pierre aurait pu refuser la correction de Paul, et dans ce cas, Paul n’aurait eu aucun recours. Paul doit accepter l’autorité de Pierre sur lui, mais personne sur terre n’a d’autorité sur Pierre et ses successeurs.
Il est de foi que le Seigneur Jésus doit être écouté et obéi. Il permet la correction fraternelle, de la part d’un individu ou d’un groupe. Mais notez que l’autorité finale en la matière revient à l’autorité de l’Église. Ceux qui « n’écoutent pas » l’Église seront traités, nous dit le Christ, comme les incroyants (païens) et les pécheurs impénitents.
Soumission au Pontife Romain
La seule référence de St Thomas au Pape est la correction de Paul, qui concernait le comportement et exemple personnel de Pierre, non pas son exercice des Clés.
Saint Thomas d’Aquin, Contra Errores Graecorum, III, 38:
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“Il est également prouvé qu’il est de nécessité de salut, d’être soumis au souverain Pontife.”
Concile Oecuménique de Latran V:
“…qui abandonne l’enseignement du Pontife Romain ne peut être dans l’Eglise »
[…]
« Bien plus, puisque la soumission au Pontife Romain est nécessaire au salut pour le salut des tous les fidèles du Christ, tel qu’enseigné par le témoignage des Saintes Ecritures et des saints Pères, et déclaré dans la constitution du Pape Benoît VIII… »
Saint Thomas d’Aquin, Chaîne d’Or, sur Matthieu XVI:13-19, citant St Cyrille [attribuée incorrectement à St Cyrille mais approuvée par St Thomas]:
« D’après cette promesse du Seigneur, l’Église apostolique, placée au-dessus de tous les évêques, de tous les pasteurs, de tous les chefs des Églises et des fidèles, demeure pure de toutes les séductions et de tous les artifices des hérétiques dans ses pontifes, dans sa foi toujours entière et dans l’autorité de Pierre. Tandis que les autres Églises sont déshonorées par les erreurs de certains hérétiques, seule elle règne, appuyée sur des fondements inébranlables, imposant silence et fermant la bouche à tous les hérétiques; et nous, si nous ne sommes ni égarés par une téméraire présomption de notre salut, ni enivrés du vin de l’orgueil, nous confessons et nous prêchons en union avec elle la règle de la vérité et de la sainte tradition apostolique. »
Pape Innocent III, Lettre « Apostolicae Sedis primatus », Denz.775:
« Qu’il ait prié pour lui, le Seigneur le reconnaît lorsqu’il dit au moment de la Passion : » J’ai prié pour toi, Pierre, afin que ta foi ne défaille pas. Et toi. quand tu seras converti, fortifie tes frères » Lc 22,32 ; par là il signifiait manifestement que jamais ses successeurs ne dévieraient de la foi catholique, mais que bien plutôt ils y rappelleraient d’autres et aussi qu’ils confirmeraient les hésitants, et il lui accorda le pouvoir d’en confirmer d’autres par le fait qu’il impose aux autres la nécessité d’obéir. »
Objection du père de famille(R.P Barbara)
Sans doute, diront certains, ces papes n'ont pas autorité pour commander ce que la foi nous ordonne de refuser, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne possèdent plus la papauté. En effet, jamais l'Église n'a enseigné que les supérieurs perdent leur autorité en commandant des péchés. Ainsi, quand un père de famille commande à ses enfants de pécher, ces derniers doivent lui résister. Mais il demeure malgré tout le père de ses enfants, il ne perd pas son autorité. Il en est de même pour le pape. Les fidèles doivent lui résister quand il commande le péché. Mais, bien que leur résistance soit juste, cela ne prouve pas pour autant que ce pape a perdu la papauté. Même quand on doit lui résister, le pape est toujours pape, comme le père de famille le plus coupable est toujours le père de ses enfants.
Cette objection est un sophisme. Pour le comprendre, rappelons ce qu'est l'autorité à la lumière des paroles de saint Paul. L'autorité est une délégation que Dieu fait de son droit (de son domaine) à certaines de ses créatures. Quiconque la reçoit est revêtu de l'autorité de Dieu. Voilà pourquoi l'Apôtre dit que quiconque résiste à l'autorité résiste à Dieu qui l'a instituée.
C'est seulement au Christ que « tout pouvoir, omnis potestas, a été donné dans le ciel et sur la terre » (Mt. XXVIII, 18), l'autorité que Dieu délègue aux hommes est toujours limitée. Ainsi le prince ne la reçoit que pour les choses temporelles, et l'homme d'Église, pour les spirituelles. Dans chaque ordre le pouvoir est plus ou moins étendu : celui d'un chef d'état l'est beaucoup plus que celui d'un préfet ; celui du pape, beaucoup plus que celui d'un curé. En dehors du domaine pour lequel il a délégation, le supérieur n'a aucune autorité, aucun droit. Il en est ainsi du père de famille. L'autorité qu'il a sur ses enfants n'est pas illimitée ; elle ne s'étend ni à leur vie, ni à l'intégrité de leur corps, ni à leurs relations avec Dieu. Il n'a donc ni le droit de les tuer ou de les mutiler, ni celui de les faire pécher. Et donc, quand il commande dans ces domaines où il n'a pas autorité, ses enfants peuvent et doivent lui résister, mais lui ne perd pas une autorité qu'il n'a pas engagée. Et voilà pourquoi ce père indigne conserve son autorité paternelle.
Il en irait de même pour un pape qui, comme homme privé, commanderait à quelqu'un de pécher. Dans ce cas, il ne s'agirait pas du pape agissant en tant que pape, du pape enseignant à l'Église universelle la légitimité du vol, de la fornication, de l'adultère ou de quelque autre péché. Il s'agirait de l'homme privé qui, profitant de ce qu'il est pape, commanderait le péché. C'est donc à l'homme privé, à l'homme qui en cela n'a sur elle aucun droit, que résisterait la personne sollicitée. N'ayant en ce cas aucune autorité, ce pape ne pourrait ni l'engager, ni la perdre. Et voilà pourquoi il resterait pape, malgré sa conduite privée dépravée.
Il en est tout autrement des papes de Vatican II. Tout ce que nous refusons, la liturgie de la Messe, la liberté religieuse, l’œcuménisme, les sacrements, la catéchèse, tout est de leur domaine. C'est dans leur propre domaine que la foi nous commande de leur résister. C'est donc dans leur propre charge qu'ils sont démunis de l'autorité qu'ils devraient avoir. Privés d'autorité, ils sont privés de la papauté. Car la papauté n'est pas autre chose que l'autorité suprême de l’Évêque de Rome sur toute la chrétienté. Démunis de l'autorité pontificale, ils ne sont pas ou ne sont plus les Vicaires du Christ. Le Christ ne parle plus par leur bouche et la parole du Maître : « Qui vous écoute m'écoute » (Lc X, 16) ne vaut pas pour eux. Voilà la raison pour laquelle la foi nous commande de mépriser leurs ordres et leur enseignement nouveau.
Conclusion
Si l' on considère les papes conciliaires comme parfaitement legitimes, nous devons leur obeir religieusement . Les critiquer, refuser l'obéissance qui leur est due, corriger leurs enseignements etc...ne sont pas des attitudes catholiques.
La seule possibilité pour résister a leur fausse autorité est de comprendre que leurs enseignements, leur liturgie, leur droit, leurs sacrements etc....ne sont pas catholiques et que par conséquent ils ne le sont pas non plus. Un non catholique ne pouvant exercer une quelconque autorité dans "l'Epouse immaculée du Christ ", la conséquence est inévitable : ils sont des anti-papes. Alors nous pouvons les corriger publiquement pour alerter les fidèles trompés ou bien les ignorer royalement.
Que Dieu nous éclaire tous!